Le
prix Nobel de la paix, attribué en 2020 au Programme alimentaire mondial (PAM),
est-il le plus conforme à l'esprit et à la lettre du testament d'Alfred Nobel,
paraphé en 1895, qui souligne qu'il doit être attribué chaque année à « la
personne qui aura le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à
la suppression ou à la réduction des armées permanentes et à la tenue et la
promotion des conférences de paix » ? Contrairement aux années précédentes, où
ce prix est devenu synonyme de controverses au sujet de la justesse du choix du
comité Nobel norvégien, souvent considéré indue, ou que celui auquel il a été
attribué ne le mérite tout simplement pas à cause de ses positions ultérieures
ou antérieures en négation avec les valeurs véhiculées par cette médaille,
cette année 2020 fait une bien belle exception. Personne n'a trouvé à redire
avec l'attribution de ce prix à une organisation mondiale qui a fait de la
lutte contre la faim son crédo, avec 97 millions de personnes aidées dans
environ 88 pays en 2019, et qui s'est hissée à la première place parmi les
organisations humanitaires mondiales de lutte contre la faim. Certes, en cette
exceptionnelle année 2020, il n'y avait pas de favoris éclatants, ou qui
sortent du lot parmi les 318 candidats qui ont été enregistrés par le comité
Nobel norvégien, dont 211 individus et une centaine d'organisations, mais
personne n'a parié un sou sur la PAM pour décrocher la médaille. Qui pouvait bien, en effet, miser sur cette organisation discrète
mais qui permet à des millions de personnes à travers la planète de ne pas
dormir le ventre vide, face aux poids lourds médiatiques, comme la Suédoise
Greta Thunberg, la figure de proue du mouvement
Fridays For Future pour le climat, l'ONG américaine Comité pour la protection
des journalistes (CPJ), l'OMS, le mouvement pro-démocratie de Hong Kong,
l'activiste saoudienne des droits des femmes Loujain
al-Hathloul, la chancelière allemande Angela Merkel,
le président américain Donald Trump et de nombreux
autres noms dévoilés par leurs parrains ? Mais, le comité Nobel
norvégien a fait son choix, décrivant l'organisation humanitaire PAM comme «
une force motrice des efforts de prévention face à l'utilisation de la faim
comme arme de guerre et de conflit ». Un prix qui n'est pas une fin en soi,
mais au contraire un commencement renouvelé en matière de lutte contre la faim
dans le monde, car ce combat ne peut pas avoir de fin, pas tant qu'on
continuera encore à parler de la faim, jusqu'en 2030, horizon fixé par la
communauté internationale pour éradiquer la faim. Un pari encore plus difficile
à gagner avec l'apparition de la pandémie du Covid-19 et ses fâcheuses
conséquences économiques, qui ont entraîné de larges pans des populations à
travers le monde entier dans la pauvreté et la précarité. En cela, le prix
Nobel de la paix 2020, attribué au PAM, sonne comme un défi à la faim, un appel
incessant en faveur de la solidarité avec les plus démunis et à
l'intensification des efforts pour mobiliser des fonds, surtout en ces moments
de grande détresse instaurés par la propagation du Covid-19, dont on mesurera
les retombées néfastes sur le bien-être de l'humanité durant les prochaines
années.