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Un projet de harga qui finit en meurtre: 10 ans de prison pour les auteurs

par M. Nadir

B. Ahmed, boucher, et Ch. Djelloul, sans emploi, ont été condamnés la semaine passée à dix ans de prison pour le meurtre d'un certain K. Dahmane, vendeur de fruits et légumes, survenu le 5 novembre 2017. Quelques jours plus tôt, les trois jeunes s'apprêtaient à quitter clandestinement le pays à bord d'une barque...

Selon les faits consignés dans l'arrêt de renvoi et confirmés devant le tribunal criminel de première instance, K. Dahmane, vendeur de fruits et légumes algérois et deux amis se sont rendus à Oran où les attendait un passeur qui devait les aider à traverser la mer en direction de l'Europe. Arrivés dans la capitale de l'Ouest, les trois jeunes ont découvert que le passeur ne les avait pas attendus et était parti en Espagne. Dépités mais loin de se décourager, ils décident de chercher un autre moyen de réaliser leur rêve. Ils font la connaissance de B. Ahmed et Ch. Djelloul, tous deux résidant à Gdyel, et candidats potentiels à la harga. Le premier s'engage à débrouiller une barque motorisée et contre la possibilité de faire partie du voyage et Djelloul met 70.000 DA pour pouvoir se joindre au groupe.

Les choses se gâtent quelques jours plus tard quand Ahmed et Djelloul acquièrent la conviction que les Algérois, notamment Dahmane, se jouent d'eux et escomptent partir seuls. En effet, ils les évitent constamment et ne répondent pas à leurs coups de téléphone. Le dimanche 5 novembre, en revenant de chez le propriétaire du moteur de bateau, Dahmane et l'un de ses amis prénommé Mohamed Amine tombent sur Ahmed qui les attire dans une ruelle où les attendait Djelloul muni d'une hache. Dahmane reçoit un coup du couperet à la main avant que Ahmed sorte une épée pour lui porter plusieurs coups. Dans la mêlée, Mohamed Amine parvient à prendre la fuite et à sauver sa peau de l'agression vengeresse des deux Oranais. A l'hôpital où il est évacué, les médecins ne peuvent que constater le décès. A l'autopsie, le médecin légiste recense 12 coups portés à l'aide d'un objet coupant, dont un a atteint profondément l'estomac. L'expertise relève également que le nombre de plaies et les traces découvertes sur les os dénotent de «l'acharnement» de ou des auteurs de l'agression. Interpellés, Ahmed et Djelloul reconnaissent les faits et expliquent leur acte par le désir de se venger de la trahison programmée de la victime qui prévoyait de les laisser sur le carreau alors qu'ils avaient investi dans le projet. Les deux jeunes seront inculpés pour homicide volontaire avec préméditation selon les articles 254, 255, 256 et 261, alinéa 1 du code pénal. Ils encourent la peine de mort. Devant le tribunal criminel de première instance, les accusés reconnaissent les faits en soulignant toutefois qu'ils avaient agi de la sorte parce qu'ils savaient que la victime et ses amis voulaient s'en prendre à eux au cas où ils échoueraient à ramener la barque promise.

Dans son réquisitoire, le ministère public requiert la peine capitale en se basant sur les aveux des accusés et les éléments de preuve qui démontraient qu'ils avaient formé le dessein de perpétrer le meurtre.

Les avocats, eux, plaideront les circonstances atténuantes pour des jeunes de 23 et 25 ans que la vie n'a pas gâtés. Après délibérations, le tribunal criminel accordera les circonstances atténuantes à B. Ahmed et Ch. Djelloul et les condamnera à dix ans de prison.