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Que justice soit faite !

par Moncef Wafi

Une autre sordide histoire d'assassinat d'un enfant va certainement relancer le débat sur la violence en Algérie et les moyens d'y mettre fin. La découverte du corps sans vie de Mohamed Yassine, six ans, affreusement mutilé dans la wilaya de Béchar, vient grossir la liste, déjà importante, des enfants assassinés ces dernières années. Ce fait divers clôture une série macabre qui a vu en dernier des actes d'infanticide qui ont choqué l'opinion publique. Les drames de Constantine et Tipaza ont été comme des électrochocs pour les Algériens qui découvrent, effarés, que la violence s'est durablement installée devenant un véritable phénomène sociétal. Faut-il s'en étonner ?

Au-delà de l'aspect purement pénal des kidnappings et meurtres d'enfants pour vengeance familiale, règlements de compte, demandes de rançon ou sorcellerie noire, ces actes de violence s'inscrivent en droite ligne des années de terreur et de massacre qu'a vécues le pays, presque dix ans durant. La décennie noire a profondément altéré les codes sociaux et changé à jamais le rapport de l'Algérien avec la violence, quelle que soit sa nature. Verbale, physique, autodestruction, d'Etat, la violence s'est banalisée à un point inimaginable reléguant toute moralité au rang de détail sans importance.

L'origine de cette barbarie n'est pas à chercher loin, elle est inscrite dorénavant dans les gènes corrompus des Algériens qui ont vécu dans leur chair cette violence des années 90 et dont les conséquences sont visibles aujourd'hui. Les séquelles mentales des victimes de cette période sont indélébiles tant l'aspect psychique de cette décennie rouge a été éludé. Si on estime approximativement les chiffres des morts, des blessés et des exilés liés à cette tragédie, on ignore par contre les effets dévastateurs sur la psyché des Algériens qui ont grandi biberonnés au sang. Une étude serait la bienvenue pour connaître les conséquences de cette période sombre de l'histoire de l'Algérie sur le degré de violence qui touche de plein fouet le pays ces derniers temps. Une piste pour les sociologues et les criminologues que de tracer la trajectoire sociale et mentale de ces tueurs d'enfants et le autres criminels de sang afin d'étudier l'éventuelle existence d'une corrélation entre la violence d'aujourd'hui et celle des années 90.

Faut-il parler de maladie mentale et comment mettre un terme à cette folie meurtrière ? Faut-il revoir la santé mentale, construire plus d'hôpitaux psychiatriques et rétablir la peine de mort ? Les interrogations ne manquent pas mais les réponses se font rares. Inexistantes. Pourtant, et dans cet océan de doutes, une seule certitude subsiste, celle de la douleur des parents, assassinés mille fois tous les jours que Dieu fait. Alors que justice soit rendue !