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Il a versé un pot-de-vin pour organiser le Mondial 98 : Le scandale de la FIFA rattrape le Maroc

par Moncef Wafi

Les révélations sur les scandales de corruption qui éclaboussent la Fifa se poursuivent et chaque jour son quota de noms de pays qui, selon la justice américaine, ont soudoyé des cadres dirigeants de l'instance internationale de football pour l'organisation de la Coupe du monde chez eux.

Si les Mondiaux de 2018 et 2022 restent comme les exemples les plus cités, des documents déclassifiés publiés, ce mercredi, par la justice américaine dévoilent un peu plus les manœuvres d'approche et les pots-de-vin versés dans le cadre de l'attribution des Coupes du monde de 1998 et 2010. Au centre de toutes ses révélations, un homme, Chuck Blazer, l'ancien secrétaire général de la Confédération d'Amérique du Nord, Amérique centrale et Caraïbes (Concacaf), le premier à tomber dans les filets américains. L'enquête au départ sur les déclarations fiscales de Chuck Blazer a mené le fisc à s'intéresser à la corruption au sein de la Fifa, en coopération avec le FBI. 14 élus de la Fédération internationale de football, actuels et anciens, ainsi que cinq partenaires commerciaux de l'instance ont été ainsi inculpés le 27 mai dernier pour corruption, racket et blanchiment sur une période de 25 ans et des sommes d'un montant global de 150 millions de dollars en pots-de-vin et rétrocommissions en échange de droits TV et marketing pour des tournois internationaux. Chuck Blazer, ancien membre du comité exécutif de la Fifa de 1996 à 2013, a secrètement plaidé coupable de dix chefs d'inculpation criminelle à New York dans le cadre d'un accord avec les procureurs américains. Il est devenu l'un des principaux informateurs du FBI. En 2013, il a affirmé aux enquêteurs américains avoir été témoin d'un accord passé entre le comité de candidature marocain et une personne, citée sous l'appellation de «complice n°1», décrite comme détenant des postes élevées au sein de la Fifa et de la Concacaf. Selon la version de Blazer, il a été invité au même titre que «complice n°1» au Maroc «quelques mois avant la désignation» du pays organisateur de la Coupe du monde 1998. Il dira qu'il était présent lorsque «complice n°1» a accepté un pot-de-vin d'un représentant du comité de candidature marocain en échange de sa voix pour le Maroc dans le scrutin qui allait venir. Toujours selon la déposition de la taupe, son accompagnateur lui a demandé de contacter les Marocains pour déterminer la date du versement sans pour autant en déterminer la valeur. «Blazer s'est entretenu au téléphone avec eux à plusieurs reprises, y compris depuis les bureaux de la Concacaf à New York», poursuit le document. Poursuivant son témoignage, Blazer affirmera que lui «et d'autres au comité exécutif de la FIFA, nous avons accepté des pots-de-vin en liaison avec le choix de l'Afrique du Sud pour être le pays hôte de la Coupe du monde 2010». La semaine dernière, la justice américaine avait indiqué qu'elle soupçonnait le Trinidadien Jack Warner, ancien président de la Concacaf, d'avoir empoché 10 millions de dollars en échange de trois voix en faveur de l'Afrique du Sud lors du vote pour l'attribution du Mondial 2010. Cette dernière, qui a récusé toute idée de corruption, a néanmoins admis qu'elle a versé les 10 millions de dollars au football caribéen par solidarité. Blazer évoque également des commissions occultes liées à cinq éditions de la Gold Cup, la principale compétition organisée par la Concacaf, étalées entre 1996 et 2003.

L'autre révélation concerne le match barrage pour la Coupe du monde 2010 entre l'Irlande et la France. John Delaney, le président de la Fédération irlandaise, a révélé ce jeudi que la Fifa avait versé cinq millions de dollars à son pays après la main de Thierry Henry. «Nous avions trouvé un accord. C'était un jeudi et le lundi suivant tout était signé. C'était un paiement à notre Fédération pour que nous ne portions pas l'affaire devant la justice», a-t-il déclaré. Raymond Domenech, alors sélectionneur des Bleus, a réagi, ne comprenant pas comment l'Irlande a pu accepter de se taire en échange de cinq millions de dollars.