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Rassemblement devant le tribunal de Sidi M'hamed: Ouverture du procès des 42 détenus du Hirak

par M. Aziza

Le procès de 42 détenus poursuivis pour «atteinte à l'unité nationale» soit pour le port de l'emblème Amazigh, ou pour avoir brandi des pancartes hostiles au régime, s'est ouvert hier au tribunal de Sidi M'hamed. La comparution des détenus devant le juge s'est poursuivie tard dans la journée, face à une forte mobilisation de soutien. Plus d'une centaine de personnes se sont rassemblées près du tribunal pour exiger la libération des détenus, dont la majorité a été interpelée lors du Hirak. Sur les 42 détenus arrêtés dans la quasi-majorité lors des marches du mouvement populaire des 21 et 28 juin dernier, deux sont des femmes, en l'occurrence la militante du RCD Samira Messouci et l'étudiante Nour El Houda Yasmine Dahmani, âgée de 22 ans.

La juridiction a ainsi présenté les détenus sur la base de 10 dossiers et chaque dossier regroupait un groupe de détenus. Le premier groupe comptait 7 détenus, dont la majorité a été poursuivie pour l'exhibition de l'emblème amazigh. Les avocats de la défense ont tout fait pour convaincre le juge que l'emblème amazigh est un référent identitaire qui ne menace nullement l'unité nationale. «Au contraire, il consolide et soude l'unité des Algériens et l'unité de l'ensemble des pays de l'Afrique du Nord», souligne-t-on.

Sous les applaudissements tolérés par le juge, les avocats de la défense ont relevé des contradictions par rapport aux accusations. «On n'arrive pas à comprendre, on reconnaît la langue amazighe, on reconnaît dans la Constitution la dimension identitaire berbère, on a officialisé Yennayer en tant que fête nationale, mais on ne tolère pas l'emblème amazigh». D'autres avocats qui étaient en force s'interrogeaient devant le juge comment expliquer que des détenus poursuivis pour «atteinte à l'unité nationale», en vertu de l'article 79 du code pénal, ont été libérés dans d'autres wilayas du pays, mais pas à Alger. Certains avocats ont précisé devant le juge qu'aucun texte de loi ne prévoit l'arrestation et l'emprisonnement d'une personne pour le port d'un emblème autre que le drapeau national. Il s'agit pour eux d'une manœuvre politique pour casser le Hirak, considérant les détenus comme des «otages d'une manœuvre du pouvoir».

Bien que le procureur de la République ait requis 2 ans de prison ferme et une amende de 100.000 DA à l'encontre du premier groupe composé de 7 personnes, les avocats se sont montrés confiants, ils parlaient de la possibilité de relaxe des détenus dans le hall du tribunal.

L'avocat Benyoub Djamel a affirmé devant la presse que «c'est un procès équitable. Les accusés, que nous considérons comme des otages, ont pu parler en toute liberté devant le juge». Pour lui, la justice algérienne doit saisir cette opportunité d'ouverture et de liberté, fruit du Hirak. Il a exprimé son optimisme quant au sort des détenus au même titre que l'avocat Mustapha Bouchachi, ainsi que l'ensemble des avocats de la défense. Ils étaient tous unanimes à l'affirmer. «Cette journée sera historique pour la justice algérienne, elle va marquer le début d'une véritable indépendance de la justice, une fois les jeunes manifestants seront libérés».