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APN: La loi sur la criminalisation du colonialisme adoptée

par El-Houari Dilmi

Une journée historique : l'Assemblée populaire nationale (APN) a adopté, hier mercredi, à l'unanimité, la loi portant criminalisation du colonialisme français.

A l'ouverture de la plénière de l'APN consacrée au vote de plusieurs projets et propositions de lois, dont la proposition de loi criminalisant la colonisation française en Algérie, les présidents des groupes parlementaires ont honoré le coordinateur de la Commission algérienne Histoire et Mémoire, Mohamed Lahcen Zeghidi, en reconnaissance des efforts de ladite Commission dans la défense de la Mémoire nationale. Pour M. Zeghidi, la démarche visant à criminaliser la colonisation française en Algérie constitue un moment historique, dont les contours ont été définis par le président de la République, de même qu'il s'agit d'un message fort de la part des enfants de l'Indépendance et descendants des chouhada, au sein du Parlement, ainsi que d'une «réponse parlementaire à l'adresse des ennemis de l'Algérie et au monde entier».

Il a également considéré cette initiative comme une réponse claire des «enfants de Novembre» à ceux qui glorifient le colonialisme au sein du parlement français, «pour leur rappeler qu'ils sont relégués à la marge de l'histoire», ajoutant que cette démarche représente un «message de libération pour nos frères en Palestine et au Sahara occidental».

Qualifiée de « première africaine » par Abdelkader Soufi, expert en politique internationale, cette loi vise, selon ses propos, « à établir un cadre juridique clair pour qualifier, reconnaître et condamner les crimes commis par la puissance coloniale française en Algérie entre 1830 et 1962 ». Intervenant sur les ondes de la Radio nationale, Abdelkader Soufi a affirmé que « cette loi, structurée en cinq chapitres, définit, pour la première fois, de manière exhaustive les crimes perpétrés durant plus de 130 ans de colonisation », ajoutant qu'« elle établit un cadre juridique précis pour des actes commis de 1830 jusqu'à 1962, ce qui constitue une avancée historique », expliquant que la nouveauté essentielle réside dans « la classification détaillée des crimes, incluant désormais des faits longtemps marginalisés ou passés sous silence ». Parmi ces crimes figurent, selon lui, « la torture, les exécutions sommaires, les massacres de masse, les « enfumades », mais aussi « les kidnappings et les viols, des pratiques rarement reconnues dans les textes officiels auparavant ». « Cette loi définit tous les types de crimes qui ont été commis et recensés, et leur donne enfin une qualification juridique claire », a encore souligné l'invité de la Radio, ajoutant que « ces actes sont désormais reconnus comme des crimes contre l'Humanité, voire comme un génocide, ce qui, selon lui, honore le travail des rédacteurs du texte et celui du Parlement algérien ». Un autre volet central du texte concerne l'interdiction de la glorification de la colonisation française.

La restitution des biens et des archives

« Il n'y a rien à glorifier dans une occupation qui a commis des massacres, torturé des Algériens et pillé les richesses du pays pendant plus de 130 ans », a insisté l'expert, estimant que la loi introduit ainsi des dispositions pénales visant toute tentative « de justification » ou « d'exaltation » du colonialisme, notamment dans les discours publics ou médiatiques. Cette mesure vise particulièrement les discours nostalgiques de « l'Algérie française », encore présents dans certains cercles politiques et médiatiques. La loi aborde également la question cruciale de « la restitution des biens et des archives ». Abdelkader Soufi a souligné que « de nombreuses archives relatives à la guerre d'occupation et à la Révolution algérienne sont toujours détenues par la France. La revendication de la restitution des archives nationales est une exigence concrète et légitime », a-t-il affirmé, rappelant que « ces archives ne se limitent pas à la période coloniale, mais incluent aussi des documents antérieurs à 1830, appartenant au Royaume d'Algérie, et qui ont été pillés lors de l'invasion ». D'autres dispositions concernent les séquelles humaines et matérielles durables de la colonisation, notamment la question des mines antipersonnel et des essais nucléaires. «C'est un crime contre l'Humanité qui se poursuit encore aujourd'hui», a-t-il rappelé, soulignant que les retombées radioactives ont touché non seulement l'Algérie, mais aussi d'autres régions d'Afrique et même l'Europe. La loi consacre également le principe de l'imprescriptibilité des crimes coloniaux.