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Enquête - Les jeunes universitaires algériens et la démocratie : représentations et attitudes

par Hacène Merani*

Le contenu de cet écrit est la conclusion d'une étude publiée déjà, en langue arabe, dans une revue universitaire algérienne et dont j'ai estimé utile de partager l'essentiel avec les lecteurs de votre quotidien.

Comme le laisse deviner le titre même, l'enquête a visé de dévoiler la façon dont nos jeunes universitaires, étudiants notamment, se représentent la démocratie et certains sujets se rapportant à cette notion. La démocratie, en tant que «concept», d'abord, et en tant que «mode de gouvernement», ensuite. L'étude est modeste donc, plutôt descriptive, voire même exploratoire, et ne prétend d'aucune façon que ce soit à répondre à la multitude de questions que pose ce grand thème à la réflexion en générale, et à la recherche universitaire, tout particulièrement. Toutefois, et en dépit des nombreuses réserves que l'on pourrait faire à son égard, comme pour le choix du thème lui-même, et pourquoi pas ?, l'approche, la taille de l'échantillon (75 étudiants et étudiantes) et donc à sa représentativité, etc., nous estimons que ce que nous avons pu constater par ce travail vaut le coup d'être partagé avec nos compatriotes, car nous sommes convaincus qu'il permet, un tant soit peu, de faire une idée, certes partielle, voire même partiale, mais une idée quand-même sur ce que pense la très jeune génération universitaire de ce grand sujet qu'est la «démocratie».

Ainsi, et au-delà des éléments théoriques et méthodologiques que nous avons publiés dans l'article que nous avons ci-dessus évoqué et que nous avons choisi d'écarter dans ce bref compte-rendu, la question principale à laquelle nous avons tenté de répondre à travers cette modeste étude était la suivante : Comment les jeunes universitaires algériens se représentent-ils la démocratie en tant que concept et en tant que mode de gouvernement ? Une question principale que nous avons «scindée» en trois questions «partielles» : 1- Comment les jeunes universitaires algériens se représentent-ils la démocratie ? 2- Quelles sont les attitudes de ces mêmes jeunes vis-à-vis de la démocratie en tant que mode de gouvernement ? et 3- Quelles sont les catégories que l'on peut distinguer au sein des jeunes universitaires algériens par rapport à ces représentations et ces attitudes ?

Ayant réalisé notre enquête par le biais d'un questionnaire avec un échantillon composé de 75 étudiants (21 jeunes hommes et 54 jeunes femmes), âgés de 19 à 30 ans, que nous remercions beaucoup pour la précieuse aide qu'ils nous avaient très généreusement accordée, voici donc les conclusions auxquelles nous nous sommes parvenus au terme de notre étude. Conclusions qui, certes, nous l'avons déjà noté, sont loin de refléter fidèlement la situation dont il s'agit mais dont notre intuition nous dit qu'elles ne devraient pas en être très loin.

Comment les jeunes universitaires algériens se représentent-ils la démocratie ? Suivant le conseil du célèbre politologue italien Giovanni Sartori (Théorie de la démocratie, Paris, Armand Colin, 1973, p.6.), selon lequel il est important de s'intéresser aux définitions quand il s'agit de la démocratie, car celle-ci est un mode de gouvernement qui s'appuie sur un large consensus et que ce consensus, à la longue, sera influencé par l'idée que les électeurs se font de ce qu'est la démocratie «authentique», les deux premières questions que nous avons posées à nos enquêtés portaient sur la façon dont ils conçoivent cette notion et sur les idées qu'elle leur inspire.

Ainsi, à la question : Que signifie pour vous la démocratie ? La première remarque que l'on peut noter concernant les réponses de nos enquêtés est le fait que la quasi-totalité d'entre eux ont bien donné une réponse dans laquelle chacune des jeunes femmes et chacun des jeunes hommes a livré sa conception. En effet, si pour les uns la démocratie veut dire «Liberté d'expression» ou «la participation du peuple dans la conception des politiques de l'État», pour d'autres, elle signifie «le gouvernement du peuple par le biais de ses représentants», «des élections pluralistes et le multipartisme», «l'alternance au pouvoir» ou «la liberté de conviction et la diversité des opinions». Plus qu'une simple définition, certains de nos enquêtés sont allés jusqu'à la considérer comme «un facteur de progrès et de prospérité des peuples». Ainsi, une des étudiantes déclara que pour elle «la démocratie signifie une chose très importante car elle permet de défendre les droits des peuples», alors que pour un de ses collègues, elle est «un facteur de développement et là où elle se trouve, se trouve la liberté et la prospérité».

Quant à la question : Quelles sont les idées qui vous viennent à l'esprit quand vous entendez prononcer le mot «Démocratie» ? Là, nous avons constaté une différence sensible entre les réponses des jeunes femmes, d'une part, et celles des jeunes hommes, d'autre part. En réalité, trois mots essentiels peuvent résumer les réponses de nos enquêtés : la «liberté», la «participation» et l' «égalité». Mais c'est au niveau de leur importance, selon leur fréquence, que les choses n'ont pas été les mêmes selon qu'il s'agit d'une «fille» ou d'un «garçon».

Ainsi, si le mot «liberté» a été le plus évoqué par les deux sexes, c'est celui de la «participation» qui vient en deuxième position et celui de l' «égalité» en troisième position chez les «garçons». Alors que c'est l'inverse chez les «filles», où le mot «égalité» est venu en deuxième position alors que la «participation» est arrivée à la troisième place. Plus que cela, selon les réponses obtenues, c'est chez les jeunes femmes universitaires que la «Démocratie» semble jouir d'une image plus positive que chez leurs homologues de l'autre sexe. Comme exemples à cet état de fait, si la position des premières peuvent être résumée par cette déclaration d'une d'elles : «La démocratie me rappelle la liberté d'expression», celle des seconds peut être représentée par celle-ci : «La démocratie me rappelle le moyen par lequel on fait dormir le peuple.»

Pour aller plus loin dans la connaissance des attitudes des jeunes universitaires vis-à-vis de la «Démocratie», nous leur avons posé ces deux autres questions : Pensez-vous que la Démocratie présente des avantages ?, et : Estimez-vous que la démocratie a des inconvénients ? À la première question, la majorité de nos enquêtés (91%) avait répondu par l'affirmative. Alors que 9% seulement avaient répondu par la négative. En revanche, à la deuxième, 56% seulement avaient considéré que «La démocratie avait des inconvénients». Autant dire que si on se réfère à ces réponses, il semble bien que la notion jouit bel et bien d'un avis largement positif chez les jeunes universitaires algériens.

Mais : Quels sont ces «avantages» et : Quels sont ces «inconvénients» ? Pour nos enquêtés, les «avantages» de la démocratie ont pour noms, notamment, de : «liberté», «égalité», «l'alternance du pouvoir», «la justice» et «la stabilité politique». Quant aux «inconvénients» deux d'entre eux ont été les plus évoqués : 1- «la destruction des valeurs culturelles locales» car si la démocratie offre plus de liberté, elle risque, selon eux, de permettre aux gens de «s'attaquer aux valeurs morales, aux convictions communes et aux traditions de la société.» Et, 2- «La menace de la stabilité politique et l'atteinte à l'autorité de l'État.» En effet, et selon les jeunes universitaires interviewés, et en dépit des ses avantages, la démocratie est, comme chez une des étudiante, susceptible « de mener à des dépassements et au non respect des institutions de l'État», ou, comme l'annonce un de ses collègues, «de mener à des changements trop fréquents des gouvernements et donc à la paralysie du pouvoir et de l'État.»

Justement, et pour avoir une idée encore plus claire sur la position de cette catégorie de jeunes par rapport à notre sujet, une question «directe» leur a été posée : «Pensez-vous que la démocratie est un bon mode de gouvernement ?» Si nous nous référons à la réponse de nos enquêtés, la position est nettement favorable. Car c'est le «Oui» qui l'a largement emporté atteignant 83% des réponses contre 17% de «Non». Ainsi, ceux qui l'ont considéré comme un «bon mode de gouvernement» considèrent que c'est lui le mode qui permet : «au peuple de participer au pouvoir», de «prévenir les dépassements des gouvernants» et «d'ouvrir la voie au gouvernés de s'exprimer librement». Quant à ceux qui pensent que la démocratie n'est pas un «bon mode de gouvernement», ils justifient leur position par deux raisons essentielles.

La première, est qu' «aucune expérience démocratique arabe ne leur a prouvé le contraire» où «la démocratie n'a permis d'arriver au pouvoir qu'à ceux qui visaient leurs propres intérêts» et où «la démocratie n'a été que de simples slogans creux». Quant à la deuxième raison, qui fait, selon les jeunes universitaires, que la démocratie n'est pas un bon mode de gouvernement, c'est celle qui émane de la position de ceux qui la considèrent comme un mode qui ne pourrait être efficace que chez ceux qui l'ont vu naître et non chez les autres nations. Autrement dit, pour ces jeunes, «la démocratie est née en Occident et c'est en Occident seulement qu'elle est et sera efficace et non dans pays comme les nôtres.» Cela voudrait-ils que «nos pays ne sont pas prêts à la démocratisation ?»

Si, pour un peu plus de 28% de nos enquêtés, la réponse est affirmative, pour la majorité d'entre eux (72%), la réponse est «Non». Autrement dit, pour la majorité de nos enquêtés, nos pays sont prêts à la démocratie. Toutefois, il faut remarquer qu'ici on est un peu loin des taux dépassant les 90% des avis favorables concernant la démocratie en tant qu'idée ou valeur. En effet, si pour la majorité de nos enquêtés rien n'empêche les pays arabes d'adopter le mode démocratique, pour 28% d'entre eux les choses ne semblent pas aussi simples que cela. Ainsi, si ceux qui estiment que ces pays sont en mesure d'adopter la démocratie comme mode de gouvernement, croient que «les sociétés arabes ont suffisamment évolué pour ne plus accepter la domination et la dictature», tel que le disait une des étudiantes, et pensent même que «la religion musulmane, qui est celle de la majorité de ces pays, encourage l'adoption des valeurs démocratiques», tel que l'annonce une autre, ceux qui pensent que ces pays ne sont pas encore prêts pour adopter ce mode voient que c'est au niveau des «mentalités» que les choses semblent encore «immatures». Mentalités encore «imprégnés» dans «le traditionalisme», «le tribalisme», «l'autocratisme» et «l'unitarisme». C'est d'ailleurs cela qui expliquerait à leurs yeux le règne de ces régimes «dictatoriaux» et «totalitaires» dans ces pays où l'opposition et les opposants sont «réprimés».

Toujours pour mieux cerné les représentations des jeunes universitaires concernant le thème de notre étude, nous leur avons posé cette question : Y a-t-il un régime meilleur que celui de la démocratie ? Comme pour leur réponse à la question précédente, 73% de nos enquêtés ont répondu par la négative alors que les autres, c'est-à-dire les 27% d'entre eux, ont répondu par «Oui». Autrement dit, il semble bien que la majorité de nos enquêtés estime qu'aucun autre régime n'est meilleur que celui qui s'appuie sur les valeurs démocratiques, même si une très forte minorité estime que d'autres régimes peuvent lui être préférés. Pour voir plus clair, nous avons demandé à ces derniers de nous dire quel est le régime qu'ils estiment meilleur que celui de la démocratie. Selon leurs réponses, quatre groupes peuvent être distingués. Le premier, le plus minoritaire, estime que la «Dictature» est le régime le plus efficace. Selon les éléments qui ont donné cette réponse, la dictature est le régime qui «garantit la stabilité nécessaire pour le développement et la prospérité.» Contrairement à la démocratie qui n'est qu' «anarchie» et «laisser-aller». Le deuxième groupe est celui que forme ceux qui ont répondu «le régime royal». En effet, pour ces jeunes universitaires, le «Royaume», est un régime capable de réaliser «la justice sociale et le développement sans s'occuper de la liberté d'expression». Pour ces enquêtés, le modèle est celui incarné par les régimes du Golfe. Quant au troisième groupe, dont les éléments croient que la démocratie n'est pas le meilleur régime politique, il est formé par ceux qui pensent que le meilleur mode de gouvernement est celui qu'ils appellent «islamique» où la «choura» remplacera la démocratie. Car, estiment-ils, c'est le régime le plus apte à «assurer la justice et l'égalité» entre les citoyens du pays. Plus que cela, pour certain d'entre il est le régime le plus «légitime» pour les peuples musulmans. Notons que cet avis est en contradiction totale avec un certain nombre de nos enquêtés qui justifient leur attitude positive vis-à-vis de la «démocratie» par la ressemblance de ces valeurs avec les valeurs «islamiques».

Le quatrième groupe, dont les éléments estiment que la démocratie ne constitue pas le meilleur mode de gouvernement, il comprend ceux qui pensent que le meilleur mode serait celui où on réussirait de «faire une synthèse entre les valeurs de la démocratie moderne et celles de la société». Une sorte de régime «démocratique» avec le respect de ce qu'ils considèrent comme valeurs culturelles «fondamentales» de la communauté.

Pour mieux comprendre : Ceci est donc le résumé de la manière dont les jeunes universitaires algériennes questionnés dans le cadre de cette étude se représentent la démocratie, en tant que valeur et en tant que mode de gouvernement et leurs attitudes à son égard.

Attitudes qui sont dans l'ensemble très favorables même s'ils estiment, jusqu'à une certaine mesure, d'une part, que nos sociétés ne semblent pas encore prêtes pour ce mode de gouvernement et les valeurs qui le sous-tendent, et d'autre part, qu'une synthèse entre cette valeur et celles de la société serait nécessaire. Essayons dans ce qui va suivre de comprendre encore mieux ces représentations et ces attitudes en les reliant à certaines caractéristiques sociales des ces jeunes étudiants. Autrement dit, si telles ont été leurs représentations et leurs attitudes, peut-on savoir qu'est-ce qui fait que ces représentations et ses attitudes varient d'un jeune universitaire à un autre ? Pour donner quelques éléments de réponse à cette question, nous avons choisi quelques variables qui nous ont semblé pertinentes ou, plus exactement, susceptibles d'être pertinentes. Ainsi, notre choix a été porté sur les variables suivantes : 1- le sexe ; 2- l'âge ; «3- l'activité professionnelle de la mère ; et 4- l'origine géographique du jeune universitaire. D'autres variables, aussi importantes que celles sur lesquelles notre choix a porté, auraient pu être retenues. Toutefois, nous nous sommes limités à ces quatre caractéristiques par souci de simplification en évitant d'allonger inutilement la liste des variables dans la mesure où celles que nous avons choisies permettent d'atteindre l'objectif de notre travail, à savoir déceler l'influence des appartenances socioculturelles des jeunes universitaires sur leurs conceptions et leurs attitudes vis-à-vis de la notion de démocratie.

En ce qui concerne la variable du sexe des enquêtés, dans l'ensemble, nous avons constaté que les représentations des «jeunes femmes» universitaires et leurs attitudes vis-à-vis de la «Démocratie» sont nettement plus favorables que celles des «jeunes hommes» universitaires. Et même au niveau de leur avis concernant «si les pays arabes sont prêts ou non à l'adoption de la démocratie» où nous avons noté une attitude légèrement plus «déçue» chez les «filles» que chez les «garçons».

Quant à la position selon l'âge des enquêtés et en distinguant entre trois catégories à savoir, celle dont les âges varient entre 19-22, 23-26 et 27-30 ans, nous avons constaté une nette différence dans les représentations et les attitudes des jeunes universitaires interviewés. Ainsi, ce sont les plus jeunes d'entre eux dont l'âge varie entre 19-22 qui ont affiché les positions les plus positives envers la démocratie et ses valeurs. Ils sont suivis respectivement par la catégorie des 23-26 et, enfin, par celle des 27-30 ans. Toutefois, une question est à ce propos inévitable. Ces attitudes plus positives vis-à-vis de cette valeur qu'est la démocratie chez les plus jeunes, est-elle propre aux nouvelles générations ou seraient-elles uniquement liées à l'âge des jeunes universitaires ? Autrement dit, sont-elles positives et que dorénavant la «revendication démocratique» va connaître une augmentation chez les générations futures où vont-elles connaître une «modération» grâce au rôle de socialisation que vont jouer les différentes institutions sociales, culturelles et politiques et amener donc à leur diminution avec l'âge tel que le suggèrent la plupart des études qui mettent le point sur la décroissance de l' «ardeur» politique des âgés par rapport aux plus jeunes ?

La troisième variable, à laquelle nous avons choisi de relier les attitudes de nos enquêtés, est celle de la position professionnelle de la mère. Autrement dit, et considérant que le travail de la mère à l'extérieur loin de la stricte sphère domestique est généralement considérée comme l'un des grands changements apportés par la vie moderne, nous avons décidé de voir les attitudes des jeunes universitaires selon que leur mère travaille (ou a travaillé) ou non, hors du foyer familial. Ainsi, et d'une façon nette, il nous a été donné de constater que les attitudes des enquêtés dont la mère travaille ou a travaillé (13 sur 75) étaient plus favorables à la démocratie par rapport à celles dont la mère avait toujours été une «femme au foyer».

La dernière variable que nous avons choisie pour la mettre en corrélation avec les attitudes des enquêtés par rapport aux valeurs démocratiques est celle de l'origine géographique en distinguant entre les deux origines principales «rurale» et «citadine». Ainsi, en ayant à l'esprit le fait que la démocratie moderne a été dans l'ensemble une œuvre «urbaine», nous avons voulu voir à quel degré les attitudes des jeunes universitaires par rapport à la valeur «démocratie» pourraient varier selon qu'ils soient «ruraux» ou «citadin». Là aussi, il nous a été donné de constater que les positions et attitudes des «citadins» ont été plus favorables que celles de leurs collègues «ruraux» même si, il faut le reconnaitre, dans notre cas, les différences n'ont pas été très fortes.

Conclusions : Après cette brève analyse des représentations et attitudes de quelques jeunes universitaires algériens concernant la «démocratie» en tant que valeur abstraite et en tant que mode de gouvernement, que peut-on en retenir ? À notre avis, il est possible de dire que dans l'ensemble, il nous a été permis de dévoiler que les positions de nos enquêtés, et travers eux probablement une bonne partie de leur catégorie, ont été largement favorables à cette notion et un peu plus chez les «filles» que chez les «garçons», ainsi que chez les plus jeunes que chez les plus âgés, chez les «citadins» que chez les «ruraux» et chez ceux dont la mère a ou avait une activité professionnelle que chez ceux dont la mère qui a toujours était une «femme au foyer». En outre, nous avons constaté à cet effet une certaine différence entre la «hiérarchie» des aspirations liées à la «démocratie» entre les jeunes hommes, d'une part, et les jeunes femmes, de l'autre. Ainsi, si chez les premiers celle de la «participation» dans la gestion des affaires du pays a occupé une place élevée, c'est celle de la «justice» qui était à ce rang élevé chez les secondes. Mais c'est la «liberté» qui a occupé le sommet de la hiérarchie chez les enquêtés des deux sexes.

Toutefois, et malgré ces positions largement favorables des deux groupes, «hommes» et «femmes», à propos de la valeur «démocratie» et le mode de gouvernement qu'elle incarne, cela n'a pas empêché de constater deux autres réalités, à notre avis, importantes. La première est qu'une bonne partie, la moitié environ de notre échantillon, considère que les pays comme le notre «ne sont pas encore prêts à l'adoption de la démocratie» comme mode de gouvernement par manque de «traditions». Cette position semble avoir été renforcée par les résultats des expériences vécues pas plusieurs pays de la région durant ces dernières années. La seconde est que la majorité de nos enquêtés semble préférer, en dépit de sa position favorable à propos de la «démocratie», une sorte de jonction, de synthèse, entre les valeurs démocratiques et les valeurs de la société, les plus importantes à leurs yeux, pour mettre au point un mode de gouvernement qui serait en mesure de répondre à leurs aspirations où, d'une part, la «liberté», la «participation», la «justice»...etc., seraient assurées, et où, d'autre part, les principales valeurs traditionnelles ne seraient pas sacrifiées.



*Sociologue Université d'Annaba