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Le message de Messali Hadj aux Palestiniens

par Belhaouari Benkhedda *

La situation en Palestine a quelques points de similitude avec l'Algérie de la période de l'entre-deux-guerres. En 1936, Léon Blum, président du Conseil des ministres et Maurice Viollette, ancien gouverneur d'Algérie ont proposé le projet de loi Blum-Viollette qui visait à accorder la nationalité française et le droit de vote à quelque 25 000 Algériens.

Le projet devait être étendu progressivement à un plus grand nombre de personnes. Certaines formations politiques qui dominaient la société algérienne ont bien accueilli les réformes promises. Elles les trouvaient satisfaisantes en attendant plus de droits. Mais Messali Hadj estimait que le projet Blum-Viollette n'était rien d'autre qu'un instrument du colonialisme qui visait la division du peuple algérien. Cette année-là, le père du nationalisme algérien a déclaré devant une grande foule au stade d'Alger : «Cette terre est à nous, nous ne la vendrons à personne» (Voir le livre de Benjamin Strora «Histoire de l'Algérie coloniale 1830-1954»). Messali Hadj a clairement dit : «La France ne cédera qu'à la force et ne donnera que ce qu'en lui arrachera». Il a ainsi poussé les Algériens vers une prise de conscience nationaliste et indépendantiste. Après le massacre de 1945, un rapport sur l'état d'esprit de la population algérien a été écrit par le général Tubert. Nous ne citons ici qu'une petite partie.

Un instituteur de la classe de la région de Bougie donne à ses élèves un modèle d'écriture : «Je suis français, la France est ma patrie». Les enfants musulmans écrivent : «Je suis algérien, l'Algérie est ma patrie». Un autre instituteur fait un cours sur l'Empire Romain. Quand il parle des esclaves, une voix s'élève et s'écrie : «Comme nous».

La logique de Messali Hadj a triomphé après un long et persistant labeur. En fait, c'est au cours des années 1920 que Messali Hadj s'est prononcé pour l'indépendance totale de l'Algérie. En 1927, au congrès de Bruxelles organisé par la Ligue contre l'oppression coloniale, il a solennellement déclaré ceci : «Le peuple algérien, qui est sous la domination française depuis un siècle, n'a plus rien à attendre de la bonne volonté de l'impérialisme français pour améliore son sors».

A présent, la Palestine est à l'agonie. Il ne reste de cette terre que deux petites portions, la bande de Ghaza (360 km²) contrôlée par le Hamas, et la Cisjordanie (5800 km²) mise sous l'autorité de Mahmoud Abbas qui s'est engagé à empêcher une troisième intifada. La dernière attaque menée par Israël contre Ghaza a révélé bien des choses. Cette attaque a eu lieu alors que les dirigeants politiques du Hamas s'apprêtaient à se lancer dans une aventure de négociation avec les Etats-Unis. Après avoir tourné le dos à la Syrie et à l'Iran, le Hamas, soutenu par les monarchies pétrolières, espérait devenir l'interlocuteur de l'administration étasunienne sur la question du devenir palestinien. L'agression israélienne a nettement montré aux Palestiniens que seule la résistance peut protéger les enfants de Ghaza. Il s'avère que les pétrodollars et les négociations ne serviront pas à grand-chose dans le conflit Israélo-palestinien. Mais des cadres du mouvement de Hamas qui vivent à Doha continuent de s'aligner sur les positions anti-syriennes des monarchies du Golf, pourtant la Syrie a longtemps soutenu le Hamas. D'autres qui sont au Caire mettent sur le même pied d'égalité le Qatar et l'Iran ! Les Palestiniens doivent prendre l'exemple sur la lutte des Algériens contre le colonialisme. Tout d'abord, ils ne doivent rien céder aux agresseurs. Ils doivent non seulement résister aux agressions israéliennes, mais aussi s'immuniser contre l'argent sale.

Aujourd'hui, l'école de Mesali Hadj porte encore ses fruits. Les Algériens ont très vite remis à sa place Recep Tayyip Erdogan lorsqu'il a essayé de transformer la révolution algérienne en un fond de commerce dans ses négociations avec la France. Les Algériens ne sont nullement dupes au nationalisme théâtral.

Heureusement, la résistance palestinienne est composée d'une multitude de formations politiques et n'est pas dominée par un seul parti. Finalement, c'est peut-être la raison pour laquelle Israël a fait marche arrière.

Quoi qu'il en soit, la Palestine restera debout grâce à ses enfants. Comme le dit si bien le poète militant palestinien, Tamim al-Barghouti :

«A Jérusalem, malgré les crises qui s'enchainent, on sent pourtant un vent innocent, une ambiance bon-enfant.

Alors on voit les colombes volant, proclamant un Etat dans les airs, entre deux balles».

* Universitaire