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Réalisations structurantes ?

par Belkacem Ahcene-Djaballah

Il a donc fallu plus de soixante années de vie indépendante pour que le pays connaisse, enfin, une révolution sociétale à nulle autre pareille. Ceci dit en dehors des «révolutions» d'Octobre 88 (qui n'a fait que changer l'organisation du système politique, sans bouleverser pour autant son fonctionnement) et du Hirak (qui a fait changer les comportements des hommes au pouvoir plus que les pouvoirs eux-mêmes).

Il est vrai que le pays a connu pas mal de «Révolutions» : agraire, industrielle et culturelle avec des hauts et des bas en matière de résultats, des bas plus que des hauts, le pays n'en conservant plus que des «restes» souvent pas très beaux, entretenus par la suite par la «rente pétrolière» et de souvenirs chez les sexagénaires et plus.

Hélas, tout cela n'a pas changé, fondamentalement, en profondeur et durablement, la société qui reste accrochée quasi-exclusivement à ses mythes et ses pères fondateurs, mythes que même les animateurs sanguinaires de la décennie noire n'ont pas réussi à changer.

Deux événements (de véritables réalisations) sont venus récemment bouleverser la donne; une donne qui devra être étudiée spatio-temporellement de très près par les universitaires-chercheurs au niveau des réalisations elles-mêmes et surtout de leurs retombées sociétales. Car, il est évident, et c'est ici l'avis d'un simple observateur social, il y a là deux réalisations réellement structurantes de la société algérienne. Grâce à leur organisation quasi-parfaite (surtout si on les compare avec ce qui s'est fait par le passé ne serait-ce que pour des manifestations de peu d'envergure). Grâce à leur succès rencontré auprès des publics nationaux (et étrangers). Et, plus important encore, grâce à leurs retombées (impact) sur les attitudes et les comportements des acteurs, des figurants et des spectateurs que nous sommes, jeunes et vieux, femmes et hommes. Ils ont montré et démontré que, dans ce pays, les projets les plus lourds et les «plus fous» peuvent être entrepris pour peu qu'il y ait un minimum de moyens matériels et financiers, un maximum de volonté politique et de confiance et, aux commandes, les meilleures des compétences et des expériences. On a donc eu, presque en même temps (quel hasard?bien calculé), les 29èmes Jeux sportifs méditerranéens d'Oran, jeux qui ont vu certes toute une ville et son peuple vibrer nuit et jour, dans une ambiance de folie, de liberté et de tolérance, au rythme des compétitions, des manifestations culturelles et des victoires, rejoints en cela par la majorité du peuple algérien, d'ici et d'ailleurs. Un exemple qui sera très certainement suivi lors d'autres Jeux et/ou compétitions sportives et culturelles, et en d'autres lieux.

Puis, ce fut le formidable défilé militaire à l'occasion du 60ème anniversaire de l'Indépendance. Tout y était ! Aucun incident ou simple couac. L'Algérie a montré, certes, sa force mais aussi et surtout son efficacité avec un défilé millimétré, et sans accrocs, que ce soit sur terre, en mer ou dans les cieux.

Ici et là, on a eu la démonstration qu'il est possible de réussir même les tâches les plus difficiles avec, certes des moyens bien huilés mais, aussi et in fine, de l'effort, de l'organisation, de la rigueur, de la discipline et une morale basée sur l'amour du pays et un grand sens civique. Pourvu que ça dure ! Avec le souhait de voir désormais l'exceptionnel faire partie de l'ordinaire.