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Il s'agit d'élire qui ?!

par El-Houari Dilmi

Question à une urne piégée : s'agit-il d'élire nos mères ou nos maires ?! La preuve que le changement ne viendra pas par le bas, pourquoi, dix lustres après le retour du soleil de la liberté, s'acharne-t-on à construire une belle maison sur des fondations bâclées ?

Parce que, parait-il, pour les joutes électorales du 29 novembre prochain, 70 pour cent des candidats à la gestion «cahoteuse» de la chose publique locale sont des NSNLNE, comprendre «Ne Savent Ni Lire Ni Ecrire». Comme quoi, dans un pays où aller à l'école n'est pas le meilleur moyen de se faire un nom, dans le marigot des «potabilités» locales, plus on descend dans l'échelle (sans filet) des responsabilités, moins on a besoin de faire des études ; puisque le peuple d'en bas n'a pas besoin d'aller au paradis? la tête ou la cervelle pleine (s). Un peu comme ce politicard qui a fait quatre ans de droit et toute sa carrière? de travers ! Autre preuve que le jacobinisme de mauvais aloi a de beaux jours devant lui, à quoi ça sert d'élire un maire si ce dernier n'est toujours pas capable de lire correctement une loi, comprendre comme il se doit un texte, ou même noter sur son calepin ce qu'il doit faire le lendemain. Soumis à l'implacable «travail de la moulinette» de la part de ceux que vous savez, de nombreux candidats à la candidature ont été «recalés» pour cause de B2, c'est-à-dire des délits «risibles» comme non paiement d'un procès-verbal d'infraction au code de la route, d'une pension alimentaire non versée à son ex-épouse, et même pour «comportement immoral ou incivique». Comme quoi, prétendre faire de la politique, c'est un peu comme aller à la Mecque : être le plus clean possible, dans un pays où tout le monde ne fait pas ses ablutions. Théoriquement premiers dépositaires «régaliens» de l'autorité de l'Etat, nos maires sont-ils à ce point si «légers» face à plus «lourds» qu'eux, au point que nos P/APC sont les moins considérés dans le monde impénétrable de la politique, avec rémunérations indignes d'un émargeant au filet social ?! Contrairement à sa mère qui fait de son ménage sa petite république à elle, a-t-on vraiment besoin d'un maire «instruit» quand sa mission première est de nettoyer nos rues sales, ramasser les ordures ménagères, de préférence à l'heure du coq, badigeonner les murs décrépis de la ville, déboucher les avaloirs qui n'avalent plus rien, tailler les arbres qui s'arrachent les cheveux au moindre vent, assister les citoyens qui ne mangent pas à leur faim, ou réponde illico presto à une convocation du préfet, jaloux de son pouvoir, à ne jamais grignoter. L'année dernière encore, plus de la moitié de nos édiles avaient menacé de remettre le tablier pour protester, rapportaient les journaux en grosses manchettes, contre le nouveau code communal en discussion (sans eux) à l'APN.

Dans un pays où les premiers magistrats locaux font tout sauf leur job, le pays sortira-t-il de ses ornières avec une organisation institutionnelle qui fait du paradigme tenace du nivellement par le bas une sorte de «constante» dans la gestion des affaires publiques ? Même si les élections locales, pour des raisons sociohistoriques sont réputées coller à la peau des électeurs plus que les autres «moustahakates» nationales, le désintéressement affligeant de la rue pour le 29 novembre n'augure rien de bon, dans une contrée où confier, avec science et conscience, sa destinée aux autres, n'est pas une «tradition» à proprement parler. Ici cette «renversante» confession d'un ex- maire à méditer à reculons :

«Je suis un maire qui saigne sang et sueur pour assurer le bienfait des citoyens sans pouvoir le faire. Ils sont comme ça, ils ne savent que critiquer. De toute façon j'étais comme eux quand je n'y étais pas»? N'est-il pas vrai que le chemin le plus court pour tester son honnêteté, auprès du peuple d'en bas, est de se présenter aux élections, le visage et les mains nus ?!!!