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Crise libyenne : L'ONU appuie l'option algérienne

par Moncef Wafi

L'organisation terroriste «Etat islamique» (Daech) et la situation en Libye des milices islamistes qui ont pris le contrôle du pays sont au sommet des inquiétudes internationales si on se fie au baromètre des intérêts des puissances occidentales. Si le dossier de Daech est pris en charge par Washington qui a levé une coalition internationale pour lui faire front en Irak et en Syrie, le cas libyen semble plus préoccuper la France et l'Algérie. Deux visions qui convergent pour trouver une solution au conflit libyen entre, d'une part, le discours de Paris appelant à une mobilisation internationale pour une intervention militaire en Libye, comme cela fut le cas pour le dossier malien, et d'autre part la position intransigeante d'Alger qui privilégie, comme sortie du conflit, la solution interne par le biais d'un dialogue inclusif inter-libyen à l'image également de la sortie de crise malienne sous égide algérienne. Une position sans cesse défendue par Alger et qui vient de recevoir un appui de poids avec la déclaration, ce dimanche, du secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, qui a appuyé, à partir de New York le rôle de médiation que joue l'Algérie pour la stabilisation de la situation en Libye mais également au Mali et dans le Sahel. Le SG de l'ONU s'est exprimé sur le dossier libyen en marge de la 69ème session de l'Assemblée générale des Nations unies, lors d'un entretien avec le chef de la diplomatie algérienne, Ramtane Lamamra, auquel ont pris part de hauts responsables onusiens. A ce propos, la mission de l'ONU en Libye (UNSMIL) a proposé hier la tenue en Libye, le 29 septembre, d'une réunion de dialogue pour mettre un terme à l'anarchie institutionnelle dans ce pays profondément divisé. Seront invités à cette réunion, les délégations qui représentent les différentes parties du conflit libyen. Selon l'UNSMIL, la réunion doit aboutir à un accord sur le règlement intérieur de la Chambre des représentants et sur «d'autres questions liées à la gouvernance» du pays. Un accord devrait également être trouvé sur un lieu et une date pour la passation du pouvoir entre le Congrès général national (CGN) dominé par les islamistes et la Chambre des représentants, reconnue, ainsi que le gouvernement d'Abdallah al-Theni, par la communauté internationale, mais contestés par une coalition de groupes armés, notamment islamistes et de la ville de Misrata. Ces milices de la coalition «Fajr Libya» ont formé un gouvernement parallèle à Tripoli, dirigé par Omar al-Hassi. Le ministre des Affaires étrangères algérien s'est par la suite entretenu avec le secrétaire général adjoint des Nations unies chargé des Affaires politiques, Jeffrey Feltman, sur des sujets liés notamment à la sécurité et la stabilité dans la région du Maghreb et au Sahel. M. Lamamra a développé, lors d'une conférence-débat, au Centre d'études stratégiques et internationales (CEIS), à Washington, le rôle de l'Algérie en matière de sécurité au Maghreb et au Sahel, plus particulièrement où il a indiqué que l'Algérie a, depuis toujours, apporté son «soutien» aux pays de la région dans des dossiers liés à la lutte contre la sécheresse, la famine, l'insécurité, le terrorisme et le crime organisé.

L'intransigeance d'Alger

Il a tenu à rappeler à cette occasion la position d'Alger guidée par «le principe de non-ingérence» dans les affaires intérieures des Etats voisins. A propos de la Libye, le ministre des Affaires étrangères a tenu à réitérer le rejet de l'Algérie de toute intervention militaire étrangère ainsi que son attachement à une solution consensuelle à travers un processus politique inclusif. Toujours dans le même contexte, le ministre délégué, chargé des Affaires maghrébines et africaines, Abdelkader Messahel, est arrivé dimanche soir à New York pour participer à la 5ème réunion ministérielle du Forum global de lutte contre le terrorisme, dont les travaux débuteront aujourd'hui. Des travaux qui seront consacrés notamment à l'examen des questions de l'heure entre la situation au Sahel et en Afrique, l'EI et le financement du terrorisme en relation avec le renforcement des mécanismes internationaux pour le tarissement de ses sources, en particulier le trafic de drogues et le paiement des rançons. Un dossier auquel Alger accorde un grand intérêt puisque qu'elle avait proposé le 3 septembre dernier à Nairobi, lors du dernier sommet du Conseil de paix et de la sécurité de l'Union africaine (UA), consacré au terrorisme et à l'extrémisme violent, la tenue à Alger d'une réunion de haut niveau sur le tarissement des sources de financement du terrorisme. Le dossier du paiement des rançons, rappelons-le, a été dernièrement au centre d'une intervention critique du président américain qui reprochait aux Français de payer les rançons pour la libération de leurs ressortissants aux mains des groupes armés, ce qui alimentait les caisses d'Al Qaïda et de ses succursales régionales. Le quotidien américain «New York Times» estimait cet été que la France avait versé 58,1 millions de dollars depuis 2008 pour libérer ses ressortissants détenus par Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).

Par ailleurs, et sur le plan interne, conscient de la sensibilité du dossier libyen et de ses répercussions directes ou indirectes sur la situation en Algérie, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a présidé ce dimanche, une réunion sur la situation sécuritaire aux frontières méridionales et orientales de l'Algérie et ses efforts pour la paix et la stabilité au Mali et en Libye avec la participation de hauts responsables civils, militaires et des services de sécurité.