Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Le RND tient aujourd'hui son Conseil national : Un intérimaire en attendant le congrès

par Ghania Oukazi

«On a engagé des négociations, on n'est pas seuls, il y a réellement les responsables qui ont les clés de la maison avec lesquels on doit absolument discuter», nous a déclaré hier, en substance, Yahia Guidoum, le coordonnateur du mouvement du changement au sein du Rassemblement national démocratique.

Le ministre des Moudjahidine est pressenti aujourd'hui pour ouvrir la session du Conseil national (CN) du RND et lancer un appel à consensus au profit d'Abdelkader Bensalah qui gardera le parti jusqu'au prochain congrès. Mohamed Cherif Abbas a été chargé de cette mission parce qu'il en est le doyen de ses membres. Décidée dès le départ d'Ahmed Ouyahia de son poste de secrétaire général du parti, la session ordinaire du CN, qui se teint aujourd'hui au siège de la Munatec à Zéralda pour «deux ou trois heures à peine», est juste une formalité pour en faire assurer l'intérim au poste du secrétaire général par Bensalah et installer le bureau national provisoire. Ceci, en attendant la tenue d'un congrès prévu initialement en mai mais qu'on dit d'ores et déjà reporté probablement à juin. «On aimerait au moins avoir le temps pour faire évoluer les rapports de force à l'intérieur du parti avant de passer à l'élection du secrétaire général et des membres des instances du parti», nous dit un grand animateur du mouvement du changement au sein du RND. Notre interlocuteur ne semble pas trop convaincu de ce qu'il dit puisqu'il avoue avoir été pris de cours par l qui a été donnée aux événements de la période post-Ouyahia.

Tous nos contacts, qu'ils fassent partie du premier groupe des redresseurs, c'est-à-dire ceux qui ont été les premiers à lancer la fronde contre Ouyahia, ou du deuxième groupe, à savoir ceux qui l'ont prise en main une fois installée, c'est-à-dire le groupe de Yahia Guidoum, ont refusé d'être cités nommément parce qu'ils estiment qu'ils se retrouvent «dans le flou et ne comprennent pas beaucoup ce qui se passe». Ils regrettent surtout que «tout se décide loin d'eux, sans leur consentement et sans même qu'ils soient au courant. Le «retour» de Bensalah ne les agrée pas trop parce qu'ils estiment alors qu'«on n'a rien fait si on revient aux anciens». Des voix laissent entendre pourtant que «Bensalah a été choisi pour ne pas gêner le président de la République, s'il veut un 4e mandat, celui qui prendra le RND après lui travaillera pour».

«TOUT ÇA POUR ÇA ?!?»

Si l'on s'emploie à trouver des circonstances atténuantes au choix de Bensalah, la composante du bureau national provisoire, devant être installé aujourd'hui, inquiète et incommode beaucoup. Le bureau en question sera composé de quatre membres pro-Ouyahia, en l'occurrence Mohamed-Tahar Bouzghoub, Abdelkrim Harchaoui, Abdelkader Malki et Ali Resgui, et quatre redresseurs : Yahia Guidoum, Bakhti Belaïb, Tayeb Zitouni et Hami Laroussi. «On est revenu à la case départ, le maintien de Bouzghoub, de Malki et même de Harchaoui, c'est comme si on a gardé Ouyahia», nous disait, hier, un fervent opposant au SG partant. Ce qui le rend «fou» et le pousse à «méditer» profondément, c'est que, dit-il, «on ne nous a même pas consultés, ni nous les redresseurs, encore moins les membres du Conseil national». Dès le retrait d'Ouyahia, les redresseurs pensaient qu'ils allaient réunir le CN pour nommer un SG par intérim et convenir d'une autre réunion pour élire les membres du bureau provisoire. «Mais les choses sont allées très vite et ont vite changé», nous disent-ils sans savoir pourquoi. La réunion d'«annonce» s'était tenue mardi après-midi et a regroupé la vingtaine des membres de la coordination des redresseurs. Pr. Guidoum aurait répliqué à ceux qui l'avaient interpellé sur ce brusque changement de donne que «tout est fait pour réunifier les rangs du parti».

Le fervent opposant d'Ouyahia nous disait, hier, que «je pensais qu'on travaillait pour renouveler la génération RND !» Mais, interroge-t-il, «tout ça pour ça ?!?», pour s'exclamer : «On peut agir autrement avec moins de compromission ! Sans prendre les personnes emblématiques d'un camp ou d'un autre !» Notre interlocuteur, qui est un ancien haut responsable, bien déçu, ponctuait ses propos par un rire nerveux. «Ne reste plus que la dérision pour dérider l'atmosphère», a-t-il en fin de compte conclu. Soutenu par ses amis, il convient quand même de penser sans trop de conviction que «c'est une phase transitoire, le combat continue».

«NOUS AVONS ENGAGE DES NEGOCIATIONS, ON N'EST PAS SEULS»

Contacté hier par nos soins, Pr. Yahia Guidoum n'a pas hésité un moment à répondre à nos questions même si, au son de sa voix, il semblait bien fatigué. A la question relative à «des changements jugés brusques et inattendus» par les redresseurs, l'ancien ministre de la Santé a répondu qu'«il y a des impondérables». Mais ajoute que «dans ce genre de combat, il n'y a ni vainqueur ni vaincu, ce n'est pas de créer une défaite, ce n'est pas un processus de règlement de compte, l'important, c'est l'unité des rangs du parti, c'est de remettre sur les rails un train qui a déraillé». Pr. Guidoum présente alors Abdelkader Bensalah comme étant «une personne dont le caractère est emprunt positivement d'une neutralité vis-à-vis des deux camps, il a été choisi comme intérimaire sur la base d'un consensus qui lui a été accordé avec, en point de mire, la volonté d'unir les rangs du parti et de n'en exclure aucun». Il tient à souligner, en prime, que «c'est une période dont l'élément fondamental est le caractère transitoire». Après le Conseil national, il prévoit l'installation plus tard de la commission préparatoire du congrès et de l'ensemble des sous-commissions y afférentes.

Choisi en décembre dernier pour coordonner le mouvement pour le changement au sein du RND, Pr. Guidoum avoue en fait, à propos de ce qu'il n'ose pas appeler «feuille de route», que «nous avons engagé des négociations, on n'est pas seuls, il y a réellement les responsables qui ont les clés de la maison avec lesquels on doit absolument discuter». Pour l'histoire, l'on rappelle que l'annonce de la création du RND a été faite en 1997 par Mohamed Betchine, alors conseiller du président Liamine Zeroual. A l'exception de deux ou trois d'entre eux, l'ensemble des ministres du gouvernement de l'époque y ont été inscrits comme membres fondateurs. Pr. Guidoum préfère surtout se convaincre de ce qui se passe aujourd'hui que «c'est une période transitoire» parce que, nous dit-il, «moi, je milite pour un RND qui s'ouvre aux jeunes femmes et hommes, aux chefs d'entreprises, à la société civile dans sa composante qui œuvre pour la démocratie et un Etat de droit». Le ministre des Moudjahidine déclarera, aujourd'hui, la session du CN du parti ouverte jusqu'au congrès prochain. «Si rien n'interviendra d'ici là», estime Pr. Guidoum.