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Le G5 n'est plus!

par Abdelkrim Zerzouri

Le retrait du Mali du groupe G5 et de la force militaire conjointe de lutte contre le terrorisme au Sahel, officiellement pour cause d'opposition de certains Etats à sa présidence, une présidence tournante qui lui échoit depuis la fin du mandat du président tchadien en février dernier, n'est pas une surprise en soi. Mais la secousse laissera certainement des dégâts sur les fondations de ce cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité.

Un G5 qui a perdu de sa puissance durant ces derniers mois, depuis l'éclatement de la crise entre Paris et Bamako, l'entrée en scène sur le sol malien du groupe Wagner, ainsi que les coups d'Etat militaires qui ont touché trois pays sur les cinq qui composent le G5, en l'occurrence le Burkina Faso, le Tchad et le Mali. Cette situation, qui a créé une grave crise entre les pays de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), en sus du retrait de la force militaire française Barkhane du Mali révèlent autant d'éléments précurseurs de la crise au sein du G5.

Et l'arrivée de Wagner sur le terrain, auquel s'oppose énergiquement la France, ainsi que d'autres pays engagés militairement au Sahel, ne peut que lui apporter le coup de grâce, aujourd'hui ou demain. Sommes-nous, ainsi, en présence d'une reconfiguration du paysage sécuritaire en matière lutte contre les groupes terroristes, ou le G5 deviendra-t-il un G4, voire même un G3, et continuera d'occuper le terrain dans cette région désertique qui constitue l'un des refuges les plus sûrs pour les criminels et les groupes terroristes ?

En tout état de cause, le G5, tel qu'il a été formé en 2014, n'existe plus après le retrait du Mali. Certains observateurs ne voient pas d'inconvénient à ce retrait du Mali, estimant qu'il ne va pas peser sur le terrain pour plusieurs raisons, dont celle liée à son absence ces derniers temps dans la lutte contre le terrorisme, qui a permis aux autres pays de s'adapter à cette situation.

Mais, il y a encore d'autres changements dans l'air qui concernent l'hostilité de plus en plus marquée contre la présence française dans la région, et qui augurent d'une remise en cause des fondements d'un cadre institutionnel de coordination et de suivi de la coopération régionale en matière de politiques de développement et de sécurité, vraisemblablement dépassé par l'évolution géostratégique qui marque de son empreinte la région du Sahel.

Hier c'était le Mali, aujourd'hui ce sont les populations au Tchad qui manifestent leur rejet de la présence militaire française dans leur pays, et à qui le tour demain ? Sûr que l'Algérie suit de près le développement des événements, qui lui donne raison au moins sur un point, le fait d'avoir refusé dès le départ, en 2014, de faire partie de cette organisation. Aussi, ces profonds remous rapprochent plus le Mali de l'Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, signé le 20 juin à Alger, dont la mise en œuvre était depuis recommandée par les autorités algériennes, et aujourd'hui soutenu par la Russie, les Etats-Unis et la France.