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«Je te chante la
vie pour que tu ne meures jamais dans les cœurs, je te chante la vie pour que
ta voix célèbre toujours et partout l'amour...» Anonyme
Paris est martyrisé, Paris est triste, Paris est en larmes ! La ville lumière a assisté dans la douleur au meurtre de ses enfants! La machine de la mort qui aurait endeuillé la veille le Liban, le pays des cèdres et de la science est passée par là avec son arsenal et ses mitraillettes pour cueillir ces cœurs parisiens joyeux dont le seul tort serait, peut-être, de vouloir vivre. C'est dire que plus aucun pays n'en est à l'abri. La haine n'a pas de frontières, le terrorisme n'a pas de visage ni d'identité, encore moins de nationalité ou de géographie. Il est décidément transnational, inhumain, monstrueux et barbare. En ce sens qu'il peut taper à toutes les portes et à n'importe quel moment pourvu que ça saigne, ça blesse, ça détruit et ça tue. Ses ennemis ne sont autres que la vie, l'amour, la fraternité, la paix, etc. En effet, de quelque angle que l'on regarde ces derniers attentats de Paris, on ne peut que buter sur de profonds questionnements : à qui profite le crime? A qui profitent ces insoutenables images d'horreur ayant plongé en seulement une nuit toute la France dans la psychose, la peur, l'hystérie et qui ont, bien sûr, déterré les relents enfouis d'islamophobie ? Pourquoi la capitale hexagonale n'a-t-elle pas échappé au carnage du vendredi malgré l'impressionnant dispositif sécuritaire du plan Vigipirate mis en œuvre depuis au moins l'affaire de Charlie Hebdo? Le gouvernement de Manuel Valls serait-il vraiment face à une machine terroriste hyperorganisée et si aguerrie qu'il perde les pédales sur le terrain ou la performance des meurtriers du Bataclan et du Stade de France n'est que l'éloquente démonstration des failles dans le réseau des renseignements hexagonaux (failles soulevées déjà dans l'affaire Merah et les frères Kouachi) ? Et puis, pourquoi est-ce la France qui, en moins d'une année, en est deux fois ciblée et non pas la Belgique (la plaque tournante du terrorisme), ou l'Angleterre, l'Allemagne par exemple engagées à juste titre dans la guerre contre Daesh au Moyen-Orient? Et enfin quelles seraient les implications de telles attaques sur la tournure des événements à venir : la conférence internationale sur le climat (Cop 21), les échéances de régionales prévues en décembre, puis... le grand rendez-vous présidentiel en 2017? En tout cas, ces attentats mettent en évidence beaucoup d'interrogations pour diverses raisons (le contexte international caractérisé par une crise énergétique sans précédent, la manière encore plus professionnalisée avec laquelle les djihadistes ont mené les opérations, l'enchaînement troublant avec les attaques du Liban et de la Turquie, etc). Bien évidemment, il y a une différence de taille entre les attentats de janvier dernier et ceux d'aujourd'hui. D'abord, les premiers ont ciblé au nom des idéaux religieux fanatiques la liberté d'expression au sens le plus large du terme (la rédaction de Charlie Hebdo qui s'est permise par le biais de ses caricatures de toucher à la personne du prophète de l'Islam) et la communauté juive ( prise d'otages et meurtres dans le magasin Hyper Cacher ) alors que les seconds sont des fusillades systématiques dans le tas contre une population civile qui est, pour le moins que l'on puisse dire, politiquement ou idéologiquement «neutre». En plus, si les terroristes ont adopté en janvier une stratégie de loups solitaires qui privilégie la thèse de l'ennemi invisible, cette fois-ci ils ont enfreint la règle et se sont affichés directement. Ce qui équivaut après la revendication de Daesch de ces attentats à un appel de guerre contre la France et ses intérêts partout. Ensuite, il y a le contexte électoral. Il serait un peu tôt de parler de 2017 mais il n'en reste pas moins que la montée en puissance du Front National ces derniers temps avance les signes précurseurs d'une fièvre de panique comparable à celle du deuxième tour des présidentielles de 2002. Marine le Pen qui s'est déjà donné des ailes de vautour en raflant toutes les consultations électorales précédentes trouvera sans doute dans la recrudescence de tels attentats une aubaine idéale afin de s'ancrer dans une société déçue par la piètre prestation de l'exécutif socialiste. Autrement dit, la peur de l'étranger et de l'immigration en général serait redynamisée de façon plus virulente dans les prochains mois. Sachant bien en plus que l'extrême droite a tiré le plus gros profit de la faiblesse d'un camp de républicains rongé par des «bisbilles» de leadership et de la forte inquiétude générée par l'instabilité du front de l'emploi. Autre donnée, si à l'intérieur de l'U.M.P, les dés ne sont pas encore jetés, Sarkozy naviguera à vue pour se tailler le costume d'un incontestable chef d'opposition en jetant de temps à autre des fleurs à cette extrême-droite en perte de vitesse de manière à amortir le coup des déchirures internes de sa formation politique. Quant aux socialistes, eux, ils ne lâcheront jamais prise et tenteront de ressouder leurs rangs autour du thème de l'unité nationale. Les moments de crise sont fort propices à l'émotionnel, au subjectif et aux flux lyriques du patriotisme, Hollande dont la popularité est en déclin le sait bien, s'en sert pour émouvoir à bon compte et recadrer le restant de son mandat autour de l'enjeu sécuritaire. Une thématique qui assure les français et qui aurait valu d'ailleurs à son rival Nicolas Sarkozy la victoire aux élections présidentielles de 2007 face à Ségolène Royal. A côté de ces données, il est un problème sensible dans la société française. C'est que des pans entiers de en son sein affrontent des discriminations relatives aux origines et à la culture. La capacité phénoménale de ce terrorisme djihadiste à affecter profondément son immunité tient en premier lieu à un climat anxiogène nourri par ce que l'ivoirien Tidjane Thiam appelle «un plafond de verre». Autrement dit, ce mur transparent du racisme qui tue le génie. L'islamisme et le fanatisme religieux y ont trouvé un terreau fertile pour la propagande et des jeunes français «stigmatisés» n'hésitent pas à faire des voyages en Syrie et en Irak (entraînement dans les camps militaires) rien que pour défier cette société figée qui ne leur a donné aucune chance d'épanouissement «à force de jouer avec les haines, écrit Edwey Plenel, nous produisons des monstres qui se retournent contre nos libertés fondamentales. Nous avons crée un climat où ces crimes sont possibles». D'ailleurs, une islamisation croissante de la question sociale se vérifie chaque jour dans les banlieues, ces vastes territoires perdus par la république. Faute de référent identitaire sain en raison d'une panne cruelle d'intégration, la quatrième génération de jeunes issue de l'immigration peine encore à trouver sa place dans cette France pourtant diverse, multicolore, multiraciale et multiculturelle. En revanche, quoique puissent être les justifications, plus aucun musulman de France ou ailleurs n'acceptera aujourd'hui d'être assimilé à ces monstrueux terroristes. En conséquence, il est grand temps que ces amalgames entretenus à mauvais escient par certaines élites occidentales entre «musulman» et «terroriste» devraient disparaître. Par ailleurs, il est vrai aussi que ces dernières années la France s'est engagée militairement partout. De la Libye au Centrafrique en passant par ses interventions en Syrie, elle n'a fait que s'attirer les foudres d'Al- Qaïda, Daech et toutes les mouvances islamistes. En conséquence, sa sécurité intérieure aura forcément subi l'impact de ses prises de position très offensives à l'extérieur. Or l'on remarque que jusqu'en 2007, l'Hexagone était presque loin de ce tumulte n'étaient-ce ses engagements, du reste, hérités de son passé colonial dans la fameuse Françafrique (Somalie, Côte d'Ivoire, Djibouti, Sénégal, etc). La raison est un secret de Polichinelle, le repli de la droite au pouvoir depuis 1995 sur les questions nationales et surtout le rejet historique de l'ex- président Chirac de s'impliquer dans la guerre de l'Irak. Ce qui a ajouté une plus-value d'estime au prestige de la France en tant que garante de cette «politique arabe de la France» et son rôle de premier ordre dans l'architecture interétatique internationale (force nucléaire qui possède le droit de veto face aux américains trop impérialistes, colonialistes, interventionnistes, etc). |