Soixante
ans après l'indépendance de l'Algérie, la question mémorielle ressurgit avec
acuité et ce, à chaque fois que se manifestent des tensions de la relation algéro-française. La rente mémorielle est sciemment
exploitée par une partie de la classe politique y compris son segment en
situation de responsabilité en fonction de conjectures politiques propres à
l'Hexagone et à ses seuls intérêts exclusifs. La détention par la France
d'archives algériennes y compris celles antérieures à la colonisation
française, prive l'Algérie de nombreux éléments historiques et ampute ainsi sa
mémoire nationale de certains de ses aspects constitutifs. La restitution à
l'Algérie de ses archives est une revendication légitime et est plus que la
repentance qui n'est en soi qu'un acte symbolique, la condition sine qua none
pour sortir définitivement de cet enclos colonial qui permet encore à
l'ancienne puissance colonisatrice d'espérer pouvoir «tenir encore en laisse»
un pays continent conscient de sa puissance en devenir et son puissant et
ambitieux projet national. La haine de l'Algérie indépendante reste encore et
toujours un marqueur idéologique important d'une partie de la classe politique
et des médias français qui bien que ne disposant plus des atours de la France
historique adoptent toujours et contre vents et marées cette posture arrogante
et prétentieuse qui assèche chaque jour que Dieu fait la densité de la relation
algéro-française qui ne profite plus de la présence
d'une importante diaspora d'origine algérienne en France. Espèrer
écrire conjointement l'histoire du début de la colonisation française à
l'aboutissement du projet d'indépendance nationale n'est qu'un leurre, voire un
artifice de domination qui vise à perpétuer cet enclos colonial dont doit
impérativement sortir l'Algérie. Et pour ceux des deux rives
de la Méditerranée, nostalgiques revanchards et intellectuels candides devenus
aveugles, qui seraient encore mal inspirés quant à la nature de la relation
entre l'Algérie et la France, un homme politique français de gauche qui se
proclame insoumis essaye de déblayer les chemins de l'avenir des lourds gravats
du colonialisme et propose une recette d'une simplicité déconcertante, renoncer
définitivement à cette posture dominatrice et se résigner enfin à prendre acte
de la réalité de deux entités bien distinctes, souveraines et définitivement
émancipées d'un passé révolu.