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Avec un cumul de 5 milliards de DA, l'enthousiasme turc pour l'Algérie fléchit à l'investissement

par Malek Bechir

140 entreprises turques travaillent en Algérie. Le cumul de leurs investissements ne dépasse cependant pas 5 milliards de dinars - 50 millions d'euros. Cela est faible rapporté aux ambitions commerciales d'Ankara en Algérie, affichées lors de la première foire aux produits turcs organisée la semaine dernière à Alger. L'échelle de l'investissement turc en Algérie pourrait changer très vite avec le projet métallurgique de Tosyali. La réserve reste cependant de mise face au capharnaüm algérien.

La fierté des Turcs en Algérie s'appelle Tosyali Holding. Cette multinationale va investir 500 millions de dollars pour construire et développer une aciérie électrique et un laminoir à Béthioua, près d'Arzew. Sa livraison est prévue pour 2013 avec à la clé, la création de plus de 1000 emplois directs. L'histoire de Tosyali n'est qu'un exemple de la politique d'investissement offensive que la Turquie a décidé de mener en Afrique, sur un terrain déjà très convoité par les Européens et surtout? les Chinois. Les Turcs l'ont bien compris : pour développer le statut de partenaire stratégique que l'Union africaine leur a attribué en 2008 et s'afficher comme une puissance économique régionale, ils doivent afficher leur différence. «Ce que nous fabriquons est de meilleure qualité que ce que proposent les Chinois et équivalent aux standards européens avec qui nous avons l'habitude de travailler, tout en étant moins chers», résume Aysun Yilmaz, de la Chambre de commerce d'Istanbul. Les entreprises turques en Algérie, très présentes dans la construction -à l'image d'Atlas qui a remporté plusieurs marchés pour des logements sociaux, des hôtels ou des bâtiments gouvernementaux ou Özgün Insaat, à qui ont été confiés des chantiers d'aménagement de routes ou de voies ferrées- ont aussi misé sur les biens de consommation. Bifa a ainsi ouvert une biscuiterie à Constantine et Beko a investi dans une usine de montage d'appareils électroménagers à Alger. Le plus bel exemple de pénétration du marché restant Hayat Kimia. Installée à Blida depuis 2005 où elle fait tourner aujourd'hui deux usines, la holding s'est récemment félicité du succès de ses produits (couches, mouchoirs, javel, détergents?) auprès de la ménagère algérienne et projette d'ouvrir une nouvelle usine de fabrication de papier, l'emballage étant une des branches dans laquelle les Turcs souhaitent investir à court terme. Au total, l'investissement des quelque 140 entreprises turques actuellement en activité est estimé par Hayati Yazici, le ministre turc du Commerce et des Douanes, à 5 milliards de dinars.

Un chiffre encore en dessous des espérances des Turcs qui comptent aussi jouer sur la proximité géographique et culturelle pour développer les partenariats avec leur voisin algérien.

«ENCORE TROP D'OBSTACLES BUREAUCRATIQUES»

«L'Algérie est un pays très stratégique pour nous, c'est la porte de l'Afrique, reconnaît Ahmet Necati Bigali, ambassadeur de la République de Turquie. Nous avons un passé commun, une histoire commune, des similitudes culturelles, qui nous rapprochent.» Les Algériens, qui ont signé avec les Turcs un accord de coopération et d'amitié en 2006, ne demandent pas mieux. Les investisseurs turcs s'étant, par ailleurs, engagés à assurer le transfert de technologie et de savoir-faire, particulièrement recherché par les Algériens dans le domaine de l'hydraulique, des travaux publics et du bâtiment. Mais si Tahar Khellili, président de la Chambre algérienne de Commerce et d'Industrie s'est félicité samedi lors de l'inauguration de la première foire des produits turcs en Algérie, de «l'allègement des procédures administratives» en mettant en avant l'attractivité du programme national de développement économique pour les investisseurs étrangers, il reste la réalité. Celle de la bureaucratie. Et en coulisses, les investisseurs turcs, comme les autres, s'en plaignent. «Nos dirigeants nous incitent à investir en Algérie, c'est vrai, confie l'un d'entre eux, mais nous sommes réticents à le faire car il y a encore trop d'obstacles à l'ouverture d'une entreprise?»