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Ni rébellion ni déstabilisation

par Mahdi Boukhalfa

L'homme se défend de s'être «rebellé» ni de «déstabiliser» son parti, le FLN. Mais, Saïd Bouhadja, le président de l'APN, est au milieu malgré lui d'un terrible maelström, un terrible bras de fer au sein de l'APN, dommageable pour la stabilité des institutions parlementaires. Les deux principaux partis qui gouvernent de fait le pays, en réclamant le départ du président de la seconde chambre du Parlement, sans présenter à l'opinion publique les vraies raisons, politiques, de cet «oukaze» contre M. Saïd Bouhadja, plongent le Parlement dans une crise profonde et décrédibilisent un peu plus une des principales institutions du pays. D'autant que les circonstances de cette attaque contre le président de l'APN semblent encore floues, peu convaincantes par rapport à l'exigence autant du départ de Bouhadja que du blocage du fonctionnement d'une des deux chambres du Parlement.

Cela fait maintenant plus de 20 jours que l'APN est bloquée et que la tête de son président, désigné par son parti à ce poste, est aujourd'hui réclamée par le même SG du FLN qui a proposé sa nomination. Cette situation est en train par ailleurs de donner cette image étonnante d'une Assemblée nationale tiraillée entre le respect des fonctions et des missions de cette institution et les visions purement partisanes d'une partie des députés, ceux de la majorité parlementaire. L'offensive contre Saïd Bouhadja ne peut ne pas être une manœuvre calculée, pensée et réfléchie contre le troisième personnage politique du pays par la première formation politique du pays, dont le SG pousse pour un cinquième mandat du président Bouteflika, et qui veut en même temps que le FLN soit un «parti-Etat». Et, dans ce coup de grisou qu'il a fomenté au Parlement, il n'hésite plus à présenter le président de l'APN désigné et élu comme un «ennemi de l'Etat et le livre non pas à la vindicte populaire, cela aurait été une autre erreur politique, mais à ses troupes qu'il a lâchées contre celui-là même qu'il a soutenu pour sa nomination.

Il est clair, du reste, que les enjeux de cette bataille de troisième type au sein de l'APN sont ailleurs, beaucoup plus liés à la position de Saïd Bouhadja qui ferait partie de ceux qui veulent le départ du SG du parti, Djamel Ould Abbès. En outre, certains ne sont pas loin de penser que les deux SG du FLN et du RND ont d'autres objectifs pour les deux chambres du Parlement avant la tenue de la prochaine présidentielle. L'intense pilonnage de Bouhadja pour qu'il présente sa démission cadre mal avec cette offensive du FLN et son SG pour que le président Bouteflika «poursuive» sa mission à la tête du pays, estimant qu'il est le garant de la stabilité politique du pays et de son développement. En allant guerroyer contre le président de l'APN, avec un soutien tactique du SG du RND, Ould Abbès sait cependant qu'il a engagé une guerre sur un terrain miné. Demander la démission d'un président de l'APN légitimement élu contraste fortement avec les accusations des redresseurs du FLN qui l'accusent de leur côté de s'être emparé illégitimement des commandes du parti, après le départ d'Amar Saadani.

Le silence de la présidence, qui pourrait être assimilé à une volonté de non-ingérence que s'est imposée le président dans les affaires du Parlement, aurait-il été interprété, autrement, par Ould Abbès comme une caution pour faire «dégager» Saïd Bouhadja de l'APN ? Question: pourquoi maintenant et, surtout, quel dividende pour Ouyahia ?