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Que de regrets et d'occasions ratées pour cette Algérie qui régresse !

par Abdelkader Khelil*

«?C'est bien précisément dans cette situation difficile que traverse notre pays, que nous avons le plus grand besoin de réhabiliter nos coopératives agricoles de production et de services dissoutes prématurément dans les années 80 sous la pression du FMI, sans qu'aucun bilan n'ait été établi et sans qu'aucune réflexion et stratégie à long terme n'aient été élaborées pour bâtir une authentique politique capable de développer, d'intensifier notre agriculture et d'améliorer sa production dans le cadre de la diversification de l'économie post-pétrolière.»

C'est par cette phrase que j'avais terminé mon article du 10 août 2017, intitulé : «De l'oligarchie prédatrice et de l'éclipse de la paysannerie utile» ! Il est vrai qu'une contribution à elle seule ne peut suffire et être nécessaire pour traiter d'une question et d'une problématique si importantes pour le devenir de notre pays et d'un de ses secteurs stratégiques que malheureusement les adeptes du libéralisme initié par le FMI et la Banque Mondiale dès le début de la décennie 80, ont déstructuré et détruit. Comprenant très bien que cet article ait pu laisser un goût d'inachevé et une certaine frustration chez celles et ceux qui ont à cœur la relance de ce secteur vital pour l'Algérie post-pétrole et sa mise sur de bons rails. Je me devais de le compléter et de l'enrichir puisqu'il s'agit in finie d'envisager une mobilisation large et optimale de la force agricole productive. Il faut dire que l'on a voulu la marginaliser et affaiblir, d'autant qu'elle manquait d'aide et d'accompagnement technique et financier. Elle a été aussi amoindrie par les flux successifs et forcés d'exode de périodes sombres de notre histoire post décennie 80. Comme il convient aussi, de souligner cette nécessité d'agir et de se mobiliser pleinement pour contribuer à la restauration de la dignité de cette paysannerie utile, déjà laminée et marginalisée d'abord par les exactions, les spoliations et les injustices commises depuis le début du 19ème par la France coloniale.

Et comme si cela n'avait pas suffi, trois décennies plus tard, c'est au tour de l'hydre intégriste à faire fuir de nombreuses familles rurales vers les grandes et moyennes villes certes mieux sécurisées, mais nullement conçues et adaptées à leurs besoins et à leur génie créateur? Cela s'est traduit par l'abandon d'un potentiel productif de plusieurs milliers d'hectares et par une déprise agraire préjudiciable pour notre pays aux espoirs déchus alors qu'il se doit d'assurer de façon continue et du mieux qu'il peut, sa sécurité alimentaire dans un Monde où la nourriture et la production de biens alimentaires est perçue comme une arme de chantage et de soumission de peuples entiers. Dans ce processus de déracinement douloureux et irréversible si rien n'est entamé de façon sérieuse et planifiée, la population rurale est selon les chiffres de la Banque mondiale, en régression constante, passant de 69% de la population totale en 1961, à 29% en 2016. Ces chiffres sont à comparer avec ceux du Maroc, de la Tunisie et de l'Egypte qui passent respectivement et pour les mêmes dates de 71%,62%, 62% à 39%, 33% et 57%. Quant à l'emploi, l'agriculture algérienne n'a créée que 9% du total d'emplois en 2016, contre 21% en 1961. Alors qu'au Maroc, la part des emplois agricoles est de 33%, contre 15% pour la Tunisie est 26% pour l'Egypte? Quelle explication donner à ce manque appréciable de bras vaillants et utiles pour la production de biens alimentaires tant nécessaires à notre pays ?

Chez-nous tout particulièrement, la paysannerie jadis hiérarchie tribale en gestionnaire du destin de toute la communauté à laquelle elle était tant attachée, qui plaçait le droit d'aînesse au-dessus des uns, et la piété filiale par-dessus tous, n'est plus aussi influente et importante comme veulent nous le faire croire par opportunisme et clientélisme les rentiers de l'UNPA et consorts à chaque veille de rendez-vous électoral ! La vérité est que de nos jours, l'autorité morale a perdu prise sur le destin du monde rural et s'est vue bousculer par les jeunes contestataires, qui ont depuis bien longtemps rejoint la ville pour faire par esprit de débrouillardise et par «qfaza» de petits boulots sur les trottoirs, les parkings et les plages quand ils ne sont pas tout simplement livrés aux aléas des risques des grandes agglomérations, de leurs tentations et dangers. Alors, oui ! Force est de constater l'état de désolation et d'abandon de nos campagnes, malgré les gros investissements consentis par l'État mais affectés principalement à celles et ceux dont les moyens sont plus que suffisants. Tout semble dire que cette catégorie de jeunes et de moins jeunes dépaysanés, du fait des politiques suivies depuis la décennie la décennie 80, a définitivement tourné le dos au travail productif !

Ces «jeunes loups» préfèrent se «fossiliser» aux cafés et aux gargotes des villes et villages, plutôt que de revenir au travail saint et productif de la terre qui s'accommode peu de leurs nouvelles conditions inspirées par la frime et le souci du paraître autrement que paysan, comme s'il s'agissait là d'une tare qu'il faille effacer à jamais. Ils n'ambitionnent rien d'autre que de garder leur statut de «rurbains» vivant aux crochets de l'Etat providence, et des avantages de l'ANSEJ et l'ANEM.

Pauvre de nous, peuple «cul-jatte» ! Nous sommes là, dans la logique du soutien politique du «donnant-donnant», et non celle économique, du partenariat et du «gagnant-gagnant» ! Dans le pire des cas, certains parmi eux finiront comme élus au niveau local, voire même, députés ou sénateurs rentiers à vie ! Parions qu'ils seront les premiers servis comme d'habitude, les autres étant aux champs, occupés à la besogne et préoccupés par la nécessité de produire !

LE COMMENT DE LA DÉRIVE ET DE L'IMPASSE PAYSANNE !

Il faut rappeler que durant les années 50 fortement marquées par le doute et le désespoir, la vie était parmi les plus difficiles et les plus contraignantes. Elle ne méritait et ne pouvait d'être vécue, que grâce à la solidarité sans failles, ni calculs matérialistes des uns vis-à-vis des autres et à la tradition du «vivre-ensemble» cette marque de civilité mais aussi, de générosité largement ancrée dans la vie des médinas et des douars conviviaux de cette Algérie sous la terrible occupation coloniale. Ces berceaux d'une fraternité partagée par une communauté solidaire, soudée par et dans la misère ainsi que par le rejet des injustices du système colonial et féodal, autour de l'idéal et du destin commun forgeant dans la douleur et les sacrifices cette cohésion sociale voulue, désirée et acceptée par tous. Cette communauté reposait sur : l' aspiration aux valeurs de liberté, la volonté d'appartenance à une nation rêvant d'un avenir meilleur en rupture avec l'incertitude des lendemains, pour un peuple spolié de ses richesses, outragé dans son identité, et inféodé au joug colonial et féodal. N'était-ce pas là, vraisemblablement les prémices d'un «projet de société» qui valait pour la grosse majorité de nos concitoyennes et concitoyens, la peine d'y adhérer et d'y croire, même si pour certains de façon intuitive et pas toujours consciente ?

À propos de paysannerie algérienne, Michel Cornaton dans son livre : «Les camps de regroupement de la guerre d'Algérie» initialement publié en 1967 en France, puis édité en Algérie par les éditions Saihi dans le cadre du 50éme anniversaire de l'indépendance reprend l'étude qui lui a permis de soutenir une thèse de doctorat en sociologie. Cet appelé sous les drapeaux français ayant connu les camps de regroupement lors de son service militaire (1959-1960) a analysé leurs conditions déplorables de vie des paysans «regroupés et concentrés» dans ces centres et les conséquences sur une société rurale globale estimée à cette époque à plus de 3,5 millions d'âmes environ, éloignée «manu militari» de sa base productive et nourricière, son bétail et ses champs qu'elle ne pouvait plus fructifier et cultiver. Ces bras valides constituaient une main-d'œuvre bon marché pour les colons surtout, mais aussi pour les «gros exploitants féodaux». Il faut ajouter à cela, que près d'un million de ruraux ont fui leurs terroirs pour migrer vers les villes et venir ainsi grossir le contingent et bataillons des gens misérables et déracinés. De cette manière, ruinée et démunie de ses moyens essentiels de subsistance et de travail, cette population humiliée, touchée au plus profond de son honneur et de sa dignité pour assurer la nourriture à sa famille, était réduite à un état de non sujets soumis par l'administration coloniale au rationnement alimentaire bien insuffisant qu'elle lui fournissait. Cela a donné lieu : à l'apparition de graves formes de malnutrition et de taux élevés de décès, particulièrement chez les enfants.

Dans son ouvrage, Cornaton nous apprend également que ce n'est qu'en février 1959 que Michel Rocard alors élève à l'ENA et en stage en Algérie, a adressé un rapport accablant et sans fards sur les conditions de vie dans les camps de regroupement à un proche de Paul Delouvrier, alors délégué général en Algérie. Le 31 mars, ordre est donné aux autorités militaires de suspendre les regroupements, mais sa directive ne sera que «mollement» suivie, comme il fallait s'y attendre d'une administration civile et militaire dont l'objectif était de détruire les liens de la paysannerie avec son terroir et le mouvement de libération nationale, notamment l'ALN ! C'est que l'esprit de désobéissance était déjà dans l'air chez nombre d'officiers favorables à l'Algérie française et hostiles à toute indépendance. Ces officiers, particulièrement ceux revenus sans gloire et dans le déshonneur, de la triste campagne d'Indochine et de la débâcle française de Diên Biên Phu! N'est-ce pas messieurs les colonels Bigeard, Massu et tous vos semblables ?

L'existence des camps de regroupement et la «ghettoïsation» des populations rurales était nous dit-on, ignorée de la population métropolitaine jusqu'à ce 22 juillet 1959, où à la suite d'un reportage dans le «Figaro», les lecteurs se sont dits scandalisés. Faut-il croire que la métropole était à ce point coupée de sa colonie et des exactions qui s'y déroulaient ? Triste France coloniale, que celle du mensonge et de la félonie ! L'on nous apprend aussi, qu'il s'en est suivi une campagne d'opinion, où à la bonne heure, ces camps furent comparés à ceux de triste mémoire, les camps de concentration nazis durant la deuxième guerre mondiale !

LA MARCHE À TÂTONS SANS MARQUES NI REPÈRES !

Quel dommage que l'élan d'une Algérie indépendante solidaire, fraternelle et conviviale mené dans ses villes et campagnes qui savait marquer des points et gagner en prestige, soit brisé dès le début des années 80 ! Il faut croire que nous ne fûmes pas suffisamment attentifs et vigilants par rapport à la question clef du retour à la terre nourricière, et c'est là un premier échec consommé dans la marche de notre jeune nation vers le progrès et le développement.

Le second faux pas est celui qui a failli faire sombrer notre pays dans le «brasier intégriste» de la régression moyenâgeuse marquée par la perte de tous les repères mobilisateurs et fondateurs du progrès durant la décennie noire et destructrice des années 90.

Mais à s'y méprendre, par laxisme, par naïveté, par calculs bassement matériels, mais aussi par compromission, le danger plane toujours au-dessus de nos têtes, si notre vigilance et notre garde venaient à baisser !

Tout le capital d'engagement, de militantisme, de luttes, de bravoure et de souffrances accumulé par nos braves bien souvent anonymes pour cette Algérie généreuse, féconde et fertile, est sur le point de passer au su et au vu de tout le monde, en une «comptabilité simpliste» faite de pertes et profits chez ceux à la mémoire courte, et qui ne sont pas très regardants sur les questions d'honneur, de dignité, de «nif» de «roujla» et de «chahama», ces mots fortement expressifs et bien de chez nous !

Alors ! Oui ! Il faut à chaque occasion revisiter notre mémoire et interroger l'histoire, comme dans un voyage qui parcourt le temps de notre société pour essayer de rester accroché à nos racines et à nos valeurs d'hommes et de femmes libres ! C'est ce que nous suggéraient et disaient dans leurs discours, ceux qui ont présidés à la destinée de notre pays ! Mais à vrai dire, ce ne sont là que des vœux pieux de certains parmi eux qui ont fait simplement dans la projection verbale sans grande conviction, sinon par l'utilisation de la malice ou du calcul politicien? S'ils n'ont pas été dans l'action continue par devoir et par fidélité à leurs pairs , c'est parce qu'ils ont déjà fait leur «beurre» pour se mettre à l'abri en continuant à chercher des soutiens outre-mer et outre-Atlantique, pour continuer à tracer des plans sur des comètes. À croire que l'Algérie n'a jamais eu et n'aura aucun intérêt pour eux, si ce n'est celui d'en tirer le plus de profits matériels, politiques et moraux pour eux, leur progéniture et la progéniture de leur progéniture. En effet, l'Algérie est pour eux encore le pays offrant des richesses importantes à portée de leurs mains, eux et leurs amis oligarques choyés et favorisés, sans considération aucune pour la préservation des biens et du patrimoine de la collectivité nationale.

Ils s'accrochent alors au pouvoir à n'importe quel prix en faisant fi de l'écoute des voix discordantes et pourtant pertinentes du savoir, de la connaissance, et ne se prêtant guère au jeu de l'alternance politique.

Avec çà, jamais halte n'a été observée pour établir de vrais bilans d'étapes, de tirer les leçons des échecs successifs, de corriger si besoin la trajectoire des politiques et de la gouvernance et aller de l'avant en concertation avec les véritables acteurs économiques et sociaux ! Et pourtant ! Le commandant Slimane, feu Kaïd Ahmed «Allah yarhmou», ce grand militant de la cause nationale l'avait prédit en visionnaire, il y a de cela 45 ans en lançant devant un parterre d'étudiantes et d'étudiants dubitatifs, sa célèbre phrase : «L'Algérie était au bord du précipice, nous avons fait un grand pas en avant !» Alors où en sommes-nous maintenant ? Quant à ceux qui portent réellement l'Algérie dans leurs cœurs, leurs rêves et leurs espoirs est de la voir sortir de cette léthargie dans laquelle on l'a volontairement plongée par pur égoïsme, celui de la conquête et le maintien à l'indéfini du «koursi» enivrant sans retour de reconnaissance, ni de dette due à l'égard de qui que ce soit ! Quelle ingratitude ! Alors continuons à rêver, car il vaut mieux çà que de chercher à ressembler à ceux qui sont à l'origine de toutes les dérives de ce beau pays que des gens sans foi ni loi, ont dépecé, déprécié, laminé et qui à cause d'eux est devenu l'objet de railleries de la part de l'extérieur?

LES PREMIERS PAS À FAIRE DANS LA VOIE DU CHANGEMENT !

L'État se doit tout d'abord de réarmer et de réhabiliter le peu de forces qui restent de la période de construction d'une base productive nationale. Il s'agit notamment, de ses forces et outils d'accompagnement et de soutien à l'appareil de production national et de création des meilleures conditions techniques, scientifiques et matérielles pour redynamiser les secteurs agricole et de l'agro-industrie. Il doit offrir aux centaines de fermes pilotes que certains veulent brader sous couvert de partenariat public-privé et aux coopératives existantes et celles à créer, les instruments indispensables pour l'orientation et l'encadrement de la production nationale à travers un vaste et diversifié réseau de coopératives, comme c'est le cas dans plusieurs pays dans le Monde et tout près de nous, au Maroc et en Tunisie. Nos agriculteurs et notre agriculture en ont le plus besoin ! C'est ainsi, que les principes fondamentaux de la transparence, de la proximité de la participation, de la solidarité, de l'entraide et de la démocratie entre tous les acteurs du secteur agricole pourront être mis en application, développer et pérenniser à travers ce vaste et durable mouvement coopératif que doivent initier les véritables producteurs agricoles, soutenus et accompagnés par un véritable État régalien doté d'une stratégie de développement et d'un projet cohérent pour le progrès et la sortie réelle de la société rentière du tout pétrole ?

L'intervention de l'État doit donc laisser place à l'émergence de nouveaux espaces et instruments de proximité en mesure d'apporter une valeur ajoutée réelle au plan technique et économique, un soutien managérial et une assistance juridique à la profession représentative des véritables acteurs. Cette profession réhabilitée et légitimée doit apprendre à défendre ses intérêts dans les nouveaux espaces émergents sans la tutelle administrative et encore moins politique et idéologique qui lui sont imposées ! Ce n'est qu'à cette condition qu'il sera alors possible d'assurer le «dégel» des initiatives des producteurs, la libéralisation de leurs énergies productives et l'émergence d'un «lobby fort» et conscient des enjeux stratégiques du secteur agricole et alimentaire qui pourra porter le message de la différence et des spécificités des terroirs. C'est de cela dont a rêvé et appelé de tous ses vœux le Moudjahid Safi Boudissa, Vice-président de la Panafricaine syndicale ouvrière créée en juillet 1957 à Accra, créateur de la première coopérative « Aissat Idir» à Blida, père fondateur du mouvement coopératif en 1963 et président de l'ONG «Ibn el Awam». Malheureusement, cet homme intègre à l'âme paysanne, auquel j'ai rendu hommage en lui consacrant tout un article (cf. Quotidien d' Oran du 14 mars 2017) n'a jamais été ni écouté ni suivi malgré son dynamisme débordant. Son élan militant pour la cause des humbles a été brisé pour n'avoir pas pu faire aboutir la réalisation du fameux projet de mise en valeur et de développement de «Oued Touil» qui lui tenait à cœur parce que porteur de prospérité partagée à l'échelle de toute la partie centrale des Hauts-Plateaux sur 850.000 hectares. Quel dommage, que ce rendez-vous avec l'histoire du développement fût raté, entraînant un fort préjudice à l'Algérie profonde !

Il est aussi nécessaire de souligner, la nécessité impérieuse de mettre en œuvre un vaste plan pour recycler et utiliser plus d'une dizaine de milliers d'ingénieurs, de vétérinaires, de sociologues, d'économistes, d'écologues et techniciens, en réalité des diplômés de l'enseignement supérieur et de la formation professionnelle mais qui ne disposent pas encore de savoir faire pratique car marginalisés et/ou confinés à des tâches administratives sans commune mesure avec les besoins de la paysannerie et de l'agriculture algériennes. C'est là, l'atout maître pour une agriculture à la recherche des éléments de sa modernité, de son redéploiement et de son extension.

C'est à ces milliers de jeunes diplô més, une fois mis à niveau, que doit être offerte une opportunité dans la création de PME prestataires de travaux, de services, d'ingénierie et de conseil agricole. Convenablement formés, ces jeunes entrepreneurs sont à considérer comme les pionniers de l'agriculture moderne, axée principalement sur les exploitations de tailles moyenne et petite de l'agriculture familiale non rentière et non spéculative comme éléments dynamiques d'encadrement des nombreuses coopératives de services, de production et de transformation autour desquelles devront s'organiser les petites exploitations familiales pour ce qui concerne la mécanisation des travaux agricoles, le conditionnement et la commercialisation des fruits, légumes et viandes. La formation des formateurs au sein des pays du circum méditerranéen qui placent l'acquis de la technicité au cœur du défi de leurs agricultures, est aussi, une autre action fondamentale qu'il convient d'initier et de concrétiser au plus vite. C'est là une urgence urgentissime et une voie de réussite indispensable que tous les pays à agriculture prospère et durable ont empruntée sans aucun état d'âme, calcul politicien ou idéologique.

Quand on aura formé correctement les ouvriers agricoles et les chefs d'entreprises de l'agriculture de demain ! Quand on aura songé à faire de nos services agricoles déconcentrés de véritables centres de proximité pour le management du développement agricole, versés exclusivement à l'encadrement technique et scientifique des actions sur le terrain, et non uniquement aux tâches administratives ! Quand on aura redynamisé les chambres d'agriculture, à hauteur des exigences d'une agriculture performante ! Quand on aura favorisé l'émergence d'un système coopératif d'entraide et de solidarité par filière et branche, la réduction de notre dépendance alimentaire relèvera alors du domaine du possible et du réel et pas seulement du souhaitable et du vœu pieux délivré pour des raisons démagogiques et électoralistes.

C'est dire que l'heure est à la formation, au recyclage et à l'utilisation rationnelle de la ressource humaine et non, à l'importation inconsidérée des biens et services et surtout ceux sans limites de produits pas toujours nécessaires au développement ou à la consommation des Algériennes et Algériens ! Comme elle ne l'est pas aussi dans l'octroi sans limites, sans cohérence et dans l'opacité des soutiens de l'État. Ce soutien octroyé le plus souvent pour ne pas dire toujours, sans garanties de transparence et de traçabilité des actions envisagées et sans évaluation objective de son impact sur, la production, la croissance, la richesse et l'amélioration des conditions de vie des populations. Mais ne faut-il pas pour cela que l'esprit de gouvernance, de management et d'ingénierie des politiques agricoles et agraires soit totalement revu dans le sens d'une meilleure efficience, d'une meilleure concertation avec les principaux acteurs économiques et sociaux ? Cela requiert aussi, que l'intérêt national, cet idéal qui s'est malheureusement érodé et effiloché au fil du temps soit placé au-dessus de toute approche égoïste et foncièrement individualiste, encouragé et favorisé par un État qui a perdu ses repères et ses obligations régaliens?

* Professeur