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Livres
Rien n'arrive par hasard. Récit de Aomar Khennouf. Les Presses du Chélif 2024, 221 pages, 1 000 dinars. A travers ce récit romancé (quelque peu, afin de faciliter la lecture) et parsemé d'observations politiques et sociales souvent assez critiques, l'auteur nous raconte le déroulement de la vie d'une jeune homme tout juste sorti d'une Ecole formant les techniciens supérieurs spécialisés dans la construction et l'habitat (la fameuse Inforba), et encore célibataire, fin des années 70, début des années 80 (années charnières de la vie politique du pays avec l'abandon d'une manière de gouverner assez autoritariste et la promotion d'une manière nouvelle assez dilettante), qui se retrouve -en attendant le Service national qui lui pend au nez- chargé d'une lourde responsabilité... sans trop de moyens: la construction de silos modernes près d'une grande ville des Hauts Plateaux. Envoyé au charbon alors que les grands patrons (Pdg, ministres...) ont d'autres préoccupations... à Alger : la durabilité des avantages et des privilèges des hautes fonctions. Il se retrouve donc confronté à mille et un obstacles, tant au niveau de l'entreprise (dominé par un laisser-aller évident, par un syndicalisme dévoyé, par la bureaucratie locale... et un certain régionalisme basé sur le tribalisme). Donc, un certain récit de vie (d'un jeune cadre voulant assurément réussir... et réussissant malgré tous les problèmes) qui nous fait voyager dans une Algérie en construction et que les jeunes d'aujourd'hui ne veulent ni ne peuvent connaître. Un récit de vie, pas exemplaire en totalité (tout particulièrement la partie entraînant un exil lors de la décennie rouge qui avait vu le pays basculer dans le chaos) mais qui peut servir d'exemple... à suivre. L'Auteur : Né à Alger en 1957. Diplômé de l'Inforba à 22 ans (1ère promotion).Responsable, à 24 ans (1980) au sein d'une grande entreprise relevant du secteur de l'Habitat et de la Construction. Dans le secteur public jusqu'en 2002. Retraite en 2018. Table des matières : Prologue/ Première partie : Hic Rhodus, hic salta (11 chapitres)/ Deuxième partie :Fallait-il lui dire bonsoir ? (11 chapitres)/ Epilogue Extraits : «Dans la division du travail, il y a ceux qui sont censés réfléchir, planifier et organiser. Il y a ceux qui sont censés exécuter. Il y a cet entre-deux, une catégorie à laquelle j'appartiens désormais. C'est celle de ceux qui trinquent pour tout le monde» (p 19), «Le désordre, la confusion, l'opacité et la rétention d'information vitale qui règnent par ici ne sont pas dus au manque de compétences ou de volonté d'organisation. C'est un état savamment entretenu par les pêcheurs en eau trouble» (p33), «Notre histoire souffre d'incurie. Nous ne sommes que le fruit des incessants ruissellements humains sur les rivages de notre pays qui ont charrié tant de richesses demeurées enfouies sous les couches de notre ignorance. Il faut avoir l'âme des archéologues pour déblayer ces strates qui se sont déposées depuis des millénaires, les unes sur les autres» (p 51), «C'est devenu à la mode. L'efficacité des gouvernants se mesure au nombre de limogeages médiatisés» (p125), «Le fanatisme n'admet que sa propre vision et sa propre pensée. Il est exclusif» (p171), «Le célibat a d'énormes avantages (...). Mais il a un seul et grand inconvénient : la testostérone. Le mariage possède beaucoup d'avantages lui aussi et un petit inconvénient : tu prends un associé qui partagera ta vie qui ne t'appartient plus en exclusivité. Le reste n'est que littérature» (p186). Avis - Les hauts et les bas, les ambitions et les désillusions dans la carrière d'un cadre technique (supérieur moyen)... des années 80. En attendant une suite du récit ! Citations : «La responsabilité n'est pas un privilège, c'est un enfer (...).Nous devons répondre de nos actes devant qui de droit. Et qui de droit est d'abord et en premier lieu sa propre conscience» (p19), «Les financiers ont une solidarité de secte maçonnique» (p29), «Connaître l'histoire, c'est comme connaître une langue étrangère. Cela peut éviter bien des déboires» (p31), «(Appelé au Service national) Un vicieux médecin russe avec un double décimètre soulevait nos engins et vérifiait nos bourses. Il les comptait : une, deux. Il paraît que les deux sont indispensables pour faire un bon soldat» (p 73), «Le chacal est le seul animal qui ne fixe jamais du regard les yeux de l'homme. C'est un traître de nature» (p 84). Entrepreneurs, Pouvoir et Société en Algérie. Essai de Nordine Grim. Présentation de Arezki Idjerouidène. Préface de Boualem Aliouat. Casbah Editions. Alger 2012. 187 pages, 850 dinars. Depuis l'Indépendance du pays, un (01) seul patron (privé) a fait partie d'un gouvernement, au début des années 1990 (Reda Hamiani, au département des Pme, et devenu Président du Fce)... Depuis, plus rien ? Avant, impensable ! Depuis la création de la Bourse d'Alger, c'est seulement début février 2013 qu'il est annoncé la prochaine entrée (avec 25% du capital social) d'une entreprise industrielle (Nca Rouiba) à composante familiale. Jusqu'ici, même si de puissantes Sarl (d'essence familiale) étaient transformées en Spa, comme actionnaires, il n'y a que «les parents et alliés» C'est dire le fossé qui sépare encore le comportement «étatiste» des pouvoirs publics du pays... et le comportement «familialiste» des entrepreneurs algériens du secteur privé. C'est dire la mentalité des uns, une mentalité hégémonique qui perdure contre vents et marées, et les craintes d'un secteur privé qui, souvent malmené, menacé... utilisé, séduit puis abandonné, est devenu plus que méfiant... tout cela laissant la place à un «informel» - surtout depuis 1990, avec la démonopolisation du commerce extérieur - dévastateur de l'économie nationale... et la place à un secteur économique public d'abord abandonné, puis «repris», enfin méprisé, mais sous perfusion permanente (une sorte de «pension alimentaire» versée surtout quand on veut). Heureusement que le Fmi et le Socialisme algérien ont existé... Les boucs émissaires de tous les échecs ! Avis - Les textes du Pdg d'entreprise qui présente l'ouvrage et du professeur d'Université qui fait la préface sont, bien sûr, à «parcourir» par les spécialistes. Mais le reste, les textes de Nordine Grim, homme de terrain, ancien haut fonctionnaire et cadre fin connaisseur des rouages sont à lire, car leur écriture est précise, directe, concise. C'est celle du journaliste spécialisé qui s'est frotté au(x) terrain(s). Donc à lire, non par les entrepreneurs, non par les chercheurs et universitaires... tous déjà, au fait des situations, mais surtout par les gouvernants, les politiques, les députés, les sénateurs, les «décideurs» réels... Pour une prise de conscience urgente des problèmes vécus et à venir, et de la problématique. Phrase à méditer : Aucune en particulier. Car, c'est tout l'ouvrage qui est à méditer, la présentation, la préface, le texte... et la caricature de la dernière page de couverture. (Pour rappel ! Fiche de lecture déjà publiée le 26 octobre 2019, in www. almanach-dz.com/économie/bibliothèque d'almanach) |
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