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Un autre casse-tête de fin d'année pour Mohamed Ben Salmane

par Reghis Rabah*

Le pari de Mohamed Ben Salmane de drainer de l'argent de l'étranger, en général, et de l'Occident, en particulier, dans le cadre de son programme de réforme 2030, est raté car le géant Aramco n'a pas attiré grand monde cette troisième semaine de novembre.

Les préparatifs fortement soutenues par les américains entamées il ya plus de deux ans pour assainir la NOC afin de l'introduire en bourse avait à l'époque, notamment au début de l'imagination de nombreux investisseurs étrangers au point que lors de sa première visite au royaume après son élection, Trump dans l'euphorie des nombreux contrats qu'il venait d'obtenir s'est vu obligé de faire tout ce qui est en son pouvoir pour que la vente des actions s'effectuerait aux Etats Unis. Dans ses premiers Tweet en novembre 2017, il écrivait «J'apprécierais beaucoup que l'Arabie saoudite fasse son entrée en bourse d'Aramco à la Bourse de New York » Aujourd'hui, la Saoudienne Aramco non seulement fuit New York et d'autres marchés internationaux ,en tant que lieu de cotation, mais a décidé de ne pas commercialiser l'introduction en bourse auprès d'investisseurs américains, canadiens, européens ou japonais. Au lieu de cela, Aramco envisage de s'appuyer fortement sur des Saoudiens ultra-riches, donc du sérail princier dont beaucoup ont été pressés d'investir, pour conclure l'accord par le biais de leur propre bourse TADAWUL. Les banques saoudiennes assouplissent la réglementation en matière de prêt pour permettre aux habitants d'acheter davantage d'actions. L'introduction en bourse a déjà été présentée comme le plus puissant signe de changement économique en Arabie saoudite: cet accord devait attirer des dizaines de milliards de capitaux étrangers dans le royaume. Au lieu de cela, une vente d'actions allégée commence à ressembler davantage à un prélèvement sur l'économie du pays, les investisseurs saoudiens, grands et petits, prenant la place des gestionnaires de fonds étrangers. Il s'agit peut-être encore de la plus importante introduction en bourse au monde, générant peut-être environ 25 milliards de dollars et valorisant la société en baisse entre 160 à 170 milliards de dollars, bien au-dessus des plus grands noms de la Silicon Valley par exemple. Mais cela ne représente pas les 100 milliards de dollars que le prince héritier saoudien Mohammed Ben Salmane a déclaré espérer amasser lors de sa première introduction en bourse en 2016. Il visait alors une valorisation d'au moins 2 00 milliards de dollars. L'Arabie saoudite dirige depuis un certain temps l'introduction en bourse vers une concentration accrue sur les investisseurs régionaux, uniquement pour sauver la face. Pourquoi ? Les observateurs disent que la demande occidentale s'est refroidie suite au risque géopolitique et la conduite du royaume par le jeune prince dans les affaires scabreuses comme l'assassinat du journaliste le 2 octobre 2018 de Washington Post ou cette guerre qu'il mène contre les Houthis au Yémen. En effet, depuis 2015, l'Arabie saoudite, avec l'appui des États-Unis, s'est investie au Yémen contre un régime qu'elle estime récalcitrant et trop proche de l'Iran. C'est surtout une guerre aérienne menée par des bombardements massifs contre des cibles au sol, et malheureusement contre la population yéménite. Un grand nombre d'écoles, de centres hospitaliers et d'infrastructures ont été détruits, causant dans ce pays un véritable désastre humanitaire. On estime que plus de 20 000 raids ont à ce jour causé la mort de 10 000 personnes, en grande majorité des civils. Entre-temps, 8 des 28 millions de Yéménites sont selon l'ONU victimes de la famine, qui a déjà causé la mort de plusieurs milliers de personnes, en majorité des enfants. Diverses tentatives de médiation proposées par l'ONU ont visé principalement l'établissement de « corridors humanitaires » se sont avérées vaines. Depuis longtemps, le Yémen est le parent pauvre de la région du Golfe, alors que l'Arabie saoudite et d'autres pétromonarchies comme les Émirats et le Koweït regorgent des richesses tirées de la production pétrolière. Des centaines de milliers de Yéménites travaillent dans ces pays riches dans des conditions misérables. Malgré diverses tentatives de reconstruire un espace régional pour réduire les disparités, l'Arabie saoudite a maintenu le cap, bien que soient apparus dans les dernières années de nombreux signes avant-coureurs de la crise actuelle. L'explosion du mécontentement dans la région qualifiée de « printemps arabe » a contaminé le Golfe, notamment Bahreïn, où une révolte populaire a été écrasée par l'Armée saoudienne appelée de plus en plus à jouer le rôle d'un gendarme régional. Par la suite, la monarchie s'est fortement investie dans la guerre civile en Syrie pour appuyer diverses factions islamistes jugées par Riyad et Washington comme des candidats valables à la succession du régime de Bachar al-Assad. L'énorme chaos qui a suivi, avec des centaines de milliers de victimes et des millions de personnes jetées sur les routes, est le résultat de cette foire d'empoigne finalement remportée, dans la violence extrême, par le régime syrien et ses alliés russes et iraniens. C'est dans ce contexte que l'Arabie saoudite s'est jetée dans la fournaise yéménite depuis maintenant trois ans.

1-Pourquoi Trump encourage cette guerre

Avec son allié l'Arabie Saoudite, les Etats Unis sous Trump qualifient l'espèce de gouvernement qui règne sur des parties du Yémen de menace mortelle, d'autant plus que les rebelles houthis, qui dirigent une coalition hétéroclite, sont appuyés par l'Iran. Dans le fond, le conflit au Yémen est devenu une guerre par procuration, avec l'objectif d'empêcher l'Iran et ses alliés de renforcer son influence dans la région. Pour Riyad, il faut absolument consolider le rôle du pays comme « gendarme régional », capable de mener des conflits de grande intensité, en concordance avec les intérêts des États-Unis dans la région. À Washington, on a pensé qu'une alliance inédite entre l'Arabie saoudite, Israël et d'autres régimes autoritaires de la région pourrait fermer le verrou, isoler l'Iran et reprendre le contrôle d'une région plongée dans un profond chaos. Mais à cette date, le plan n'a pas fonctionné. La situation est donc grave pour l'Arabie saoudite, aux prises d'ailleurs avec une grave crise économique découlant de la baisse des prix du pétrole, qui compte pour 90 % de ses exportations. À rebours, cette crise affecte les États-Unis, dont la puissante industrie d'armements dépend en partie des achats saoudiens d'avions supersoniques et d'autres équipements sophistiqués, qui sont à vrai dire inutilisés par l'armée saoudienne faute de personnel compétent. C'est ce qui explique l'incapacité de cette armée à vaincre quelques milliers de combattants houthis relativement peu armés, mais qui, pire encore, déstabilisent le royaume par des tirs de missiles primitifs, aggravant ainsi les désordres économiques et le sentiment de découragement qui traverse ce pays jusqu'à maintenant choyé.

2- L'affaire Khashoggi suit le jeune prince comme une ombre

Comme l'année dernière à quelques jours prés de la même date, sur demande expresse de son père le roi Salmane, Mohamed Ben Salmane va entreprendre un périple dans le monde en commençant par ses alliés du Golfe. Il est attendu à Alger ce premier décembre 2019. Comme l'année dernière, l'argent ne peut pas tout acheter. Toutes ses visites ont été fortement sécurisées et gênent quelques peu l'establishment en place en le mettant en difficulté vis-à-vis de sa population qui conteste sa visite. L'élite politique et intellectuelle là où il est passé se trouve partagée entre ce qu'il faut penser en privé et ce qu'il faut dire en public par courtoisie diplomatique. C'est certainement ce qui explique que l'Egypte lui a réservé un accueil spectaculaire lundi 27/11/2018. Le maréchal Al-Sissi l'attendait à sa descente d'avion avec tapis rouge et fanfare militaire, et les médias locaux ont diffusé des images d'Egyptiens brandissant des drapeaux saoudiens sur la place Tahrir au Caire lors du passage de son convoi. La Tunisie quant à elle devait chambouler le protocole pour le faire accueillir à sa descente d'avion par le feu président Beji Caïd Essebsi en personne. Pourtant le jeune prince Mohamed Ben Salmane(MBS), entouré d'une équipe de conseillers américaine, a attendu le feu vert du président Donald Trump pour entamer son périple de réhabilitation dans le monde.

Le 21 novembre dernier, le rapport de la CIA lui accordait le bénéfice du doute qui fait dire au président américain dans un de ses Twitt « nous nous saurons sans doute jamais si le prince est au courant ou pas dans son implication dans l'assassinat du journaliste Khashoggi » et d'ajouter cinglant « peut être, peut être pas ».Voilà comment on plie une affaire si gravissime soit-elle ! Le lendemain, un communique du cabinet du royaume livre un programme de visite du jeune prince pour 6 pays puis une participation au G20.Une visite prévue auprès de six pays arabes : les Émirats arabes unis, Bahreïn, la Tunisie, l'Égypte, l'Algérie et la Mauritanie, mais pas le Maroc, seul pays du Maghreb ainsi boudé par MBS. Pourquoi? A cause de Qatar? D'autres sources disent que c'est le roi Mohamed VI qui ne veut pas le recevoir ? Si son allié dans sa guerre au Yémen lui a roulé le tapis rouge, il n'est pas le bien venu au pays du Maghreb où les sociétés civiles, syndicats, certains partis politique dont l'islamiste Algérien lui réserve un accueil humiliant. Réagissant à la campagne médiatico -politique ayant visé Mohammed ben Salmane en particulier et le royaume saoudien en général suite à ce crime odieux, Le ministère des affaires étrangères Algérien (MAE) de cette époque par le biais de son porte parole a souligné que «l'Algérie, qui est liée à l'Arabie Saoudite par des relations étroites de « fraternité », de coopération et qui partage avec elle un destin commun, exprime sa conviction que la « justice » saoudienne saura faire toute la lumière sur ce meurtre». Même si la présidence devait corriger le tir à la veille de sa visite très timidement médiatisée, il se trouve que l'un et l'autre restent politiquement corrects et visiblement dans l'embarras. Il ne retrace pas les réalités des relations diplomatiques entre les deux pays sur au moins les plans évoqués.

3- de la relation fraternelle en question

Historiquement, les relations entre Alger et Riyad n'ont jamais été au bon fixe jusqu'à l'arrivée de Bouteflika en 1999. Au temps de Boumediene, les Saoudiens qualifiaient le peuple algérien de peuple athée. Par ce préjugé, ils ont privé la cause algérienne en 1956 de la seule voie qui manquait pour son inscription à l'ordre du jour de l'assemblée de l'ONU. Les années 80, leur offensive pour diminuer les prix du baril du pétrole devait faire un ravage aux pays dont les économies étaient fortement dépendantes des recettes pétrolières. Pour contrecarrer l'apparition des marchés spots (fixation libre du prix au jour le jour) des prix qui dépassent les prix officiels et qui est une conséquence directe du 2e choc pétrolier lié à la révolution iranienne et de la crainte de pénurie de pétrole brut, est instauré en 1985 le principe de la marge fixe par baril vendu aux raffineurs (netback policy), principe pervers qui conduira à l'effondrement des prix; c'est le contre-choc pétrolier de 1986, qui a mis l'Algérie en particulier à genoux. Le prix du baril était descendu en dessous de 10 dollars, au point où Kasdi Merbah, Premier ministre de l'époque, a appelé les autorités saoudites pour les rappeler «qu'elles étaient en train de nous enlever le pain de la bouche». Plus tard, Ce qui était connu concernant le financement du terrorisme en Algérie, en Syrie et ailleurs par certains pays du Moyen-Orient fait l'objet de témoignages de plus en plus nombreux et de preuves tout aussi irréfutables. Cette fois, c'est l'ancien directeur des services de renseignements internes français, Bernard Squarini, qui témoigne sur le rôle du Qatar et de l'Arabie Saoudite dans le financement du terrorisme. Selon lui, les groupes djihadistes qui ont prêté allégeance à Al Qaïda sont financés principalement par le prince saoudien Bandar Ben Sultan (secrétaire général du Conseil de sécurité nationale et chef des renseignements généraux d'Arabie Saoudite) qui adopte une politique régionale indépendante de ses frères et ses cousins.

Ce chef des renseignements saoudiens est derrière le financement des groupes djihadistes en Afghanistan, en Syrie, au Liban, en Egypte, au nord de l'Afrique. Il a noté en outre dans ce livre que le Qatar, grand partenaire commercial et politique de la France, est impliqué par le financement, voire l'armement des groupes islamistes combattant en Afrique contre l'armée française. Pour camoufler et faire passer le soutien logistique et entraîner les groupes djihadistes.

L'Arabie Saoudite a un rôle dans le financement et l'entraînement des groupes extrémistes, particulièrement au nord de l'Afrique, voire en Algérie. Anna Marie Lisa, présidente honoraire du Sénat belge, accuse, quant à elle, ouvertement l'Arabie Saoudite « d'œuvrer à déstabiliser volontairement les frontières sud de l'Algérie à travers, notamment, le financement des salafistes et djihadistes ». « L'Algérie, et par le rapt de ses diplomates à Gao, a payé pour avoir combattu le terrorisme durant les années 1990 », selon elle. « Les auteurs du rapt se sont, en particulier, attaqués au symbole de l'Algérie, en la personne des diplomates enlevés », explique-t-elle. Eric Denussy, directeur du Centre français de recherches sur le terrorisme et ancien officier des services secrets, tire la sonnette d'alarme : « La situation est très grave. L'Algérie est considérée par le Qatar et l'Arabie Saoudite et par l'alliance entre les USA et les Frères musulmans, comme le domino qui n'est pas tombé et qui doit tomber, coûte que coûte ».

Il accuse l'Otan d'avoir reconfiguré le terrorisme dans la région du Sahel, avec l'intervention militaire engagée dans ce pays. 2014, le royaume a mené une guerre des prix, pour dit -on récupérer ces parts de marchés conquises par les producteurs américains de schiste en inondant le marché de brut sans penser aux dommages collatéraux qu'il a laissé dans les économies fortement dépendantes des recettes pétrolières comme le Venezuela et l'Algérie dont on connait la situation difficile dans laquelle il se trouvent actuellement.

4-Une ingérence dans les positions politiques de l'Algérie

Cette ingérence continue au nom de l'approche salafiste de la religion a contraint pour la première fois dans l'histoire des relations de l'Algérie avec ce royaume de refuser l'accès à un prédicateur de toute évidence gênant. Pour que la diplomatie se mêle d'une affaire banale de rentrée et de sortie d'un territoire, c'est la preuve par 9 de l'influence des Chouyoukhs dans la conduite de la stratégie politique de ce pays. N'arrivant pas à digérer le refus du gouvernement algérien de classer comme organisation terroriste le mouvement de résistance libanais contre le sionisme, le Hezbollah en l'occurrence, le royaume wahhabite lance son «offensive médiatique» contre l'Algérie.

La chaine intégriste SAFA devait donner la parole à un prédicateur virulent qui a publiquement déverser son venin pour déclarer à qui veut l'entendre que l'Algérie est un pays «traitre» pour, bien entendu, n'avoir pas accepté de mettre en application la feuille de route sioniste dans la région et dans le reste du monde musulman.

« Le gouvernement algérien a trahi la révolution syrienne et les musulmans ». Il est avec les autorités syriennes qu'il soutient et appuie. « Il est aussi avec les sionistes contre l'islam et les musulmans » selon ce prédicateur. Lors des événements de Ghardaïa, il s'est ingéré dans un conflit algéro-algérien pour appeler via sa chaine satellite IQRA carrément à l'extermination de la communauté Ibadites de la région. Sa diplomatie tente de présenter l'Algérie comme bénéficiant des relations privilégiées avec le royaume alors qu'il a mis son économie à genoux et à deux reprises. La passivité de la diplomatie Algérienne a laissé la porte ouverte à des interrogations de toutes sortes : Ce pays dispose- t-il de dossiers sérieux sur des hommes politiques qui investissent dans les pays du Conseil de Coopération du Golfe dont le royaume est le leader ? Cache-t-il des choses que le pouvoir ne veuille pas qu'elles soient divulguées ? En tout cas, pourquoi ce silence face à cette ingérence par un jeu paradoxal des uns et des autres ? Il faut peut-être souligner que les wahhabites ne ratent pas l'occasion pour ramasser les bons points des principales puissances. Depuis l'amorce de la crise économique mondiale, le recyclage des pétrodollars de l'Arabie Saoudite vers le trésor américain, ajouté aux contrats juteux avec la France dans le domaine de l'armement et l'aviation civile l'ont emportés sur les droits de l'homme.

Aujourd'hui, les Etats-Unis et la France qui se vantent de promouvoir les droits de l'homme dans le monde et se montrent en donneurs de leçons, se sont vivement plantés en soutenant justement un pays qui les transgressent au vu et au su du monde entier. En effet, la polémique avait suscitée une rage qui a fait exploser les réseaux sociaux le 4 mars de l'année 2016 lorsque François Hollande avait remis ce titre à celui qui figure comme étant l'un des plus grands bafouilleurs des droits de l'homme dans le monde, la légion d'honneur au prince héritier et ministre de l'intérieur de l'Arabie saoudite « au titre de personnalité étrangère », en l'occurrence Mohammed Ben Nayef. Tout de suite une célébrité française programmée de la recevoir devait refuser de se présenter pour exprimer sa colère. Cette actrice réputée franche n'a pas mâché ces mots en fustigeant cette décoration. Il se trouve désormais qu'elle n'était pas la seule une autre la carrément rendue comme le célèbre anthropologue Alain Nicolas.

C'est presque la goute qui a fait déborder le vase après la nomination de c e pays le 21 septembre 2015 à la tête de la commission consultative des droits de l'homme onusienne, institution qui reste sous les feux de virulentes critiques. Comme l'a confirmé l'ONG UN Watch, l'ambassadeur de Riyad auprès des Nations unies, Faiçal Trad, devait présider ce groupe. Au sein du Conseil des droits de l'homme, le « groupe consultatif » a été chargé de sélectionner les rapporteurs en charge de thématiques précises comme les camps de travail en Corée du Nord ou les violences faites aux femmes ainsi que d'autres sujets liés au droit de l'homme et que justement ce pays ne respecte pas en premier lieu. Ces travaux serviront ensuite de base au Conseil des droits de l'homme pour émettre des recommandations.

5-de la justice dont l'Algérie fait confiance

La monarchie saoudienne est l'une des plus dures au monde. Il n'y a ni constitution ni code pénal dans ce pays mais uniquement l'application du Coran et de la jurisprudence islamique (interprétation, sunna, hadith et Essira etc.). Dans l'application de cet arsenal juridique, les avocats ne plaident pas mais s'attaquent les uns aux autres à coup de fatwas. Une police composée de chouyoukhs surveillent le comportement des citoyens dans leur vie quotidienne et dénonce leur moindre déviation de la ligne religieuse sunnite. Sur le plan de l'application de la Charia, de nombreux analystes et observateurs ont relevé une certaine dureté de son application par rapport à Daech. En trois mois de janvier à mars, le royaume wahhabite a exécuté 70 personnes, dont 47 en une seule journée, le 2 janvier dernier. Parmi ces condamnés à mort, le plus souvent décapités au sabre sans aucun respect de leur corps et à l'insu de leurs familles, des criminels de droit commun, mais aussi des opposants. L'Arabie saoudite a exécuté 153 personnes, contre 87 en 2018. Entre janvier 1985 et juin 2019, au moins 2 208 personnes ont été victimes de la peine de mort, parmi lesquelles plus d'un millier d'étrangers, des mineurs et des handicapés mentaux. En somme, même si on est attardé mental dans ce pays, on reste tout de même responsable de ses actes.

*Consultant, économiste pétrolier