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Marché parallèle de la devise: L'euro à plus de 180 dinars

par Yazid Alilat

Le taux de change au marché parallèle des principales devises (euro, dollar) reste toujours haut, sur le sillage des cours officiels, fouettés par la perte de la valeur du dinar, en baisse en moyenne de 10 à 15% en ce mois de juin. Une période en fait marquée par une demande accrue sur la monnaie européenne et le billet vert avec les départs pour la Omra, les achats de prêts à porter et habillements pour l'Aïd el-Fitr de Turquie notamment, et les préparatifs pour les vacances d'été. La faiblesse du dinar n'expliquant pas la forte augmentation des cours des principales devises sur le marché parallèle qui a ses propres règlements et fondamentaux, les marges atteintes ces derniers jours sur le marché parallèle sont assez hautes, allant jusqu'à 183-184 dinars pour un euro. Si la forte demande sur la devise explique la progression vers des niveaux jamais atteints depuis janvier 2016 lorsque l'euro avait atteint 200 dinars, il n'en reste pas moins qu'en l'absence d'un marché officiel, ce sont les cambistes et la loi du marché noir qui régentent ce marché des devises qui a pignon sur rue en Algérie. Les cours sont donc orientés vers la hausse, avec des «pics» de 183 dinars pour un euro, et le dollar va jusqu'à 165-166 dinars, même si la moyenne varie pour la devise européenne entre 180 et 182,5 dinars.

Au Square Port-Saïd à Alger, les marges restent ténues et en général la tendance est à plus de 180 euros pour un dinar. En moyenne générale on peut acheter un euro à environ 183 à 184 dinars au marché Clauzel, en contrebas de la place Audin. Le fait est que, à Alger, il y a eu l'installation, depuis les années 2000, et le retour à la sécurité, de beaucoup de cambistes, autant dans les ruelles adjacentes et les terrasses de cafés du Square Port-Saïd, que dans des boutiques de prêt-à-porter au marché Clauzel, ou dans les magasins de la rue Ahmed Bouzrina (ex-rue de la Lyre) et au marché de la rue de Chartres, dans la basse casbah. Pour dire que le marché noir de la devise est pratiqué par une kyrielle d'intermédiaires et pas seulement les revendeurs du Square Port-Saïd.

A Blida, le marché central est également un lieu de négoce de la devise, et les cours sont sensiblement les mêmes, sinon plus «chauds» que ceux pratiqués à Alger, car souvent les revendeurs de Blida s'approvisionnent auprès de leurs collèges algérois. Mais, en gros, résume un habitué du marché parallèle, «les cours sont sensiblement, à quelques dinars près, les mêmes sur tout le territoire national, que ce soit au Cours de la révolution à Annaba, à La Brèche à Constantine, à Chlef, importante place du change parallèle, ou à Oran, Tlemcen et Alger». Il n'en demeure pas moins que les cours des devises au marché noir restent stables à plus de 180 dinars pour un euro à Blida, autre place forte du marché parallèle de la devise où se négocient d'importants volumes ensuite utilisés pour l'achat d'habillements et de prêts-à-porter de Turquie, qui inondent les marchés de vêtements de la ville des Roses et sa région jusqu'aux hauts plateaux de Djelfa et la côte cherchelloise. Il y a aussi le facteur de hausse déclenché par les départs en vacances de milliers d'Algériens, qui agissent comme un starter par le départ quasi simultané d'une demande importante en volume et dans un temps très court. Cette hausse prévue en été n'est pas compensée par l'arrivée sur le marché des changes parallèle des devises des «émigrés», qui ont depuis longtemps compris qu'ils peuvent se payer des vacances «au Bled» avec moins de 1.000 euros, au taux de change de plus de 16 dinars pour un euro. Sur le marché bancaire officiel, celui de la Banque d'Algérie, la cote était jeudi 23 juin avec valeur jusqu'au 27 juin, de 124,38 dinars à l'achat pour un euro et 124,42 dinars à la vente, de 109,77 dinars à l'achat et 109,78 dinars à la vente pour un dollar US, de 162,16 dinars à l'achat et 162,26 dinars à la vente pour la livre sterling (Pound). Le rial saoudien, très demandé à la mi-ramadhan pour le petit pèlerinage, vaut 29,26 dinars à l'achat et 29,27 dinars à la vente, soit la plus faible des marges. Ces niveaux de change ne présagent par ailleurs rien de bon pour le dinar algérien et pour les Algériens désireux d'acheter de la devise pour moult usages, car le gouvernement devrait resserrer davantage ses finances pour amortir le poids du déficit budgétaire, prévu à plus de 30 milliards de dollars à fin juin 2016, et arrondir les déficits de la balance des paiements. Il n'en demeure pas moins que pour l'Algérien lambda, ces considérations financières n'entrent pas en ligne de compte de ses préoccupations qui, pour le moment, sont focalisées sur l'évolution des devises sur le marché parallèle avec l'arrivée de la saison estivale et les grandes vacances d'été.

Car en face, il y a l'absence d'un marché des changes officiel où les Algériens, non pas les expatriés, pourront au moins une fois par an avoir une allocation touristique qui leur redonne leur dignité, sans aller au marché noir, qui n'existe actuellement, dans la région au moins, qu'en Algérie. Le Maroc et la Tunisie offrent à leurs ressortissants une allocation touristique conséquente, allant jusqu'à plus de 2.000 euros. La Banque d'Algérie, sous l'ère Laksaci avait annoncé la mise en place de bureaux de change officiels pour les expatriés, mais sur les 46 agréés, six seulement ont été créés.