Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Quel avenir pour les entreprises publiques ?

par Kamal Guerroua

Comment revitaliser les entreprises publiques? Comment les rendre plus productives sur le marché de l'emploi? Quelles sont les stratégies concrètes que l'exécutif d'Aïmene Benabderrahmane compte adopter pour redonner de la vigueur au tissu économique du pays? Récemment, lors de la discussion du plan d'Action dans l'hémicycle de l'APN, le Premier ministre reconnaît que les entreprises publiques sont devenues un véritable fardeau pour l'Etat.

Rien qu'à voir les 20 milliards de dollars de dépenses étatiques de ces dernières trois décennies en leur faveur et les budgets consacrés à leur soutien ainsi qu'à l'assainissement de leurs dettes, on se rend compte que le chemin est encore long pour le décollage économique d'un secteur public en agonie. Pour preuve, la majorité des entreprises publiques sont restées dans une situation difficile, alors que l'enveloppe financière affectée à leur assainissement entre 1991 et juin 2021 s'élève à près de 2790 milliards de DA. Une somme colossale avec laquelle l'Algérie aurait pu se doter de nouvelles infrastructures, susceptibles de rattraper rapidement son sous-développement. Or, ce pactole consommé par des dizaines, voire des centaines d'entreprises publiques déficitaires, endettées et proches de la faillite, n'a servi pratiquement à rien.

Et pour sauver les emplois, l'Etat n'a eu pour alternative que de sortir le chéquier à chaque fois que la situation l'exige. Une recette qui ne peut plus durer, malheureusement. Le Premier ministre table sur la relance économique. A ce titre, il a promis de revoir les modalités de gestion des entreprises publiques et leur gouvernance, en exigeant d'elles des contrats de performance stricte. S'inscrivant dans une stratégie de récupération des potentialités du fleuron des entreprises publiques pour en faire un levier sûr de création de richesses, l'exécutif compte faire un recensement national des différentes entreprises en état de fermeture ou de stagnation.

Pour Aïmene Benabderrahmane, il est inconcevable de voir l'aspect commercial/productif d'une entreprise publique composée de 600 travailleurs, alors que l'autre aspect administratif est de 1000 travailleurs! Tout cela fait perdre, selon lui, des milliers d'emplois et la fermeture de centaines d'entreprises. La question qui revient avec insistance : comment est-il encore possible pour l'Etat de réhabiliter des entreprises étatiques ayant déjà démontré, pendant des décennies, leur improductivité et leur incapacité à être rentables ? 20 milliards de dollars sont déjà perdus, rien que pour maintenir en vie beaucoup d'entre elles en quasi faillite!

Le gouvernement n'en a-t-il pas tiré des leçons utiles? A vrai dire, selon plusieurs expertises, un peu plus de 1. 400 entreprises publiques, dotées d'environ 10.000 filiales toutes organisées en sociétés par actions dont l'Etat est l'unique actionnaire, pâtissent de graves problèmes financiers, au point que leurs commissaires aux comptes ont officiellement prononcé leur dissolution. En 2010, le ministère des finances faisait état de plus de 800 EPE en faillite (actifs nets négatifs), qu'il faut impérativement mettre sur le marché de la privatisation, au risque de causer un énorme préjudice aux finances publiques. Dix ans plus tard, rien n'y fait, faute de feuille de route sérieuse.