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Drôle de parallèle !

par Slemnia Bendaoud

Toute comparaison futile, osée et plutôt insensée n'est qu'une imbécilité publiquement avouée. Plus grave le sera encore la sanction à encourir lorsque son auteur, plume confirmée au demeurant avec un appui plus que certain à l'étranger, se met bien malheureusement au service d'une philosophie qui détruit manifestement les fondements mêmes de sa propre personnalité.

La question-phare que cette « manœuvre littéraire », pour le moins insolite, suscite dans l'esprit des gens éclairés ou sujets intellects a surtout rapport avec la connaissance de celui qui logiquement tire profit de ce « drôle de parallèle ». On en est encore là à se demander comment arrive-t-on à oser établir un quelconque lien de similitude entre un coup de feu qui libère l'âme et celui qui la tue, entre cette poudre qui nous assure la survie et cette balle assassine qui cloue au pilori un innocent ou un inconnu.

Mais dès lors qu'on connait avec la précision voulue le caractère plutôt très particulier et assez complexe de son auteur, tout le voile très compact qui l'enveloppe disparait de manière subite et plutôt naturelle, dévoilant au passage ce « chef-d'œuvre raté » qui nous discrédite et humilie davantage à l'étranger bien plus qu'il ne le fait réellement en intra-muros.

Tenter ?incidemment ou très malencontreusement ?!- une si méchante approche et aussi inconcevable comparaison, qui nuit très sérieusement à l'image de la glorieuse révolution algérienne bien plus qu'elle ne le fait pourtant pour celle de l'auteur de cette grave faute d'appréciation que l'Histoire du peuple algérien ne saurait sous quelque forme que ce soit lui pardonner, ne peut logiquement être interprété en dehors de cet esprit retord qui le caractérise et le singularise.

Agir de la sorte n'est-il pas déjà en soi une véritable provocation de l'opinion publique nationale ? Comment donc l'interpréter bien autrement ? Et comment ne pas en douter de la critique véhiculée dès lors que l'Histoire d'une aussi Grande Nation se trouve être piétinée si méchamment par l'un de ses propres fils qui a volontairement choisi de se rallier au camp de ses ennemis d'hier et d'aujourd'hui ?

Aborder ce dangereux virage -à un moment où sa côte de popularité et réputation extra-muros connaissent étrangement un spectaculaire ascendant littéraire- ne participe-t-il pas de cette volonté manifeste de renier les siens et aussi la fabuleuse Histoire qui a enfanté la plume dont il s'en sert pour éjecter à sa face tout son fiel ?

A plus forte raison lorsque des plumes françaises de l'autre bord de la Méditerranée, mues par leur seule conscience professionnelle et leur esprit de logique intellectuelle, se mettent à raisonner l'auteur de cette « fugue blasphématoire » à l'effet de rétablir une vérité historique et surtout de dissiper l'amalgame qui s'y colle de manière délibéré.

La meilleure des preuves nous est donc fournie par cet écrivain et historien de renom, le français Olivier Lacour Grandmaison, dans son analyse des faits objet de notre chronique, en les ramenant d'abord à leur juste proportion et valeur, tout en s'offusquant ensuite au sujet d'une pareille comparaison n'ayant logiquement aucune raison d'exister au sein des esprits lettrés ; car ramener la cause d'une révolution à un plutôt dangereux attentat suicide ou meurtrier relève d'un raccourci délibéré et très tendancieux, qu'il a d'ailleurs publiquement tenu de le dénoncer de vive voix*.

Dans son intervention « plutôt musclée », cette plume reconnue et de choix de l'académie française a donc tenté de faire la part des choses, mais surtout de séparer fort intelligemment « la bonne graine révolutionnaire » de « l'ivraie politique mensongère », avec en sus tout un magistral cours d'histoire accessoire très académique qui fait ce nécessaire distinguo entre ce qui est afférent à la lutte révolutionnaire et ce qui est apparenté à des actes purement terroristes, proscrits et bannis du dictionnaire de l'autodétermination des peuples et des nations.

Il en situe d'ailleurs de fort belle manière, arguments à l'appui, à la fois les tenants et les aboutissants, tout autant les réelles causes de la colonisation que les tangibles raisons du soulèvement de la révolution, les provocations subies dans sa propre chair par le peuple algérien et ses répliques énergiques à l'effet de recouvrer son territoire, sa dignité, sa liberté et indépendance.

Lorsqu'on se trompe si dangereusement ou très importunément sur toute l'Histoire d'une Nation à l'effet d'en miroiter indument tout le mérite à accorder à la sienne en devenir, ou en substitution à la première, on ne fait malheureusement que trahir une mémoire collective au profit d'un aura en construction sur les cendres d'une révolution qui aura chèrement payé le tribut de l'indépendance de son pays.

Avec ce énième épisode, Boualem Sansal, puisque c'est de lui qu'il s'agit, n'aura fait qu'ouvrir encore une fois non pas une banale parenthèse mais surtout un tout autre front contre sa propre patrie et aussi contre le peuple algérien dont il est issu.

Les répliques en série ?des plus acerbes aux très sèches- lui parvenant en cascades à ce sujet de ses propres pairs et confrères ne lui reprochent-elles presque toutes pas uniquement son « délitement intellectuel et littéraire extravagant » mais également son acharnement à s'attaquer aux constantes de la Nation et révolution algérienne, dont des plumes étrangères de surcroit lui font paradoxalement l'éloge pour en situer le mérite à bien la mener aussi longtemps et si courageusement contre une puissance coloniale dont la force n'est plus à démontrer.

Son altercation ?par presse interposée- avec la romancière et poétesse Ahlem Mostaghanemi en révèlera les dessous d'une manière d'agir très zélée qui porta malheureusement atteinte à l'image du pays et surtout à cette réputation ?plutôt surfaite- d'une plume qui s'occidentalise dans l'optique de verser son courroux sur son propre pays et sur sa légendaire révolution.

Tout avait d'ailleurs bien commencé, il y a quelques années déjà, avec sa visite-surprise et son voyage inopiné, peut-être même alors provoqué à dessein, tendancieux et très risqué à Jérusalem même (Israël), le montrant coiffé de sa « chéchia judaïque » pur terroir, près du mur des lamentations, voyage au cours duquel il s'improvisa ce démocrate « très clairvoyant », renvoyant sine die et surtout dos à dos la victime palestinienne et son bourreau israélien.

Depuis lors, il ne faisait aucun doute que l'auteur du Serment des Barbares ?quel titre pour quelle destination finale ?!- s'était jeté corps et âme dans les bras des Juifs, subissant du coup et à la foulée leur dictat et pression à l'aune desquels naissait spectaculairement et croissait jour après jour sa pourtant timide promotion littéraire, indexée à hauteur du prorata du ralliement de ses prestations littéraires à la cause juive.

Tout le reste ou ce qui en suivit ne pouvait dès lors que se situer dans la logique voie du prolongement de cet esprit acquis d'office au profit de ces faits et cause qui lui traceront plus tard le jalonnement de toutes ses actions futures ou réflexions littéraires envisagées pour l'avenir.

Aussi, nul besoin de s'étonner aujourd'hui que cette plume -hier encore en herbe- loue désormais autant de mérite à défendre des intérêts totalement étrangers au peuple algérien et à sa glorieuse révolution dans la seule perspective de mieux soigner l'aura de son maitre et son image de marque au sein de l'espace littéraire universel!

L'attaque frontale faite avec mépris et zèle aux symboles de la révolution algérienne via ce parallèle inconvenant et humiliant s'inscrit dans une entreprise de sape caractérisée et bien orchestrée des valeurs de la Nation qu'il foule aux pieds sans vergogne ou quelconque ménagement de sa part.

Ce jeu dangereux confiné dans ce très tendancieux parallèle fait avec mépris et surtout haine contre l'une des plus Grandes Révolutions du monde contemporain par une plume de choix mais « d'emprunt », qui aurait du ou pu s'investir dans sa logique histoire, n'a fait, en revanche, que pousser ses pairs et autres confrères à fermement dénoncer, par dépit et surtout déontologie professionnelle, une si ignoble manœuvre qui s'écarte des valeurs de l'éthique littéraire pour verser inéluctablement dans cette manœuvre à haut risque qui engage solennellement à la fois l'avenir du pays et le sien.

L'épi levé si haut à la verticale n'est malheureusement pas celle qui renferme les meilleurs blés. Celle qui ploie sous le poids considérable de ses grains mûrs à moissonner, jusqu'à plier l'échine, le fait par respect envers la nature et l'humanité, poussée par son devoir de mieux les servir. Devant l'Histoire et son implacable vérité, on ne peut donc jouer à ce « rebelle invétéré ».

Nourrir son monde est un devoir sacré que l'épi remplit avec grande fierté. Quant à nourrir l'esprit par ces écrits qui travestissent l'Histoire et la vérité, le monde des gens civilisés ne peut nullement l'accepter. Par leur nature, ils s'en détourneront. Ils laisseront ces plumes égarées continuer à jouer à leur propre jeu !

(*) ? Quotidien Arabophone Ech Chourok du 29 juillet 2016.