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Le wifi dans les mosquées!

par Abdelkrim Zerzouri

Désormais, les fidèles qui se trouveraient à l'intérieur de la mosquée, et les jeunes à l'extérieur, dans le périmètre immédiat du lieu de culte, vont sonder leurs connaissances et les proches de l'imam pour leur glisser le mot de passe wifi. L'invite du ministre des Affaires religieuses aux imams, les exhortant d'investir massivement les réseaux sociaux, provoque railleries par-ci et salut par-là, d'internautes hostiles ou séduits par cette initiative, qui implique nécessairement la dotation de mosquées en matériel informatique et connexion à Internet au frais de la tutelle, de toute évidence. C'est une idée un peu bizarre de demander à 42.000 imams d'ouvrir des comptes Facebook et Twitter. Normalement, on ne demande pas à ses troupes d'investir les réseaux sociaux, elles doivent le faire de leur propre chef, pour éviter de tomber dans une sorte de fonctionnariat sur Internet. Un imam qui ouvre un compte Facebook ou Twitter, c'est quelque chose de très normal. Mais lorsque la hiérarchie lui demande de le faire, cela devient une corvée que certains boycotteraient de mille et une façons.

Non pas parce qu'il va à contre-courant de ce qu'on lui demande, mais parfois c'est juste à cause d'une mauvaise maîtrise de la pratique sur les réseaux sociaux. Ce n'est pas évident, en effet, de surfer sur la toile, consacrer du temps et des efforts, et avoir comme on le voudrait une influence saine sur les internautes.    L'imam fait son prêche dans la mosquée, il peut utiliser le créneau audiovisuel pour le faire, mais pas Facebook. L'activité sur le réseau social doit être l'apanage de spécialistes rôdés à la pratique sur Internet, et qui réagissent vite aux idées et aux informations qu'on veut reformuler d'une façon correcte. Un imam devrait attendre, encore, que sa tutelle lui donne des orientations dans un sens ou dans un autre pour contrecarrer une tendance contraire à notre référent religieux et qui menacerait l'unité nationale, puisque là se trouve l'appréhension qui a poussé le ministre à exhorter les imams d'investir les réseaux sociaux. Alors qu'un spécialiste, qui serait au mieux très au fait des affaires sécuritaires, peut et doit agir rapidement pour neutraliser le mal. Des imams sur Facebook, pourquoi faire s'ils y viennent pour se faire ridiculiser ? Oui, si on y va avec naïveté, on peut se faire ridiculiser sur Facebook. C'est une option avec laquelle il faut sérieusement compter. Certes, il faut rester vigilant à ce qui ce dit sur Facebook mais que peuvent des imams très mal écoutés au sein même des mosquées ?

Un seul compte sur le réseau social peut faire des ravages dans les consciences, plus que ne pourraient arranger les dégâts les 42.000 ou 100.000 autres comptes. La toile, c'est un monde impitoyable d'émoticônes (Emoji) ou Likes qu'on ne distribue pas toujours au plus bon. Bienvenue aux imams qui arrivent, d'un pied gauche, dans le monde virtuel qu'ils ne cessent, ironie du sort, de dénoncer.