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Boomerang

par Mahdi Boukhalfa

L'Algérie, tout comme les pays de la rive sud de la Méditerranée, est depuis quelque temps pilonnée par la diplomatie européenne sur le délicat dossier de l'immigration clandestine. L'UE comme ses pays membres sont revenus à la charge pour demander crûment aux pays d'origine de reprendre leurs ressortissants en situation illégale dans l'espace européen. La chancelière allemande Angela Merkel s'est chargée de l'exprimer les yeux dans les yeux aux responsables algériens. Auparavant, c'était le président français de faire la même requête de rapatriement des ressortissants algériens en situation illégale dans l'Hexagone. Le rush de milliers de réfugiés syriens, irakiens, afghans et ressortissants d'Asie mineure, dans le sillage de l'embrasement du conflit en Syrie et les massacres ethniques en Irak, avait provoqué une grande panique dans les milieux xénophobes et racistes au sein de l'ensemble européen. Une Europe terrorisée d'être, à son tour, la proie du terrorisme, que ces milliers de réfugiés et de clandestins venus également d'Afrique sont accusés de faire peser sur la sécurité au sein d'un ensemble pas tellement solidaire face aux grandes mutations régionales. Les démarches actuelles de plusieurs capitales européennes, dont l'Italie, pour que le phénomène migratoire en provenance du Maghreb et d'Afrique soit maîtrisé, contenu, sont pathétiques. L'UE envisage même de «rétribuer» les bons collaborateurs de sa politique de «containment» de l'immigration clandestine et, dans la foulée, demande même l'assistance des pays de la rive sud concernés par les mesures de reconduites aux frontières de leurs ressortissants. Dans la foulée, l'UE est en train de se blinder contre les vagues migratoires, de pratiquement construire un mur de défense contre les tentatives d'incursion de ces milliers de postulants à l'eldorado européen. Après les mesures de lutte contre l'immigration clandestine des années 2000 - 2010, les systèmes de défense en mer et sur terre avec le dispositif Frontex, l'UE en est venue à demander l'installation de camps de rétention dans les pays de transit. Mais, dans toutes les capitales européennes, qui veulent se prémunir dorénavant contre l'immigration clandestine, l'objectif tracé au milieu des années 2000, qui consistait à aider les pays émetteurs à mieux assurer leur développement économique, a été oublié en cours de route. Maintenant, il est trop tard pour lutter contre un phénomène devenu planétaire, comme il est hypocrite d'occulter la panique qui s'est emparée des politiques européens, au sein de ceux qui ont soutenu depuis le début l'opposition syrienne, dont des franchises terroristes actuellement en pleine débâcle. Et qui va fatalement tenter de trouver refuge en Europe. Car, l'Europe a peur des retombées, catastrophiques pour sa sécurité, de la reprise en main des autorités syriennes de la situation dans le pays. La trop grande implication de plusieurs pays européens dans le conflit syrien est une donnée non pas aléatoire mais réelle dans cette crise, qui dure depuis 2011 et qui a, elle aussi, provoqué des vagues de réfugiés qui n'ont de pareilles que ce qui s'est passé en 1994 au Rwanda. Ce qui explique en grande partie cette peur soudaine des Européens qui veulent se défaire des étrangers «illégaux». Leur crainte est que le mélange entre les ressortissants de plusieurs pays, dont ceux venus de Syrie, et notamment d'anciens membres de franchises terroristes que l'UE avait fourni en armes, provoque la naissance de foyers durables de terroristes potentiels en Europe.