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Le droit de la famille est
marqué par l'existence d'un ensemble de règles qui protège les droits des
enfants. Un principe incontournable auquel le juge des affaires familiales ou
le juge des enfants doivent apprécier, dans une procédure contentieuse, est
celui de l'«intérêt supérieur de l'enfant».
Cette notion est devenue un critère de référence et a conduit à asseoir un statut de l'enfant ou du mineur dans plusieurs disciplines du droit: interdiction de faire travailler les enfants de moins de 8 ans, réduction de la durée du travail pour les enfants en dessous de 12 et 16 ans; mise en place de l'assistance éducative pour les enfants dont «la santé, la sécurité, la moralité ou l'éducation sont gravement compromises», l'adoption ou la kafala,? La kafala est un transfert de l'autorité parentale, il ne s'agit pas d'une véritable adoption, au sens du droit français. Dans les pays où la loi islamique inspire certaines disciplines du droit, notamment le droit de la famille, l'adoption n'existe pas en tant que telle. De manière plus précise, la kafala est un recueil légal permettant de confier la garde d'un mineur à un adulte. Cette procédure «d'adoption» ne crée cependant pas de lien de filiation entre l'enfant et sa famille adoptive. La kafala consiste donc en la prise en charge de la protection, de l'éducation et de l'entretien d'un enfant abandonné sans établissement d'un lien de filiation envers la personne à laquelle est confiée la kafala. L'enfant mineur alors recueilli conserve les liens de filiation qui l'unissent à ses parents ou à sa famille. Pour pouvoir adopter un enfant abandonné par le biais d'une kafala, il faut nécessairement remplir certaines conditions. Ainsi, pourront prendre en charge un enfant abandonné les époux musulmans majeurs, aptes moralement et socialement à assurer la kafala, disposant de moyens suffisants à la prise en charge de l'enfant et n'étant pas atteints de maladie contagieuse ou les rendant incapables d'assumer leur responsabilité. Par ailleurs, ils ne peuvent avoir fait l'objet d'une condamnation portant atteinte à la morale ou commise à l'encontre des enfants. Une femme musulmane seule pourra adopter un enfant par une kafala dès lors qu'elle respecte les mêmes conditions. Enfin, des institutions publiques peuvent avoir recours à la procédure de kafala, dès lors qu'elles sont chargées de la protection de l'enfance et qu'elles sont aptes à assurer la protection des enfants et à les élever conformément à l'islam. Pour pouvoir démarrer une procédure de kafala, la personne souhaitant adopter un enfant abandonné doit en formuler la demande au juge chargé des affaires des mineurs duquel relève le lieu de résidence de l'enfant. Ce dernier, après enquête rendra une ordonnance confiant la kafala de l'enfant. La kafala a été explicitement reconnue par la Convention internationale de New York relative aux droits de l'enfant (CIDE) signée le 20 novembre 1986, et ratifiée par la France en août 1990 puisque son article 20 dispose que: «1. Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciales de l'Etat. 2. Les Etats parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement conforme à leur législation nationale. 3. Cette protection de remplacement peut notamment avoir la forme du placement dans une famille, de la kafala de droit islamique, de l'adoption ou, en cas de nécessité, du placement dans un établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d'une certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique. » Le regroupement familial consiste en un mode d'introduction en France des ressortissants algériens. Il s'agit de la possibilité donnée à un ressortissant étranger, titulaire d'un titre de séjour en règle, d'être rejoint par des membres de sa famille tels que son conjoint ou ses enfants mineurs. En matière de regroupement familial, le Conseil d'Etat français a, selon les cas particuliers, précisé sa position en se fondant tant sur l'intérêt supérieur de l'enfant et les motifs énumérés à l'article 4 de l'accord franco-algérien qui prévoient les principes suivants: «Les membres de la famille qui s'établissent en France sont mis en possession d'un certificat de résidence de même durée de validité que celui de la personne qu'ils rejoignent. Sans préjudice des dispositions de l'article 9, l'admission sur le territoire français en vue de l'établissement des membres de famille d'un ressortissant algérien titulaire d'un certificat de résidence d'une durée de validité d'au moins un an, présent en France depuis au moins un an sauf cas de force majeure, et l'octroi du certificat de résidence sont subordonnés à la délivrance de l'autorisation de regroupement familial par l'autorité française compétente. Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants: 1- Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont pris en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales. L'insuffisance des ressources ne peut motiver un refus si celles-ci sont égales ou supérieures au salaire minimum interprofessionnelle de croissance. 2- Le demandeur ne dispose ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant en France. Peut être exclu de regroupement familial: 1- un membre de la famille atteint d'une maladie inscrite au règlement sanitaire international; 2- un membre de la famille séjournant à un autre titre ou irrégulièrement sur le territoire français. Le regroupement familial est sollicité pour l'ensemble des personnes désignées au Titre II du Protocole annexé au présent Accord. Un regroupement familial partiel peut être autorisé pour des motifs tenant à l'intérêt des enfants. Lorsqu'un ressortissant algérien dont la situation matrimoniale n'est pas conforme à la législation française réside sur le territoire français avec un premier conjoint, le bénéfice du regroupement familial ne peut être accordé, par les autorités françaises, à un autre conjoint. Les enfants de cet autre conjoint peuvent bénéficier du regroupement familial si celui-ci est décédé ou déchu de ses droits parentaux en vertu d'une décision d'une juridiction algérienne.» Le juge français précise qu'une kafala ne saurait avoir pour objet d'accorder le bénéfice du regroupement familial pour l'enfant. Le juge administratif a déjà rejeté la demande d'admission au séjour du mineur au titre du regroupement familial lorsque l'enfant fait l'objet d'une kafala par une tante ou un oncle ou un grand-parent et lorsque l'un ou les deux parents du mineur sont encore vivants et résident toujours dans le pays d'origine. Le droit au séjour des victimes de violences conjugales En droit français plusieurs dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers reconnaissent la possibilité pour un étranger de se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » au regard de leur situation conjugale. Ainsi, il est affirmé à l'article L. 311-11 4° du Code de l'entrée et du séjour des étrangers que « sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » est délivrée de plein droit [?] à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français». De même, à l'article L. 314-9 3° il est reconnu que «la carte de résident «est délivrée de plein droit» à l'étranger marié depuis au moins trois ans avec un ressortissant de nationalité française, à condition qu'il séjourne régulièrement en France, que la communauté de vie entre les époux n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français». Mais que se passe-t-il lorsque le conjoint étranger est victime de violences conjugales et que, par conséquent, la communauté de vie est rompue ? Les violences conjugales peuvent correspondre à des violences d'ordre psychologique telles que le harcèlement moral, les insultes ou les menaces; physique, telles que les coups et blessures; sexuel, telles que le viol, qui peut être caractérisé même dans le cadre d'un mariage ou d'un Pacs ; ou économique, telles que la privation de ressources financières et le maintien dans la dépendance. En principe, et selon les dispositions de l'article L. 431-2 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers, en cas de rupture de la vie commune ne résultant pas du décès de l'un des conjoints, le titre de séjour qui a été remis au conjoint d'un étranger peut, pendant les trois années suivant l'autorisation de séjourner en France au titre du regroupement familial, faire l'objet d'un retrait ou d'un refus de renouvellement. Cependant, depuis la réforme du 24 juillet 2006, la carte de résident ne peut plus être retirée à l'étranger qui ne satisfait plus à la condition de vie commune pour des raisons tirées de violences conjugales. Cela ressort notamment des articles L. 313-11 et L. 314-5-1 et L. 316-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers. De ces dispositions il ressort qu'une personne étrangère, qu'elle soit en situation régulière ou irrégulière, et qui est victime de violences conjugales commises par son ou sa conjoint (e), par la personne avec laquelle elle est pacsée ou en situation de concubinage ne peut se voir retirer son titre de séjour délivré au titre du regroupement familial. Cette personne pourra même obtenir le renouvellement de son titre de séjour. En revanche si les violences conjugales sont antérieures à la délivrance d'un premier titre de séjour, le préfet, autorité administrative compétente, exercera un véritable pouvoir discrétionnaire, c'est-à-dire qu'il décidera selon sa libre appréciation, du renouvellement ou non du titre de séjour. S'agissant d'une appréciation au cas par cas du Préfet, le dépôt d'une plainte pénale pour violences par la personne étrangère victime ainsi que la justification de certificats médicaux constatant les violences peuvent fortement influencer la décision du Préfet de renouvellement du titre de séjour. De plus, si la condamnation de l'auteur de violences conjugales a été obtenue à la suite du dépôt de plainte par la victime de ces violences, alors le refus de délivrer la carte de résident ne peut être motivé par la rupture de la vie conjugale. C'est ce que prévoit l'article L. 316-4 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers en France. En vertu des dispositions de l'article L. 316-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers, « sauf si la présence de l'étranger constitue une menace à l'ordre public, l'autorité administrative délivre dans les plus brefs délais une carte de séjour temporaire portant la mention « vie privée et familiale » à l'étranger qui bénéficie d'une ordonnance de protection ». Ainsi, le Préfet se verra dans l'impossibilité de refuser la délivrance du titre de séjour dès lors qu'une ordonnance de protection de l'ordre judiciaire a été émise. Une telle ordonnance de protection peut être délivrée en urgence par le juge aux affaires familiales lorsque les violences exercées au sein du couple ou par un ancien conjoint, un ancien partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou un ancien concubin mettent en danger la personne qui en est victime. *Avocat au barreau de Paris |
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