Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Les bonnes affaires des banques françaises en Algérie

par Yazid Taleb

Fortement chahutées depuis l'été dernier sur les marchés boursiers en raison de leur exposition à la dette grecque, les banques françaises, installées en Algérie depuis une dizaine d'années, y enregistrent une forte progression de leur activité et de leur rentabilité.

Dans le sillage du relèvement du seuil du capital minimum, l'accroissement substantiel de leurs ressources a placé les banques françaises activant sur le marché algérien, dans une situation plus confortable par rapport aux règles prudentielles. C'est ce qui leur permet tout d'abord d'afficher et de réaliser des objectifs ambitieux en matière de développement de leurs réseaux. BNP Paribas et Société Générale sont les plus en vue dans ce domaine avec pour chacune d'entre elles plus de 60 agences opérationnelles et des objectifs d'une dizaine d'ouvertures par an. Natixis est un peu en retrait avec une vingtaine d'agences en activité et un objectif de 30 agences en 2013. A l'image de l'ensemble des banques privées, les opérateurs français se plaignent des freins imposés au développement de leurs réseaux. Le PDG de la Société Générale Gerald Lacaze le soulignait encore récemment : «Nous avons actuellement une dizaine d'agences qui attendent leur agrément par la Banque d'Algérie, les délais de délivrance de ces autorisations restent pour nous une source de frustration et un frein au développement rapide de notre activité.»

UNE RENTABILITE ELEVEE

Une situation qui n'empêche pas les banques françaises de développer rapidement leur activité et de faire des bénéfices. Société Générale Algérie qui revendique la place de 1ère banque privée avec plus de 275 000 clients annonce un bénéfice de 3,4 milliards de dinars en 2010, en forte progression par rapport aux 2,5 milliards de dinars enregistrés en 2009 et 1,5 milliard en 2008. Le PDG de la Société Générale ne perd aucune occasion de préciser que les fonds propres de sa banque dépassent largement le montant du minimum légal et sont actuellement proches de 20 milliards de dinars ajoutant que la totalité des bénéfices réalisés par sa banque sont réinvestis en Algérie. Dans son rapport annuel pour 2010 publié l'été dernier le PDG de BNP Paribas El Djazair. Laurent Dupuch, annonce le franchissement du cap des 100 000 clients actifs. La progression de l'activité de la filiale algérienne du groupe français se poursuit à un rythme soutenu illustré par des dépôts en hausse globalement de 19% pour atteindre 121 milliards de dinars, une collecte de l'épargne qui augmente de plus de 38% en 2010 et des engagements en progression également de plus de 22%. La rentabilité est au rendez-vous avec un bénéfice net de 4 milliards de dinars en hausse de 16%. Du côté de Natixis, c'est le directeur du réseau Tayeb Bouacha qui affirmait dernièrement que « la filiale algérienne est l'une des expériences les plus réussies dans la zone Moyen-Orient-Afrique». Il précise que l'exercice 2010 «a répondu parfaitement aux objectifs que nous nous étions fixés en termes de progression d'activité et de rentabilité». En chiffres cela s'est traduit à la fin de l'année 2010 par un encours global de l'ordre de 80 milliards de dinars répartis en crédits directs avoisinant les 40 milliards de dinars et un total de crédits par signature hors bilan dépassant les 40 milliards de dinars, ce qui représente une évolution respective de l'ordre de +22% et +15% par rapport à l'exercice 2009. Comme pour l'ensemble des banques privée présentes sur le marché algérien, «les résultats enregistrés en matière d'opérations de commerce extérieur sont très positifs, notamment les Credoc et acceptation qui ont progressé de 15%».

DE NOUVEAUX CRENEAUX PORTEURS

L'interdiction pure et simple du crédit à la consommation et du crédit automobile depuis le début du mois de septembre 2009 a été surtout sensible pour les filiales algériennes de BNP Paribas ou de la Société Générale. Le personnel dédié à ces opérations a été réaffecté vers le crédit aux professions libérales et aux artisans et commerçants ainsi qu'aux petites PME, nouveaux créneaux porteurs identifiés dans le but de rentabiliser un réseau d'agences qui va continuer de croitre à un rythme soutenu. L'effort des banques françaises dans ce domaine et leur succès relatif repose sur un meilleur encadrement et une meilleure prise en charge de la clientèle. «Nous avons déjà développé une clientèle importante composée de plus de 5000 PME et de prés de 15000 artisans, commerçants ou membres de professions libérales. L'extension de notre activité dans ce domaine est une de nos priorités. Elle doit néanmoins s'inscrire dans un cadre de contrôle des risques de crédit.» souligne Gerald Lacaze.

LA CLIENTELE DES GRANDES ENTREPRISES

Les banques françaises se disputent également la clientèle des principaux groupes privés nationaux ou étrangers et chacune d'entre elles tentent d' «accompagner» le développement sur le marché algérien des clients des sociétés-mères. Pour Natixis comme pour ses deux concurrentes « le marché du Corporate demeure l'axe de développement prioritaire de la banque». L'accroissement du capital des banques françaises les incite également à plaider en faveur du recul de la «dichotomie entre banques publiques et privées». Une évolution souhaitée par beaucoup de banquiers privés qui appellent de leurs vœux le financement commun avec des banques publiques des programmes d'investissement de grandes entreprises publiques ou privées voire de certains projets d'infrastructures. Dans ce domaine le PDG de la Société Générale évoque «la possibilité de mobiliser au profit des filiales des banques privées les capacités d'expertise situées au niveau des Groupes et des sociétés-mères. Il s'agit d'une démarche courante qui pourrait être précieuse et faire progresser les pratiques et les capacités de la place bancaire algérienne en matière d'évaluation des programmes d'investissement».