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De salarié à entrepreneur

par Abdelkrim Zerzouri

La création du dispositif «congé création d'entreprise», introduit par la loi n°22-16 du 20 juillet 2022 complétant la loi n°90-11 du 21 avril 1990 relative aux relations de travail, publiée dans le Journal officiel n°49, est une bonne initiative. Le salarié qui ambitionne de créer sa propre entreprise, et qui ne pouvait pas passer à l'action par crainte de perdre son salaire en cas d'échec de son projet, n'aura plus aucun souci à se faire. La nouvelle réglementation lui accorde une période sabbatique d'une année pour la création d'une entreprise, qui peut être prorogée, exceptionnellement, pour une durée n'excédant pas six (6) mois, sur justification fournie par le travailleur concerné, avec obligation de reprendre le salarié au bout du congé si celui-ci demande sa réintégration.

En sus d'autres motivations, comme le droit au recours au travail à temps partiel pour création d'entreprise, conformément aux dispositions de la législation et de la réglementation en vigueur, et le bénéfice des avantages et aides octroyés dans le cadre des dispositifs publics de création et d'extension d'activités, conformément à la législation et à la réglementation en vigueur.

Ce nouveau texte de loi vise à encourager les travailleurs à s'orienter vers l'entrepreneuriat et se transformer en créateurs d'emplois. L'opportunité est effectivement donnée au travailleur salarié de faire un saut dans le monde de l'entrepreneuriat et de participer à la promotion de l'économie, mais pour dire si cela va réussir ou pas, il faudrait attendre quelques années avant de tirer le bilan. C'est un engagement du président de la République qui se concrétise à travers cette loi, mais le reste, tout le reste, dépend exclusivement des travailleurs et de leur entrain à devenir entrepreneur.

Y aura-t-il des salariés qui vont se lancer dans les affaires en abandonnant l'assurance d'un salaire mensuel acquis, car le travailleur qui prend option de quitter temporairement l'entreprise pour se lancer dans l'entrepreneuriat, va perdre sa rémunération et son départ va entraîner automatiquement la cessation du bénéfice de ses droits relatifs à l'ancienneté et à l'avancement ? Y a-t-il des salariés en possession d'un fonds financier qui peut assurer le lancement d'une entreprise, et couvrir les dépenses personnelles du travailleur/entrepreneur, celles exigées par le foyer si le concerné a en charge une famille, durant plusieurs mois avant que son projet ne soit rentable ? Et, on n'a pas parlé du risque pour les entreprises ou établissements de perdre des cadres compétents qui opteraient pour cette formule. Des entreprises qui auraient certainement préféré une autre procédure appliquée dans certains pays, qui accordent aux cadres d'entreprise et aux professeurs d'université une année de congé consacrée à la recherche ou aux études, parfois en continuant à leur assurer leur rémunération, pour revenir la tête bien pleine et renforcer le potentiel humain de l'entreprise. Une autre manière de promouvoir l'économie sans courir le moindre risque d'échec.