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SHAME ON YOU, MISTER OBAMA !

par K. Selim

Moubarak s'accroche avec arrogance. Il reste malgré les Egyptiens. Il reste avec l'appui des Américains. La stratégie du chaos mise en œuvre, avec l'appui implicite et hypocrite de l'armée égyptienne sur Maydan At-Tahrir, en est la traduction immédiate. Sous les yeux de millions de téléspectateurs, des hordes de voyous, les tristement célèbres «baltaguiya», encadrées par des policiers en civil et des membres du PND, le parti au pouvoir, attaquent des manifestants pacifiques.

 En échange d'une promesse de ne pas se représenter aux élections présidentielles de septembre prochain, le président a assuré qu'il s'emploierait à rétablir l'ordre et à mettre un terme aux désordres. C'est désormais fait, en direct, avec une attaque violente de voyous armés de sabres et parfois montés sur des chevaux et des dromadaires.

 L'orchestration de la violente autour de la place At-Tahrir est le signe que l'Egypte est mise dans une nouvelle phase. Très dangereuse. Elle est la conséquence directe du message équivoque de Barack Obama. L'intervention d'hier du président américain a été naturellement interprétée par le régime Moubarak comme un feu vert pour gérer à sa façon le soulèvement populaire. Il s'agit d'un soutien direct à un régime contesté par des millions de manifestants.

 Le mouvement des Egyptiens vers la liberté ? et donc la souveraineté ? a créé de grandes contorsions dans la communication d'une administration américaine coincée dans son discours verbal pro-démocratique et la prévalence des intérêts israéliens. Cela a donné un message public équivoque, mais les manœuvres étaient plus significatives de l'orientation réelle des Etats-Unis.

 L'arrivée au Caire de l'ambassadeur Wisner, un homme clé au cœur du dispositif du pouvoir américain, est un signe clair. Ce personnage, à la croisée des services secrets, de l'administration et du grand business, est l'architecte depuis plusieurs années des conspirations américaines contre les peuples. Présenté comme l'officier traitant de Hosni Moubarak et de Omar Souleimane, l'homme-orchestre des coups tordus de haut niveau est donc chargé d'organiser une transition favorable à l'allié israélien. Le recours aux séides du PND et de ceux de la police secrète pour terroriser la population avec la complicité de l'armée a été décidé au lendemain de l'arrivée de ce très emblématique personnage. Ce n'est certainement pas un hasard. L'après-Moubarak est géré directement par l'establishment américain. Il s'agit de maintenir Moubarak contre l'avis de la population et de donner du temps au régime pour susciter des fissures et des divisions dans l'opposition qui fait bloc.

 L'attaque lancée hier contre les manifestants pacifiques réunis à la Place At-Tahrir vise à casser la contestation et à amener les Egyptiens à composer avec un régime dont la seule force est celle des intérêts des ploutocrates et de ceux de puissances extérieures.

 L'attaque sauvage de la Place de la Libération et les tentatives en cours au moment de la rédaction de ces lignes pour incendier le Musée du Caire ne sont pas sans rappeler l'incendie du Reichstag qui avait permis aux nazis de décréter l'état d'exception et de suspendre les libertés.

 L'Occident et les régimes veulent maintenir la Tunisie comme une exception. Les Américains et les Occidentaux envoient un message aux peuples arabes : il accepte un peu de changement, il n'accepte pas des changements profonds qui bouleversent l'ordre établi. C'est d'une grande clarté en Egypte. Shame on you, Mister Obama !