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Le fauteuil

par Boutaraa Farid

La quête du fauteuil mène-t-elle au bonheur ou ouvre-t-elle les portes de l'enfer ?

En effet, la fonction de chef ou de manager draine toujours derrière elle de nombreux postulants. Ils sont comme ces papillons qui tournent autour d'un feu, certains s'enflamment, alors que d'autres s'enrichissent souvent en vendant leurs âmes.

Mais est-ce que le fauteuil du chef n'exerce-t-il pas son propre pouvoir sur son occupant ? Ce dernier va-t-il accepter de le quitter un jour ou adoptera-t-il le comportement d'un mioche devant le siège d'un jeu de manège ? Est-ce que le fauteuil du pouvoir ne conduit pas son maître à la folie des grandeurs ? Autrefois, on refusait les promotions, car ces dernières n'étaient pas souhaitées. Elles rendaient le fonctionnaire comme un mouchard au service de l'État. Et sans le vouloir, le peuple algérien garde une mauvaise image de l'État français. Un préjugé qu'on trouve du mal à effacer des esprits. Même de nos jours, beaucoup d'intellectuels refusent le poste de responsabilité. Beaucoup préfèrent l'anonymat et l'ombre. Ils ont la frousse d'affronter ceux qui ne travaillent pas et qui formulent tant de critiques. Ils n'aiment pas faire face à cet ennemi invisible qui critique tout le monde et qui prétend savoir tout sur les actants et les invités. Comment vaincre alors des vénaux qui connaissent les rouages de l'administration et les hauts commis d'État ? Comment battre donc, des mercantiles qui sont au courant des fortunes des fonctionnaires et du nombre de verres et de cuillers qui sont dans les cantines ? Comment abattre des farauds dépravés et des fats qui ont des mains et des yeux puissants et qui dirigent de loin les esprits de presque tout le personnel ? Et oui, être chef de nos jours demeure une tâche difficile pour ceux qui possèdent une âme sensible et un cœur en chair et non pas en marbre.

Gérer une entreprise maintenant signifie partir en guerre contre des personnes sans scrupule et sans vergogne et qui pensent que la vie n'est qu'un obscur combat et où la victoire revient souvent au plus rusé qui sait mentir et diviser. En effet, demander le poste de commande n'est qu'un divorce non déclaré avec une vie agréable au sein d'une famille réunie autour d'un dîner, garnie de sourires et de tendresse. Demander la responsabilité de nos jours, n'est qu'une recherche d'une vie de stress et d'angoisse avec toutes les protestations de ce beau monde qui galope en silence pour fuir les affres d'une vie misérable. Il est vrai, vouloir être un responsable demande une somme énorme de courage pour imposer sa propre logique et qui devrait être juste et porteuse du nouveau qui aidera les démunis à avoir leurs droits. Demander le poste de chef exige aussi des forces impeccables et un entourage sans faille.

Postuler pour le poste de chef est synonyme d'un sacrifice et non pas le début d'une soirée avec des feux d'artifice. Demander les clefs du somptueux bureau n'est qu'une aventure qui se termine par des calentures. En outre, il faut savoir que ce poste fera de son hôte un hâbleur qui cherchera les éloges qui font accéder au ciel. Le bureau en velours ne peut rien contre les magouilles des vautours. Un bureau en or, mais qui prive son maître à mettre de l'ordre dans une maison qui adore le désordre.

Et oui, le terrain est laissé à des êtres sans âmes qui désirent faire du mal gratuitement et voir tout le monde dans des flammes. De nos jours, nombreux sont les gens qui n'ont plus confiance en ceux qui les dirigent. On parle à voix basse des trafics et des détournements. On critique la gestion des biens et des dépenses insensées.

On parle de ce vertige qui nous étouffe qu'on voit des ordures à perte de vue et des chaussées où les trous font la loi. Et oui, les mécontents sont nombreux. Cependant, ils doivent savoir qu'ils ont une part de responsabilité. Nos villes et nos entreprises subissent les conséquences de nos démissions. Nous avons abandonné les postes de responsabilité et c'est normal que la cécité endeuille nos cités. Nous sommes tous responsables de ce manège qui a détruit notre héritage. Nous avons divorcé avec l'activité politique et nous avons scellé la porte des promotions. Actuellement, tout se résume à un quotidien paisible entre le travail et nos paisibles taudis.

Nos horizons sont plats et nos ambitions sont vaines. Nous peinons à la gestion de notre salaire qui part en fumée en nous laissant comme des personnes âgées enrhumées. Nous n'avons plus goût à rien. Nous critiquons à voix baisse toutes les anomalies, mais nous avons peur du face-à-face. Nous avons peur du miroir et on se contente de quelques injures dans les couloirs. Tout semble noir et nous ne comprenons toujours pas les causes de ce malaise qui nous prive de notre vigueur. Cependant, l'espoir de voir naître une nouvelle génération de managers et de chefs. Une équipe de meneurs d'hommes qui ont l'amour de la patrie mère l'Algérie. Une génération d'hommes qui sachent prendre soin des vieux qui ont tout donné pour ce pays. Une génération de patriotes qui mettront le train des réformes sur les rails. Des personnes qui ont une idée sur les dangers qui guettent notre si grand et riche pays. Une poignée d'hommes qui aura assez de clairvoyance pour déjouer les plans de cette coalition du mal qui veut gérer les pays riches et les dominer de loin et sans guerre. Le simple citoyen doit admettre que la paix est un trésor qui n'a pas de prix. La nouvelle équipe doit savoir que la tâche est rude et pas facile.

En effet, nos voisins vivent des moments difficiles et cette instabilité peut nuire à notre sécurité.

La propagande bat son plein et les esprits fragiles ne résistent pas aux tentations. Ajoutant à cela les ragots et les mensonges des ennemis invisibles qui ont juré de mettre le feu partout. Cependant, la foi en Un Dieu Juste et Clément peut nous rendre la volonté et la force à réduire nos ennemis et à bâtir une république où les citoyens n'auront besoin ni de juge ni de flic.

Une république où tout est beau et magique. Et oui, le moment est venu pour le grandiose départ de notre si belle cité. Le moment est venu pour la construction d'un Etat fort et démocrate. De cette tribune nous lançons des invitations à tous les amoureux de cette belle et douce Algérie.

Le fauteuil de la responsabilité ne tue pas. Un bon chef est celui qui sait être ferme et généreux. Comme furent nos chefs du FLN. Un bon administrateur est celui qui prend toujours du recul et qui sait prévoir les catastrophes sans être un magicien ou un philosophe. Le bon chef est celui qui descend de son bureau et qui partage le repas de ses subordonnés. Le bon chef est celui qui sait garder son calme et qui sait arracher le respect des hommes et des femmes. Le bon chef est celui qui ne dévoile jamais ses peurs et ses craintes. Celui qui sait diriger des hommes et des femmes pour atteindre un projet. Le bon manager est celui qui sait dépasser le père du management l'Américain Frédéric Winston Taylor qui en 1911 avait publié son livre célèbre «Scientific Management».

En effet, cet autodidacte venait de mettre au monde de nouvelles approches du monde du travail. Le directeur n'est plus cet individu qui fait tout et qui surveille tout le monde. Le manager est celui qui sait faire travailler les autres. C'est l'homme qui partage les tâches et qui sait faire impliquer tous les éléments qui forment son équipe. C'est l'homme infatigable qui valorise le dialogue et qui a l'esprit d'équipe. Le manager est celui qui rend le travail captivant et motivant, car celui qui bosse plus à droit à des privilèges. Le bon manager est celui qui facilite la créativité et qui fait sentir aux autres qu'ils sont chez eux. Ce n'est plus celui qui donne des ordres et qui se croit le plus intelligent. Le bon manager est celui qui sait gagner les cœurs de tout le personnel. Le bon manager est celui qui bosse pour son pays et non pour un salaire. Le bon manager est celui qui valorise l'expérience et qui ne refuse jamais les nouvelles idées. Et oui, le poste de directeur n'est pas une tâche impossible. Il faut avoir une bonne préparation morale et une confiance en soi. Toujours prendre les avis des autres et ne jamais sous-estimer ceux qui n'ont pas un haut niveau d'instruction, mais qui ont assez d'expérience. Pour achever, nous dirons que tout est éphémère dans cette vie et que nul n'est parfait.

Alors, que nos bonnes actions effacent les mauvaises. Soyons cette relève qui honore celle de Novembre 1954. Soyons tous des chefs sincères et honnêtes. Chacun dans son secteur et sans attendre des ordres ou des remerciements. Faisons notre travail comme il faut. Soyons tous au service de cette république qui attend la conjugaison des efforts pour juste stopper les délires et mettre fin aux pleurs en invitant les rires. Et oui, notre salut vient si chacun de nous commence à respecter les lois et nous serons tous égaux : les serviteurs et les rois. Nous avons tout pour réussir et de bâtir un grand empire. Notre salut est entre nos mains et rien ne doit nous dévier du chemin tracé par nos aïeuls.

Et oui, si nous désirons une fin en apothéose, la responsabilité doit être cette rose que nous arroserons tous avec notre sueur. Nous serons tous égaux et nous goûterons ensemble les délices de la victoire : celles de nos martyrs sur leur bourreau.