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Un glissement de terrain à l'origine d'un effondrement : Une famille de quatre personnes décimée à Oran

par Houari Barti



Tout Oran est en deuil. Un jeune couple et leurs deux enfants ont trouvé la mort, hier, dans des circonstances tragiques dans le quartier de Haï El-Mactaa (ex-Carteaux).

Agés respectivement de 44 et 39 ans, Hasni et Sara, deux jeunes parents et leurs deux enfants Feriel (6 ans) et Mohamed (4 ans) ont été ensevelis vifs sous des tonnes de pierres et de terre après le décollement d'un gros bloc du ravin qui surplombe leur habitation précaire.

Le drame, qui s'est produit dans la nuit du samedi au dimanche aux environs de 3h 30, à un moment où presque tout le monde dormait, n'a laissé aucune chance aux victimes pour réagir. L'arrivée des éléments de la Protection civile n'a finalement pas servi à grand-chose, mis à part de dégager les corps des victimes des décombres et les transférer vers le CHU d'Oran pour être déposés par la suite à la morgue. C'est uniquement à la vue des dégâts occasionnés par le glissement de terrain, qu'on peut se rendre compte de la véritable violence du sinistre. La pièce où dormaient les quatre victimes était complètement éventrée. Avec une dalle en béton réduite en cendres sous le poids des blocs tombés du ravin. Seuls un oreiller de couleur rose et un bout d'étoffe qui transparaissait des décombres pouvaient indiquer qu'il s'agissait effectivement d'un lieu d'habitation. Les quelque quinze familles qui habitent ce vieux «haouch» étaient encore sous le choc, hier matin. Des regards pleins de tristesse et de colère. Femmes et enfants étaient regroupés au niveau du patio, alors que les hommes étaient rassemblés à l'extérieur. Youcef, un jeune voisin, était réveillé au moment du drame. Il venait à peine de rentrer chez lui, raconte-t-il, quand il a entendu un bruit assourdissant. «J'ai d'abord pensé qu'il s'agissait d'un tremblement de terre. Je suis sorti en courant de chez moi et j'ai vu un gros nuage de poussière sur la maison de Hasni. C'est seulement à ce moment que j'ai compris que c'est le ravin qui a fini par céder», témoigne-t-il. Et un autre voisin d'expliquer: «On a essayé de les sortir des décombres en attendant l'arrivée des pompiers. Mais il y avait trop de pierres et de terre. Hasni, le père, était encore vivant. On l'entendait appeler à l'aide, mais on n'est pas arrivés à le secourir. Quand les pompiers ont finalement réussi à l'extirper des décombres, il était vraisemblablement mort, enlaçant ses deux enfants. C'est une image que je n'oublierai jamais».

La petite famille de Hasni était loin de se douter de cette fin tragique, lorsqu'elle avait dû élire domicile, il y a six mois, dans une vieille bâtisse sise au n° 37, rue du Ravin Blanc, dans le quartier de Carteaux où elle avait loué pour 10.000 dinars par mois une petite pièce de 3 mètres sur 4.

Beaucoup de familles oranaises vivent actuellement dans des conditions aussi précaires dans l'attente d'un relogement qui tarde toujours à venir. Le site de la rue du Ravin Blanc en est un exemple parfait. C'est un site très vieux qui se trouve au milieu d'un environnement en pleine mutation. Non loin du ravin, une promotion immobilière privée de plus d'une dizaine d'étages est née en quelques mois surplombant la route du port. De l'autre côté de la route, les autorités locales ont prévu un ambitieux projet de création d'une cascade d'eau et créer ainsi une nouvelle attraction pour les visiteurs. Mais le drame qui a frappé le quartier de Carteaux nous renvoit vers une triste réalité. Il rouvre surtout un des dossiers les plus chauds et les plus douloureux de la ville d'Oran, celui du vieux bâti et de l'habitat précaire.

Conscientes du défi, de la gravité du sinistre, et surtout des conséquences qu'il pourrait engendrer sur l'ordre public notamment, les autorités locales ont mobilisé hier des moyens importants pour sécuriser les familles de la rue du Ravin Blanc. Des ambulances et plusieurs camions de la commune étaient stationnés dans le quartier. Il y avait même, à quelques encablures, un véhicule de transport des éléments antiémeutes. Juste au cas où. Le wali d'Oran était parmi les premières personnalités à venir s'enquérir de la situation. Une commission de la commune d'Oran présidée par le chef de daïra se chargeait de recenser les noms des familles qui nécessitent un relogement en urgence.

«Toutes les familles demeurant dans le périmètre du sinistre seront évacuées aujourd'hui même», a précisé à la presse M. Abdelghani Zaalane, expliquant que «cette mesure a pour but de mettre hors de danger les occupants des habitations situées à proximité du mur qui s'est partiellement effondré». «Une opération de recensement a été aussitôt effectuée par les services du Laboratoire de Contrôle des techniques de construction (CTC) pour évaluer la situation», a fait savoir le chef de l'exécutif.