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Les importateurs face à leur destin

par Abdelkrim Zerzouri

Est-il possible de transformer les importateurs en capitaines d'industrie ? C'est une visée de la nouvelle dynamique économique, résolument tournée vers la production locale et une réduction substantielle des importations à travers des mesures qui permettraient à l'Algérie d'économiser des milliards de dollars avant la fin de cette année. Lors d'une rencontre, samedi dernier, avec les producteurs et importateurs des fournitures scolaires, qui s'inscrit dans le cadre des préparatifs de la rentrée scolaire, le ministre du Commerce, Kamel Rezig, a explicitement invité les importateurs investis dans ce créneau de penser sérieusement à transformer leurs activités et tirer profit de leur expérience dans le domaine de l'importation pour investir localement puis exporter.

Soulignant dans cette optique que l'Algérie s'apprête à s'ouvrir sur un marché prometteur, en l'occurrence l'Afrique, ainsi que les avantages et incitations offerts par le secteur du Commerce aux exportateurs. A travers les importateurs investis dans le domaine des fournitures scolaires, l'invitation est adressée à tous les importateurs, sans exception, qui devraient songer à faire le saut vers la création des richesses à travers des investissements productifs locaux, de préférence, pour eux et pour l'économie nationale, dans le même créneau d'importation dont ils maîtrisent les bouts. Est-ce de l'utopie que de vouloir pousser au changement des hommes d'affaires habitués à faire tourner leur argent dans des circuits qui génèrent des bénéfices du tac au tac ? Pas facile, faut-il en convenir, particulièrement sur le plan du bagage intellectuel requis pour devenir capitaine d'industrie, ou même par impatience de certains qui ne pourraient attendre un retour sur investissement sur le moyen et long terme. Mais une partie des importateurs possède les capacités nécessaires pour s'adapter au nouveau «plan de relance économique et social» du gouvernement visant à réduire la dépendance au secteur de l'énergie et à ouvrir l'économie aux investisseurs qui sont restés à l'écart en raison de la bureaucratie et d'un manque d'incitations. En tout cas, le nouveau cap économique pose un choix fondamental pour les importateurs, être ou disparaître. La baisse de la facture d'importation, qui est passée de 46,33 milliards USD en 2018 à 41,93 milliards USD en 2019, et qui va encore diminuer de 20 milliards USD à la fin de l'année en cours, va réduire d'une manière drastique le champ d'activité de l'import/import et pousser les opérateurs à faire leur mue ou garder en position de gel leurs capitaux, et les regarder fondre comme neige en subissant les contrecoups de l'inflation, la dévaluation de la monnaie ou juste en dépenses courantes. Il est également dans l'intérêt des entreprises étrangères qui grossissaient leurs chiffres d'affaires grâce aux importateurs algériens, et qui vont immanquablement se retrouver avec un énorme manque à gagner dû au repli de l'importation, l'encouragement et la protection de la production locale, de se tourner vers le partenariat gagnant/gagnant en Algérie, en nouant des relations avec des opérateurs locaux. Et pourquoi pas leurs propres clients importateurs ?