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Finances: L'Etat fait-il la manche ?
par Bruxelles: M'hammedi Bouzina Med
Souvent les
Etats font, par la voix de leurs gouvernements, appel à la solidarité
financière de leurs citoyens. Mais ils fixent les montants recherchés,
expliquent pourquoi et offrent des intérêts.
Entre Me Ksentini qui propose l'amnistie pour les corrompus et le
ministre des Finances qui lance un appel à l'immigration algérienne pour
déposer son argent dans les banques du pays il y a comme un air d'amateurisme
politique qui traduit l'incapacité de nos gouvernants à prémunir le pays des
éventuels et non moins réels risques d'une crise économique et financière qui
hypothéquerait sérieusement son avenir. Voilà trois ou quatre ans, l'Algérie
fanfaronnait sur les places financières internationales et annulait les dettes
que lui devaient des pays amis en Afrique et ailleurs. L'Algérie remboursait de
façon anticipative ses propres dettes et offrait même des prêts à des
institutions financières internationales tel le FMI ou
la Banque mondiale. Que c'est-il passé dans ce court
laps de temps dans la vie du pays pour qu'il toque aux portes du crédit
international et sollicite les poches de ses citoyens jusqu'au-delà des
frontières après avoir sollicité celles des Algériens du pays par l'opération
du prêt obligataire ? L'effondrement des prix des hydrocarbures et les recettes
du pays suffisent-ils à expliquer l'appel à la solidarité des Algériens ? En
partie oui, mais le gouvernement a toujours affirmé que ses lois de finances et
les budgets de l'Etat ont toujours été établis sur la base d'un baril de
pétrole à 37 dollars. Nous y sommes presque. Partant de cette hypothèse, il n'y
a pas lieu de s'inquiéter au point de «faire la manche» auprès des citoyens
dont une bonne majorité boucle difficilement ses fins de mois. Outre l'outrance
de l'offre de Me Ksentini aux corrompus et autres
délinquants financiers et l'absurdité de l'appel lancé au peuple pour renflouer
les caisses de l'Etat, les gouvernants font preuve d'une sécheresse inouïe dans
les formules proposées pour faire face au risque d'effondrement financier du
pays. A quoi est destinée cette éventuelle récolte de l'argent des citoyens ?
Quels intérêts offrent les banques algériennes aux futurs dépositaires immigrés
? Et puis essentiellement, où en sont réellement les comptes financiers du pays
? De combien de temps dispose le pays pour éviter l'éventuelle crise supposée
guetter le pays ? Sans réponse transparente et sans vérité sur les comptes de
l'Etat, le doute alimentera gravement l'opinion publique, stressera les
opérateurs économiques et refroidira la générosité attendue des citoyens. Les
gestionnaires du pays s'entêtent à croire que seule la récolte de l'argent des
citoyens donateurs évitera la crise au pays. Le travail n'est donc plus
producteur de richesse et les réformes menées depuis une quinzaine d'années ne
donnent rien comme plus-value économique et financière. Au
lieu et place de mobiliser le potentiel productif du pays, rationnaliser les
dépenses de l'Etat, revoir la priorité des gros projets du pays, lever
l'absurde règle de 51/ 49% qui plombe les investissement étrangers, faciliter
le code des investissements, celui des marchés publics et celui du travail,
révolutionner le secteur bancaire qui fonctionne encore à l'âge de
pierre...libérer, soutenir, démocratiser l'acte d'entreprendre comme le font la
majorité des pays développés, le gouvernement sollicite le portefeuille des
gens sans aucune explication, voire même sans garantie. Quel niveau
d'épargne attend le gouvernement de telles opérations de «charme» auprès du
peuple, pour combien de temps et avec quels effets de retour sur l'économie et
la qualité de vie dans le pays ? Tout citoyen lambda qui sollicite un prêt
bancaire doit le justifier avec un dossier d'étude et de solides hypothèques ?
Pourquoi l'Etat en serait-il dispensé ? L'appel à la solidarité citoyenne et à
leur patriotisme n'est pas en soi une exclusivité du gouvernement algérien ou
insensé, sauf qu'ailleurs ce genre d'opération est précédé d'une large campagne
d'explication avec un plafond (la somme recherchée) et un temps limité. En
toute transparence. Cela s'appelle la démocratie.
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