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Notre supplément économie avec la collaboration de «MAGHREB EMERGENT» : Ne produisez pas, consommez !

par Salim Rabia

En dix ans, le chocolat «made in là-bas» a écrasé le «made in ici». Que s'est-il passé entre deux temps ? Un temps perdu sans mise à jour, ni mise à niveau, où l'on a fait ce qu'on a l'habitude de faire : pomper ici et importer là-bas. Les chiffres du chocolat n'ont rien d'astronomiques mais ils sont bien révélateurs d'une situation où produire est ennuyeux et importer gratifiant. Bien entendu, le chocolat «dialna» est imbattable sur les prix et cela lui donne une petit part de marché, celle des petites bourses? Mais les Tunisiens, fort entreprenants, ont déjà gagné la bataille du biscuit, pourraient bien battre «l'imbattable». Dans l'Algérie «riche» des nantis, 40 millions de dollars, c'est une bricole? On peut le concéder? Mais, c'est bien à petite échelle, une illustration d'un immobilisme local qui se fait déborder par le dynamisme extérieur. Sur une échelle beaucoup plus lourde, on peut regarder avec une certaine compassion la façade d'une Bourse algérienne où il arrive un «évènement» tous les deux ans. Il y a bien la société NCA Rouiba qui arrive en ce début de belle saison à la Bourse? Mais? On le sait tous, une hirondelle ne fait pas le printemps. Et le privé algérien, même s'il a vocation à y être, ne peut pas faire, en l'état actuel de l'Algérie, la Bourse à lui tout seul. Dans les cartons, il y a des idées ? prudentes ? pour que les entreprises publiques cèdent une partie de leurs actions en bourse sans affecter la part majoritaire de l'Etat. Pourquoi ne pas le faire ? Certains diraient que ce serait la porte ouverte à la privatisation totale? L'argument est vieux. Aussi vieux et dépassé que la «propriété privée exploiteuse» que personne n'ose plus ? pas même le PT ? n'ose plus mettre en avant. Mais on sait qu'une entrée en Bourse avec des actionnaires non-étatiques obligera à de la transparence et à des comptes. C'est-à-dire, en peu de mot, à une gestion moderne. Tout le monde le sait mais on n'en tire aucun enseignement. On croit toujours que l'immobilité préserve. Et alors que dans le domaine de l'audiovisuel, les choses bougent partout dans le monde et que nos voisins progressent? on a un projet de loi de l'audiovisuel qui verrouille. Comme pour le chocolat, l'Etat Algérien à force de vouloir protéger nos oreilles et nos vues de choses indésirables pousse tout le monde à écouter et à regarder vers le made in ailleurs. Et pour l'audiovisuel ? comme pour l'internet ?, c'est encore plus facile que pour le chocolat. Les produits ne passeront pas par le port ou la douane. Ne produisez pas, consommez ! C'est cela le message paradoxal d'un pays plongé dans un sommeil paradoxal.