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SENTENCE DE MORT

par Abdou BENABBOU

Il est inconcevable que l'esprit soit dérouté, malmené, torturé quand on apprend qu'un accident de la circulation en plein cœur d'une cité urbanisée ait pu tuer plusieurs personnes. Qu'un choc entre deux véhicules dans une intersection puisse provoquer quelques dégâts matériels peut se comprendre et les incidents du genre font partie des regrettables aléas quotidiens de la circulation. Mais s'ils causent des morts dans des ronds-points ou des intersections au sein des cités urbaines, on est en droit de déduire que ce sont les extrêmes folies qui sont aux volants des automobiles et que des imbéciles conducteurs slaloment dans les rues d'une ville uniquement pour tuer.

Ce phénomène grandissant de jour en jour sans commune mesure ne relève plus de l'incivisme seulement, mais doit être considéré comme un sujet du ressort de la psychiatrie auquel une partie de la société doit être soumise. Les causes des comportements désobligeants sont aisément décelables car on devine avec facilité les lourdes préoccupations qui taraudent les cervelles d'une large tranche d'automobilistes dont l'esprit est encombré par un fouillis de soucis et de problèmes qui atrophie l'attention et le jugement. Ce lourd tribut d'embêtements et de charges envahissant les cerveaux est devenu ni plus ni moins que l'étalage d'une carte de visite d'une société humaine malade.

Mais dans ce magma social terni, une nouvelle forme de terrorisme est née pour s'ajouter à toutes les autres. Elle est du seul apanage de parents nouveaux riches qui cèdent des voitures dont la valeur dépasse le milliard de dinars à leurs rejetons et les autoriser à aller semer la provocation dans les avenues. La procuration est offerte à des garnements, pour donner la mort.

Les très frais magnats dévoilent, par l'effrayante extravagante preuve d'irresponsabilité et d'insouciance, que fermer les yeux sur les parades débiles entreprises par leurs enfants n'est qu'une sentence de mort promise d'abord à leur propre progéniture.