Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

CHLEF: Deux ans de prison pour avortement clandestin

par Bencherki Otsmane

Deux ans de prison ferme, tel était le verdict prononcé par le tribunal de Chlef à l'encontre d'une infirmière retraitée, pour avortement illégal dans son domicile sis à Chlef sur une jeune femme enceinte.

Quant à cette dernière, elle a été condamnée à six mois de prison ferme.

Les faits remontent au mois écoulé lorsque des informations sont parvenues à la police de la sûreté de daïra d'Ouled-Farès, à 13 km au nord du chef-lieu de wilaya selon lesquelles un domicile propriété d'une infirmière servait de lieu d'avortements clandestins pour des femmes enceintes en détresse. Aussitôt, une surveillance discrète du lieu incriminé fut mise sur pied. Selon une source policière, « il n'a pas fallu attendre longtemps pour qu'une victime, une femme enceinte, pénètre dans l'appartement de l'infirmière ». Quelques instants après et munis d'un ordre de perquisition délivré par le parquet, les policiers font irruption dans ledit logement pour constater de facto le délit. Divers médicaments et autres produits dangereux et toxiques ont été retrouvés sur les lieux. S'ensuit alors l'arrestation de la présumée coupable ainsi que « sa cliente » en phase de préparation d'avortement. Lors de l'audience, l'avocat de la plaignante axera sa plaidoirie sur le désir de sa mandante de venir en aide à cette femme en détresse pour se débarrasser du fœtus, fruit d'une relation extraconjugale et auquel le père présume du bébé n'en voulait pas. Il faut souligner que l'avortement en Algérie est strictement interdit, notamment à travers l'article 304 du code pénal qui stipule : « quiconque par aliments, breuvages, médicaments, manœuvres, violence ou par tout autre moyen, a provoqué ou tenté de provoquer l'avortement d'une femme enceinte ou supposée enceinte qu'elle y ait consenti ou non est puni d'un emprisonnement d'un an à cinq ans et d'une amende de 500 à 10.000 DA. Si la mort en résulte, la peine est la réclusion de dix à vingt ans ».

L'avortement clandestin continue de faire des ravages. Une bonne partie des femmes qui ont subi l'interruption volontaire de grossesse n'en sortent pas indemnes. Les conséquences sanitaires sont hallucinantes. «Des cas de perforation utérine, de stérilité, d'infection, d'anémie aiguë ou de décès, suite à un avortement, sont fréquents», explique la responsable d'une association des droits des femmes qui a souhaité garder l'anonymat pour, dit-elle, protéger son association. «Je ne veux pas que le grand public sache qu'on milite pour que la femme puisse disposer de son corps librement et par conséquent a le droit de mettre un terme à sa grossesse avant que le fœtus ne prenne la forme humaine, c'est-à-dire avant les quatre premières semaines de la grossesse. Cette même interlocutrice nous a fait part également des conséquences de la législation actuelle en vigueur où bon nombre de jeunes mamans, à défaut d'un avortement en milieu hospitalier, mettent au monde leurs bébés conçus illégitimement, pour les abandonner ensuite dans des terrains vagues où quelquefois il sert de repas aux animaux ». Selon des chiffres non officiels, on estime que quelque 80.000 avortements sont enregistrés chaque année dans notre pays. Les avortements se font bien entendu dans le silence et de façon clandestine.