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A boire et à manger !

par El-Houari Dilmi

Le Ramadhan débute aujourd'hui ou demain en Algérie. Beaucoup de peuples arabes et musulmans, épuisés par la cherté de la vie, s'apprêtent à passer un mois de jeûne des plus éprouvants. Et c'est justement là où trente jours d'abstinence que le neuvième mois du calendrier lunaire prend tout son sens. Soumise à un jeûne forcé, depuis des mois, par la machine à tuer sioniste, la population ghazaouie est en train de mourir de faim et de soif, sous les yeux détournés d'un monde devenu comme anthropophage. Ramadhan ou pas, les Palestiniens survivent depuis toujours à toutes les épreuves, défiant la loi biologique de rester privés des besoins élémentaires de la vie, sans courber l'échine.

Chez nous, il s'agit d'une toute autre ambiance. Un mois si particulier qu'il mobilise tous les étages de l'Etat pour permettre aux Algériens de ménager leurs portefeuilles et surtout leurs nerfs, en période d'abstinence favorable à tous les excès. A en juger par la marée humaine qui investit les rues et les commerces, ces derniers jours, le mois de jeûne est-il seulement synonyme de bouffe, de farniente, de procrastination et autres soirées d'agapes, trente jours durant ? Gaspillage, baisse de productivité et absentéisme, est la tendance générale en ce mois où le jeûne est un prétexte à tous les mauvais instincts. Nous sommes très loin de l'ascèse recommandée par le Coran et qui a pour vocation, entre autres, de nous faire ressentir les souffrances engendrées par la faim que vivent, quotidiennement, toute l'année, beaucoup d'hommes, de femmes et d'enfants, un peu partout dans le monde. Ils sont nombreux les Algériens qui s'endettent pour garnir la table du f'tour dont une bonne partie finit dans les poubelles. Donner du sens à la pratique religieuse se trouve donc évacué face à la fièvre acheteuse qui s'empare de la majorité des Algériens. Entre consumérisme et spiritualité, beaucoup ont choisi leur camp, le Ramadhan n'étant plus qu'un mois comme les autres où la goinfrerie le dispute à un gaspillage d'argent dont les plus fragiles d'entre nous en ont grand besoin.