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L'euro, entre l'offre et la demande et les autres restrictions

par Houari Barti

Après avoir franchi la barre symbolique des 190 DA pour un euro, début février, l'Euro s'est d'abord stabilisé, sur les places du marché parallèle, aux alentours des 189 DA, avant d'entamer, ces derniers jours, une courbe descendante qui le place actuellement aux environs des 184 DA. Le marché reste cependant très volatil, suscitant inquiétude des uns et prudence des autres. Si certains cambistes ont réalisé de très bons profits durant cette période de fluctuations, d'autres, en revanche, ont été contraints de revendre à perte dans un exercice qui s'apparente de plus en plus à un jeu de loterie où même les acteurs les plus avertis du marché semblent ne disposer que de peu de marge d'anticipation. Le marché de la devise s'affole laissant le champ ouvert à toutes les spéculations qui tentent, autant que faire se peut, d'apporter des pistes d'explications. Parmi ces dernières, celles liant cet effet yoyo à l'incontournable règle de l'offre et de la demande. Une baisse de l'offre au détriment de la demande serait donc, selon cet avis, à l'origine de toutes ces fluctuations. Difficile, toutefois, de confirmer ou d'infirmer cette thèse sur le terrain, tant les avis divergent sur la question.

Espagne: Des restrictions bancaires pour les non-résidents

Cependant, un fait majeur, signalé par plusieurs opérateurs économiques, mérite toutefois qu'on s'y attarde tant il offre une perspective nouvelle d'analyse de cet affolement du marché national de la devise. Un fait à chercher du côté de la rive nord de la Méditerranée, en Espagne notamment, où des détenteurs de comptes bancaires algériens non-résidents font l'objet de restrictions. Impossible d'effectuer des retraits dépassant un certain plafond : 2000 euros dans certaines banques, 3.000 dans d'autres, à moins de justifier par un dépôt de plusieurs pièces la raison de ce retrait, affirment les mêmes sources. Selon eux, la menace grandissante du terrorisme après les derniers attentats de Paris coïncidant avec l'arrivée sur le sol européen de vagues importantes de migrants, a poussé plusieurs capitales européennes, dont l'Espagne, à appliquer avec beaucoup de rigueur la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme.

En 2010 déjà, la loi 10/2010 du 28 avril 2010 sur la prévention du blanchiment d'argent et le financement du terrorisme a été adoptée en Espagne. Elle réglemente le fonctionnement et la coordination des deux commissions concernées: la commission sur la surveillance du financement du terrorisme, présidée par le secrétaire d'Etat à la Sécurité du ministère de l'Intérieur, et la commission sur la prévention du blanchiment d'argent, présidée par le secrétaire d'Etat à l'Economie. En janvier 2013, la commission sur la surveillance du financement du terrorisme a tenu sa première réunion depuis l'entrée en vigueur de la loi 0/2010. En outre, l'Espagne a conservé sa législation antérieure sur la prévention du financement du terrorisme et les gels des avoirs, y compris la loi 12/2003 du 21 mai 2003 qui prévoit la possibilité de geler tout type de flux financier ou de compte pouvant être utilisé pour financer des actes terroristes, ainsi que la possibilité d'enquêter sur des transactions ayant un lien particulier avec le financement du terrorisme. A cela il faut ajouter la directive (UE) 2015/849 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l'utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme. Ces activités de gel et d'investigation sont menées en Espagne sous l'autorité d'un organe qualifié spécialisé, la commission sur la surveillance du financement du terrorisme. Par ailleurs, l'Espagne fait partie de la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, signée à New York le 9 décembre 1999. Une réglementation qui devra mettre sous la loupe tout mouvement de capitaux à destination de l'Europe, à fortiori les transferts illicites de devises en provenance de l'Algérie estimés, selon le directeur général des douanes, M. Kaddour Bentahar, à 14 milliards de dinars en 2015, soit l'équivalent de 140 millions d'euros. Des infractions à la réglementation des changes qui ont représenté un total de 134 dossiers, tous transmis à la justice.

En 2014, les services des douanes avaient déjà noté «une hausse fulgurante de ce type d'infractions commises par des importateurs fraudeurs», représentant un montant de 52 milliards de dinars contre 21,8 milliards de dinars en 2013, soit une hausse de 147%».