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Quel avenir pour l'UPM, un an après son lancement ?

par Ait Benali Boubekeur

Le lancement de l'Union pour la Méditerranée (UPM), le 13 juillet 2008, ne s'est pas avéré à la hauteur des attentes placées en elle. Bien que l'objectif primordial, affiché notamment par N. Sarkozy, ait été de réaliser un rapprochement entre le Nord et le Sud, il n'en reste pas moins que le conflit au Proche-Orient a faussé le calcul de ses initiateurs. Pour la majeure partie des pays de l'union, la paix en Palestine doit demeurer la préoccupation primordiale. Par ailleurs, la présence d'un Etat, comme Israël, n'ayant de surcroît aucun scrupule, représente indubitablement un frein à l'UPM. Et l'agression perpétuelle du peuple palestinien n'est pas de nature à apaiser les relations entre les membres de l'union. Par conséquent, quelques mois après sa création, le constat, que l'on pourrait faire, sur le fonctionnement de l'union, est incontestablement celui de survie artificielle. D'ailleurs, exceptés les quelques contacts, réunion à Marseille des ministres des Affaires étrangères et la conférence sur l'eau en Jordanie, l'UPM ne bénéficie guère de la crédibilité qu'elle avait au départ, bien que son démarrage ait déjà suscité des réticences de la part de certains membres. A la situation financière mondiale défavorable, le problème au Proche-Orient est l'un des freins à l'épanouissement de l'union. Car, depuis l'avènement de l'UPM, Israël n'a, à aucun moment, songé à desserrer l'étau sur les territoires palestiniens occupés. Toutes les initiatives de paix étaient vaines tant l'Etat hébreu était et est hermétique à la négociation et, par ricochet, à la paix. Du coup, la problématique se posant aux membres de l'union est la suivante : peut-on assister à l'annihilation d'un peuple tout en continuant à participer à des rencontres aux côtés de l'agresseur ? En tout cas, si des tergiversations sont aperçues chez les dirigeants, les peuples, quant à eux, ont choisi indéfectiblement le soutien au peuple palestinien.          D'où, la nécessité de parvenir à une solution de paix dans les délais respectables.



L'impératif de paix en Palestine doit précéder les autres projets

A défaut d'être à la hauteur des difficultés politiques se posant à l'UPM, le ministre des Affaires étrangères égyptiennes a suggéré, le 20 mai 2009, de bâtir l'union des projets. Ainsi, huit mois après le génocide perpétré par Israël à Ghaza, certains dirigeants arabes sont-ils tout bonnement amnésiques ? La réponse ne souffre d'aucune équivoque. Cependant, selon le même ministre, il s'agit de renforcer le tissu des relations entre les pays riverains de la Méditerranée, sans toutefois poser la moindre condition sur le devenir de la Palestine meurtrie. Bien que le dirigeant politique s'en tienne parfois à la realpolitik, heureusement que les masses populaires sont là pour poser le problème en termes clairs et sans hypocrisie. D'ailleurs, dès le 27 décembre, premier jour des raids israéliens, la rue a su imposer sa vision à sa diplomatie. Dans le cas des dirigeants arabes, ces derniers ont choisi de s'aligner sur la position de leurs manifestants. En Europe, la rue a exprimé sa propension à la résolution du conflit en désignant l'agresseur, mais les exécutifs n'ont pas suivi les desiderata de la rue. Cette situation a conduit au blocage de l'UPM tant la perception de l'agression, entre le Nord et le Sud, était différente. Le parti pris des exécutifs européens a été manifesté ouvertement et sans ambages. En visite en Israël, en juin 2008, Nicolas Sarkozy s'était montré intransigeant sur la sécurité de l'Etat hébreu. Si quelqu'un voulait nuire à Israël, avait-il dit, il trouverait la France sur sa route.

 Toutefois, au-delà de la coopération entre les deux rives, le but sous-jacent de certains pays européens aurait été de faire accepter, aux pays de la rive sud de la Méditerranée, la reconnaissance tacite d'Israël sans que celui-ci soit amené à faire la moindre concession sur ses visions expansionnistes. La caution de cette démarche, s'il y en avait une, serait de permettre à Israël de mener sa politique, bâtie uniquement sur la répression, sans qu'il soit isolé diplomatiquement. Car, il faut le noter, l'Etat hébreu n'est pas prêt à faire des concessions, au moins sur trois points, citées par Mourad Benachenhou dans l'édition du Quotidien d'Oran du 5 mars 2009. Il les a résumées comme suit :

- Refus de reconnaître l'existence du peuple palestinien,

- Refus de renoncer à sa politique d'annihilation physique du peuple palestinien,

- Refus de toute paix négociée, quel qu'en soit le contenu ou la forme, avec les pays qui, jusqu'à présent, se sont abstenus de reconnaître un Etat sans Constitution, sans nationalité ni frontières définies.

 Cependant, la déclaration du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, après sa prise de fonction ne tendait pas à résoudre la crise devenant de plus en plus alambiquée. Récemment porté à la tête de l'Etat hébreu, il a d'emblée affiché sa haine incommensurable à l'égard du peuple palestinien. Il a préconisé, pour résoudre le problème palestinien, une solution à la sud-africaine au temps de l'apartheid. Cette solution consiste à créer un bantoustan sous l'égide israélienne. Ce qui s'inscrit peu ou prou dans la continuité de la politique israélienne, nonobstant les simulacres de votes en Israël qui assurent l'alternance au pouvoir. La constante, dans la tête des dirigeants du régime hébreu, était et est de réduire la résistance palestinienne dans une situation d'indigence permanente, avec des moyens spartiates et infinitésimaux. Ainsi, au mépris de toutes les lois internationales, ces prédécesseurs ont pilonné la bande de Ghaza pendant trois semaines. En effet, depuis le 27 décembre, et pour une durée de 22 jours, Israël a commis des crimes contre l'humanité. L'innocente population de Ghaza a payé un lourd tribut. Résultat de cette furie : après trois semaines de pilonnage, le bilan était de 1.300 morts dont 410 enfants et 108 femmes. Les blessés, quant à eux, ont représenté une proportion hallucinante. Près de 5.300 Palestiniens étaient touchés.

Par ailleurs, après la tragédie, le ton utilisé pour condamner la boucherie israélienne à Ghaza était différent selon que l'on appartient à telle ou à telle rive. Toutefois, force est de constater que les exécutifs européens n'étaient pas sur la même longueur d'onde que les expressions émises dans leurs différentes capitales. La présidence de l'Union européenne (UE) a défendu le régime sioniste sans tenir compte du droit des Palestiniens à vivre en sécurité dans leur pays. Ainsi, lors de la succession de la Tchéquie à la France, pour présider l'UE, son président a qualifié, sans fard ni acrimonie, les opérations israéliennes d'acte de défense. Toutefois, le bémol est venu du Parlement européen. Bien qu'il ne soit pas ferme dans la condamnation d'Israël, le Parlement a estimé qu'il fallait différer « le rehaussement des relations avec un Etat qui ne respecte pas le droit international et qui ne donne pas les signes sérieux de bonne volonté ». Il va sans dire que cette position n'est pas partagée par les gouvernements européens.

 En guise de conclusion, il va de soi, qu'au sein de l'union, il ne pourrait y avoir une tentative d'extermination d'un peuple par un autre sans que cette tentative ne soit dénoncée et combattue. L'épée de Damoclès qui est suspendue sur les Palestiniens doit cesser de les menacer grâce justement à la mobilisation des opposants à ce massacre. Pour ce faire, il faudrait exiger d'Israël d'agir en conformité avec la charte des Nations unies. Hélas, huit mois plus tard, le constat dans la région est le même : Ghaza suffoque encore. En dépit du dernier appel des 56 prix Nobel, dont 10 Nobel de la paix, 202 députés européens et des personnalités connues, pour la levée du siège de Ghaza, Israël continue de faire de la bande une prison à ciel ouvert. D'où, la nécessité du retrait des membres soutenant la Palestine, si une solution n'est pas envisagée.