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Le pouvoir entre illusion et ruse tacticienne

par Kharroubi Habib

Si le pouvoir croit que les manifestations et marches anti-cinquième mandats sont vouées à l'essoufflement après celles magistrales qu'a connues la rue le 22 février et qu'il n'en subsistera que celles éparses et plus gérables qu'organisent en rangs dispersés certains secteurs de la société, il est alors dans une illusion suicidaire qui va se dissiper pour lui ce vendredi qui promet que l'Algérie va vivre un moment qui aura encore plus de résonance que celui qu'elle a vécu le précédent vendredi. Tout présage en effet que ce 1er mars la protesta populaire sera encore plus impressionnante dans son expression et donc catégorique dans son opposition au délirant et humiliant projet du cinquième mandat. Si ce fait se vérifie, les « décideurs » perdront toute marge de manœuvre et à moins de se risquer à faire taire la contestation en imposant la paix des cimetières, il lui faudra composer.

Certains indices montrent qu'au sein de ce pouvoir il en est dont l'aveuglement et l'autisme sont quelque peu dissipés d'où l'émission par eux de ballons-sondes sur des sorties de crise qui tout en préservant l'essentiel pour leur camp pourraient donner un semblant de satisfaction à la protesta populaire. Celle consistant à présenter Ramtane Lamamra, l'ex-ministre des Affaires étrangères et présentement ministre conseiller auprès du président de la République, comme pouvant être l'homme de la situation est évoquée avec une insistance qui serait qu'elle crédite qu'un cercle du pouvoir en fait le « plan B » salvateur de son point de vue. Sauf que pour aussi respectable et estimable que soit Lamamra, la dévolution de la succession à Bouteflika qu'envisagerait pour lui ce cercle en question n'en sera pas moins une cooptation -mode d'accession au pouvoir- dont les Algériens ne veulent plus.

Depuis qu'ils sont dans la rue, les Algériens s'époumonent à crier leur refus d'un cinquième mandat mais aussi à exiger le respect de la souveraineté populaire qui ne peut se démontrer que par la tenue d'une élection présidentielle dans les conditions lui assurant l'honnêteté et la régularité les plus indiscutables.

Un tel scrutin que le pouvoir sait fatal pour lui au point de discrédit dans lequel il est n'est pas envisageable pour ses tenants même si leur candidat est Lamamra. Les Algériens sont conscients de cela qui leur fait raison de ne pas relâcher la pression sur le pouvoir et de ne pas dévier de leur revendication fondamentale qui est celle de la rupture avec un pouvoir en putréfaction et avec le sérail de ses serviteurs, fussent-ils crédités d'une réputation honorable.