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Quand la responsabilité ne suffit pas et l'autorité fait défaut !

par Lakhdar Boukerrou*

(Première partie)



Pourquoi parle-t-on de responsabilité et d'autorité dans le domaine du management ? Pour la simple raison que ces deux aspects vont de pair pour une gestion optimisée et efficace d'un service, d'une administration

ou d'une université.

De prime abord, il est clair et logique que chaque employé doit avoir l'autorité de prendre des décisions. Cependant, la responsabilité sans autorité est un problème généralisé dans certaines organisations qui souffrent du manque de performance et de prises de décisions efficaces et appropriées. Un employé (cadre, agents, etc.) qui se retrouve avec des responsabilités et pas ou peu d'autorité va vers l'échec dans son travail. Ce genre de situation empêchement la bonne gestion et fait de telle sorte que le manager ne fait que gérer le quotidien car ses subordonnes n'ont pas de responsabilités bien définies ne peuvent pas prendre de décisions. Le manque de délégation sclérose beaucoup d?organisations comme démontré par le nombre de subordonnés qui rentrent et sortent du bureau de leur manager chaque heure, jour après jour. Tout ce va et vient incessant, qui défie le bon sens, représente des pertes énormes et ne donne pas le temps à un responsable et à son équipe de penser à long-terme, de définir des stratégies, de revoir les procédures du service, etc. autant de choses critiques pour améliorer le fonctionnement d'une organisation.

Cet article est consacré à l'autorité, il sera suivi prochainement d'un second sur la responsabilité. Il ne faut surtout pas confondre autorité avec responsabilité. Du point de vue management, la différence entre les deux est claire et bien définie.

Selon Chester Barnard (1886-1961), le célèbre manager américain, « L'autorité est le caractère d'une communication (ordre) dans une organisation formelle, en vertu de laquelle elle est acceptée par un contributeur ou un membre de l'organisation comme régissant l'action qu'il contribue ; c'est-à-dire comme gouvernant ou déterminant ce qu'il fait ou ne fait pas, en ce qui concerne l'organisation. »

L'autorité« désigne un pouvoir formel, institutionnel ou légal dans un emploi, une fonction ou un poste particulier qui permet au titulaire de cet emploi, de cette fonction ou de ce poste d'accomplir avec succès sa tâche ». Alors que la responsabilité est « l'obligation d'un subordonné d'accomplir une tâche qui lui a été confiée par son supérieur » ou de s'acquitter de son travail quotidien come définit par sa fiche de poste qui en principe détermine ses responsabilités.

Plus particulièrement, l'autorité consiste en quoi ?L'autorité est absolument nécessaire pour l'accomplissement des tâches et la productivité des employés dans une organisation. La personne qui détient l'autorité a le droit d'influencer le comportement de ses subordonnés et l'exécution de leurs activités pour atteindre les objectifs de son organisation. Au sein d'une organisation, le manager, dans le cadre de ses prérogatives, peut instruire ses subordonnés d'agir ou les empêcher d'agir d'une certaine manière par rapport aux activités qu'ils exercent et des responsabilités qu'ils leur sont attribuées. Dans ces cas-là, la prise de décision fait partie de l'autorité. Il ne faut pas oublier que le manager a aussi des responsabilités car il rend compte à son supérieur comme illustré dans l'exemple plus bas.

L'autorité peut être caractérise par les trois aspects suivants :

1. Elle peut être subjective car un manager peut baser ses décisions sur des aspects non mesurables. La personnalité de ses subordonnés ou tous autres aspects qui ne peuvent pas être mesurés objectivementmais qui sont pris en compte par un manager lors de sa prise de décision. Cette décision peut aussi être influencé par des aspects socio-économiques, culturels, éducatifs, etc.

2. Elle permet à la personne qui la détient de prendre des décisions. Dans ce contexte la prise de décision n'est jamais démocratique. Le manager doit prendre sa décision en fonction des informations, et connaissances qu'il détient et en assumer la responsabilité qui en découle. La prise de décisionsans la prise en compte de l'avis des autres est généralement la raison pour un échec avéré. Ceci induit des pertes de temps et de ressources y compris financières. Nous n'allons pas donner d'exemples car ils sont tellement nombreux les cas où des décisions irréfléchies ont été prises pour ensuite être annulées.

3. Elle pousse les subordonnes à accomplir leurs tâches au sein d'une organisation comme déterminées par leur manager. Dans un tel environnement, un manager se doit de mesurer la performance de ses subordonnés en fonction des taches qui leur sont assignées.

Ce genre d'approches n'a pas encore trouve sa place dans beaucoup d'organisations car la performance n'est pratiquement jamais mesurée.

On sait que l'autorité donne une certaine légitimité. Elle est acceptée parce qu'elle a une certaine validité, elle acquiert le droit à son utilisation sur la performance des subordonnés. Un tel droit à plusieurs sources - légal, formel, tradition, authenticité. L'autorité d'un manager lui est conféré pour influencer le comportement de ses subordonnés en fonction de son rôle ou de sa fonction dans l'organisation.

La théorie avancée par des chercheurs tels que Harold Koontz(1909-1984) et Cyril O' Donnell(1900-1976) stipule que l'autorité est détenue à travers trois sources : (1) l'autorité formelle ; (2) l'autorité qui est accepté ; et (3) l'autorité due à la compétence. Examinons de plus près chacune de ces théories.

L'autorité formelle :Elle est dévolue à une personne en raison du poste qu'elle occupe au sein d'une organisation. Par exemple, un directeur a une certaine autorité, un sous-directeur a aussi une certaine autorité dans le cadre de sa fonction qui est différente de celle du directeur.

L'autorité acceptée : Cette théorie stipule que les subordonnés acceptent l'autorité d'un manager et sa capacité de prendre des décisions à cause de son poste. Ce genre d'autorité est le meilleur témoignage de la compétence d'un manager car ses subordonnés acceptent ses ordres pour le bien de leur organisation.

L'autorité due à la compétence : Cette théorie est basée sur les compétences techniques et managériales qui forment lefondement de l'autorité. Une autorité basée sur la compétence ! Dans certains cas, des personnes compétentes n'ont aucune autorité formelle mais à cause de leur compétence leurs collègues écoutent leurs conseils et les considère comme des ordres indirects.

Malgré ce que l'on pense de chacune de ces théories, il ne faut pas oublier que l'autorité découle principalement d'une structure formelle au sein d'une organisation. Dans les organisations où très peu de choses ne marchent, aucune des trois théories sur l'autorité n'est ni acceptée ni utilisée.

Dans certain cas, ceux qui ont l'autorité ne l'exerce pas ou très peu pour améliorer la performance de leur organisation. Ce qui résulte en un statuquo et un manque de performance et de rendement ainsi que des pertes financières et une démobilisation et démotivation du personnel.

Malheureusement, dans certaines structu-res privées et publiques, beaucoup de responsables, agents et autres ont la responsabilité de s'acquitter de leurs taches mais très peu, si ce n'est pas du tout, ont l'autorité qui leur permet de prendre des décisions.

Les décisions qu'il faut pour rentabiliser leur temps et leurs efforts afin de servir les besoins de leurs clients, étudiants, personnel ou autres personnes qui ont besoin de leurs services. Dans d'autres cas, ce pouvoir de décision ne leur est pas conféré par leur supérieur ou ils ne veulent pas prendre de décisions par crainte de commettre des erreurs, ce qui revient à ne pas exercer leur pouvoir de décision. Combien de lecteurs et lectrices ont fait face à ce genre de situation ?Prenons l'exemple d'un subordonné qui se réfère à son supérieur ou à sa tutelle pour des choses très banales. Dans des cas pareils nous pouvons citer deux raisons pour ce comportement : (1) le subordonné craint de prendre des décisions parce qu'il n'est pas sûr de lui ou n'a pas les capacités nécessaires d'effectuer son travail convenablement (manque de formation) ; (2) le superviseur ne lui a pas donné de pouvoir de décision car il veut maintenir le control à son niveau (une façon de se donner de l'importance et contrôler ses subordonnes, donc une entrave au service).

Dans ces deux cas de figure, c'est la responsabilité du superviseur de former ses agents et de leur donner les pouvoir de décision qui va avec la responsabilité afin et de leur permettre de prendre les décisions idoines pour le bon fonctionnement du service.

Combien de fois avons-nous entendu « le Chef de Service est absent, je ne peux pas vous aider, revenez lors de la journée de la réception du publique. »Vous devez donc « prendre votre mal en patience » et revenir dans une semaine. Un bon superviseur ne doit pas être indispensable pour le bon fonctionnement de son service.

Il doit bien définir les responsabilités de chacun de ses subordonnes et délégués une partie de son pouvoir de décision donc de son autorité.Si ses subordonnes doivent se référer à lui a tout temps cela prouve son incompétence flagrante.

L'autorité doit être exercée de façon très judicieuse et contrôlée afin d'éviter qu'elle soit abusée par des responsables peu scrupuleux. Comme l'a si bien dit John Emerich Edward Dalberg-Acton (1834-1902) « le pouvoir tend à corrompre, le pouvoir absolu corrompt absolument » remplaçons pouvoir par autorité. Et voilà ! En conclusion, l'autorité doit être bien exercée et avoir des limites si on la veut efficace et juste.

A suivre...

*Dr. Director International Programs and Global Initiatives College of Engineering and Computing Florida International University Miami, Florida, United States