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Tarifs de l'électricité et du gaz: Les subventions seront révisées

par Ghania Oukazi

«Les décès sont causés par el maroob, ce n'est pas la faute au gaz !» «Fini l'agent qui n'est pas au guichet ! Fini la surfacturation !

Plus de coupure d'électricité pour les clients fidèles !

Dès que nous ferons des études et ciblerons les ménages, la subvention profitera uniquement à ceux qui la méritent !»

Ce sont les remarques faites et les instructions données hier par le ministre de l'Energie aux responsables de Sonelgaz et à ceux des agences affiliées. Mustapha Guitouni était présent à la rencontre que la Creg (Commission de régulation de l'électricité et du gaz) a organisée hier au CIC Club des Pins Abdelatif Rahal en présence des hauts cadres du secteur ainsi que ceux des associations nationales de protection et de défense des consommateurs. «Je ne vous ai jamais vu, pourtant le pays a beaucoup besoin de vous», a-t-il lancé aux associations présentes dès sa prise de parole. Il leur recommande de suite de «coordonner vos efforts et de vous concerter entre vous, c'est important qu'il y ait de la cohésion entre nous, on doit communiquer, ensemble, on peut faire beaucoup de choses pour le pays, il faut qu'on s'écoute entre nous, personne ne peut faire quelque chose tout seul, nous nous engageons avec vous pour travailler ensemble». Il enchaîne sur le sujet : «Le gaspillage de l'électricité a des conséquences très graves sur la société, le consommateur doit l'utiliser d'une manière raisonnable».

Il recommande aux usagers «économisez l'énergie, changez et diminuez l'éclairage, on doit s'organiser !» Il fait savoir que «ce gaspillage, l'Etat lui consacre 2 milliards de dollars par an». Il explique qu' «entre janvier et juin, la consommation de l'électricité est en général de 700.000 à 800.000 MW mais entre juin et août, ça augmente en flèche, en septembre on revient à la norme, on gagne un supplément qu'on peut commercialiser, si on ne gaspille pas, on peut gagner une vingtaine de milliards de m3 de gaz qu'on peut exporter, tout est lié».

«Un prix réel de l'électricité, après des études et un ciblage»

Pour la tarification de l'électricité dans le secteur de l'agriculture, le ministre précise qu'«il y a des tarifs pour heures creuses et d'autres pour heures pleines, pour éviter le gaspillage». Il affirme à propos de la réduction de 65% du prix au profit des habitants du Sud que «la loi est appliquée, on ne joue pas avec ça ! Les gens du Sud ont appris à économiser, on voit la courbe.» Il souligne ainsi que «le compteur compte tout, même les veilles des démos, des postes téléviseurs, le nombre d'ouverture des réfrigérateurs...». Un intervenant (briquetier) conseille de construire «avec les règles ISO, avec des matériaux isolants parce que le bâtiment consomme 41% d'énergie alors que l'industrie en consomme 19%, l'agriculture 7% et l'hydraulique 33%». Guitouni répond «la loi existe, prochainement, le bâtiment fera partie de la transition énergétique, il peut participer à hauteur de 20% dans l'économie d'énergie ».

Au responsable d'une association qui a fait part «du choix médiocre (classe E) des appareils importés, ce qui fait de l'usager une victime et non un gaspilleur», le ministre relève que «c'est au ministère du Commerce de contrôler, ce qui est fait pour tous les produits mais parfois on a affaire à des importations frauduleuses...» Un responsable du secteur a précisé pour sa part qu' «en 2018, on a enregistré un taux de perte de l'électricité de 12,8% alors que les années d'avant il était de 18 et 20%, on doit arriver à la norme de 6 ou 8%, cette perte est due surtout à la vétusté des équipements».

Le ministre ne manquera pas de noter que «le citoyen paie 4 DA et l'Etat paie les 8 DA restants du prix réel de l'électricité». Il réfute cependant «le fait de toucher à la poche des usagers en leur faisant payer le prix réel» parce que, dit-il, «personne ne sera d'accord». Il indique que «125 KW constituent la tranche sociale que l'Etat garantie aux usagers». Est-ce que tout le monde doit en bénéficier ? interroge-t-il. «Non, bien sûr, on doit l'accorder pour ceux qui en ont besoin», dit-il. Il explique à cet effet que «pour ce qui est des subventions, on va les réviser dans un cadre légal par un ciblage des ménages, on ne peut laisser les choses telles qu'elles sont, la subvention doit profiter à ceux qui la méritent». Le projet de loi est, dit-il, «chez le gouvernement, qu'on aura fait nos études, on les changera, mais pas maintenant».

Aux nombreuses questions qui lui ont été posées par les associations sur les divers aspects des problèmes rencontrés par les consommateurs en matière d'alimentation ou de raccordement en électricité et en gaz, de facturation, de coupures intempestives(...), celle des nombreux décès de citoyens à cause du monoxyde de carbone sera placée en tête de liste. Le ministre répondra avec une fermeté rare. Guitouni déplorera en premier «le mauvais emplacement des chauffe-eau et des chauffages». Il estime ainsi que «le problème n'est pas le gaz mais el maroob, le monoxyde de carbone, il faut des installations agréées avec un certificat de conformité».

«Ce n'est pas la faute au gaz mais aux citoyens»

Sonelgaz n'est, pour lui, «responsable en rien de ces décès, ce sont les citoyens qui sont inconscients du danger des choses mal faites». Il réprouve «ceux qui font des réaménagements dans leurs appartements, changent les installations sans respecter les normes et consignes de sécurité ou les bouches d'aération et d'évacuation, et même s'il fait très froid, ce n'est pas une raison pour que les citoyens n'aèrent pas leurs appartements. S'il recommande à la Sonelgaz d'«effectuer des visites tous les deux ans pour vérifier l'état des installations» et d'être une «Sonelgaz citoyenne en déployant des efforts pour que les accidents du monoxyde de carbone n'arrivent pas», il pense surtout que «les citoyens doivent prendre leurs précautions, c'est comme pour les accidents de la circulation, qui en est responsable ?!?» Il ordonne qu' «à partir d'aujourd'hui, il faut qu'il y ait des certifications des installations».

Aux responsables d'associations qui lui ont proposé de faire installer des détecteurs de gaz par la Sonelgaz, Guitouni répondra «ce n'est pas une prérogative de la Sonelgaz, c'est comme si vous lui demandez de vendre des démos ! Le seul détecteur, c'est la prise de conscience des citoyens.» Il donne cependant son aval pour «équiper les appareils de détecteur, je ne vois pas d'inconvénient, mais seul l'homme peut vérifier l'état des équipements qu'il a, il faut la maintenance». Il demande aux associations «sensibilisez avec nous ! Chaque jour ! Partout ! On peut même employer des femmes pour sensibiliser les femmes chez elles.» Il avoue néanmoins que «la sensibilisation commence dans les écoles» et fait part «d'une coordination entre la Sonelgaz et le secteur de l'éducation». Le directeur général de la Creg a noté dans son allocution d'ouverture que «des mesures ont été prises dans le cadre de la sensibilisation sur les risques liés à la mauvaise utilisation de l'énergie gazière». Il a noté que «le non-respect des règles de sécurité édictées par la réglementation a engendré un nombre alarmant de 64 décès comptabilisés uniquement dans le mois écoulé ».

Le ministre note au passage que «le gaz est aujourd'hui partout, on ne parle plus de gaz de ville mais de gaz de campagne, ça n'existe qu'en Algérie, ailleurs on fait peser une tomate pour l'acheter, chez nous on en a honte, ce n'est pas normal».

Interrogé sur la surfacturation, le ministre de l'Energie rétorque sèchement «elle n'existe plus ! Ce n'est plus l'agent qui relève les compteurs mais il y a uns système.» Il affirme en outre que «c'est fini le temps où les usagers rouspètent à propos d'une facture et les agents leur disent de payer et on va en discuter, l'agent doit aller vérifier tout de suite avec le client et doit le convaincre, s'il y a lieu de revoir, il faut revoir, celui qui ne le fera pas ne fera plus partie de la Sonelgaz, la surfacturation, c'est terminée, c'est une affaire classée !» Guitouni recommande par ailleurs de «ne plus couper l'électricité ou le gaz aux clients fidèles en cas de non-paiement de factures». Il explique que «les clients qui paient régulièrement leurs fractures, on ne doit pas leur couper, par contre on coupe pour celui qui traîne, on a demandé à la Sonelgaz d'établir un fichier des clients(...).» Il promet «on va le faire, ça doit s'appliquer». Il affirme que «70% des clients paient leurs factures dans les délais, c'est une relation de confiance qu'on a avec eux, au cas où ils tardent à payer pour une fois, au lieu qu'on leur accorde les 15 jours réglementaires, on leur ajoute une ou deux semaines».