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Décès de Djelloul Nacer, dirigeant de l'UNEA historique

par Djamel Labidi

Mon ami, Djelloul Nacer, s'est éteint le 31 janvier 2025 à l'âge de 88 ans. C'était le chef du mouvement étudiant algérien de l'UNEA des années héroïques, de 1965 à 1971. C'était le meilleur d'entre nous. Ma peine est infinie. Que Dieu ait son âme. On lira ci-dessous le témoignage émouvant du Dr Omar Brixi.

Djelloul est mort. Cette nuit. Après une longue plongée crépusculaire. J'en pleure de larmes ravalées. Encore une branche qui se détache de nos vies éprouvées. Je ne saurais retracer la vie tumultueuse de Djelloul. Sa petite fille qu'il adorait s'en est à un moment préoccupée pour un projet de film documentaire. Je retiens pour ma part des bribes de situations furtives. Dès les années 1969/1970 nous scandions lors des manifestations de l'UNEA les noms de Djelloul Nacer et Djamel Labidi, sans les connaître. Membres de la direction de l'organisation estudiantine, nous en avons fait des préalables pour le processus de normalisation que l'on revendiquait. Les murs de l'université d'Alger étaient régulièrement tapissés d'affiches exigeant leur libération. Nous savions que leur détention arbitraire leur avait valu des sévices et des tortures dans un pays qui en a tant souffert pendant la guerre de Libération. Toujours à cette période, nous avions aperçu Djelloul furtivement et pour la première fois, lors d'une courte permission de prison, entouré de gardiens, pour le passage d'un examen dans le service de gastro-entérologie que dirigeait le Pr Illoul. Par la suite, nous avons retrouvé ses traces à Béchar où, assigné à résidence, il sillonnait la wilaya de la Saoura au sein de l'équipe médicale mobile. Avec les collègues de notre promotion, nous avons eu la chance de le côtoyer tantôt comme enseignant tantôt comme collègue. Toujours aussi modeste qu'affable et surtout aux compétences largement reconnues tant en épidémiologie qu'en santé publique, le Dr Djelloul Nacer était apprécié par tous ceux qu'il approchait. Tout en retenue, il nous servait de repère et de modérateur face à nos impatiences et nos jugements à l'emporte-pièce. Nous étions jeunes. Il avait le recul et l'expérience de toute une vie antérieure durant la guerre de Libération comme lors des différentes péripéties de l'Algérie indépendante.

Djelloul Nacer a été membre de la direction du Parti de l'avant garde socialiste (PAGS). Toutes celles et ceux qui l'ont côtoyé dans ce cadre, tant durant les périodes de clandestinité que durant les trop courtes années de légalité, sont unanimes. Djelloul était le camarade le plus respecté et estimé. Par ses plus proches camarades comme ses plus farouches adversaires. On a tendance après la disparition de quelqu'un de le glorifier ou de ne retenir que ses qualités. Djelloul était reconnu de son vivant. Bien sûr, ses plus proches camarades s'irritaient par moments de son «perfectionnisme». Djelloul n'était pas du genre à conclure. Plus que sa timidité et surtout son humilité, il était, en fait, plus sensible que d'autres face à la complexité des êtres et des situations. Ce n'est pas par hasard qu'il avait une conception tout en nuances de l'épidémiologie et une approche sociale de la santé publique. C'est cela qui en faisait une personne, un professionnel et pour nous un ami et un camarade irremplaçable. Djelloul, tes proches et tes amis te regretteront mais tu peux désormais reposer en paix. Tu as été un homme utile à ton pays et apprécié par tes amis.

Dr Omar Brixi, le 31 janvier 2025