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L'OMC dans tous ses états

par Abdelkrim Zerzouri

Le temps a-t-il conforté la position hésitante de l'Algérie quant à son adhésion à l'Organisation mondiale du commerce (OMC) ? Plus de 35 ans de négociations entre les deux parties n'ont pas donné conviction aux autorités algériennes pour adhérer à cette organisation qui regroupe pas moins de 165 pays, mais cela n'a jamais constitué un argument convaincant pour l'Algérie, qui a préféré garder son fauteuil de pays observateur. Sans dire non ouvertement à une adhésion à l'OMC, l'Algérie a participé à 15 rounds de discussion et plus de 150 rencontres multilatérales, mais au bout, l'hésitation est restée intacte.

Ces dernières années, l'Algérie s'est trop rapprochée de l'organisation, laissant croire qu'une adhésion à l'OMC n'est qu'une question de formalité, alors qu'en réalité rien de concret n'a été réalisé dans ce sens, mis à part une certaine volonté politique affichée dans ce sens par un ancien ministre du Commerce.

Bien évidemment, on n'a jamais avancé publiquement une quelconque critique à l'encontre de l'organisation, mais les hésitations de l'Algérie expriment clairement le fait que ses missions ne cadrent pas avec la politique économique du pays. Une politique résolument souverainiste et protectionniste que le temps a confortée avec son adoption par de nombreux pays membres de l'OMC, y compris parmi ceux qui appelaient à faire sauter les barrières douanières, à suspendre les subventions aux prix et tout soutien aux secteurs stratégiques, dont l'agriculture.

Des pays qui ont fini par soutenir les prix de l'énergie ces derniers temps, alors que pour l'agriculture et la pêche, les Etats ne regardent plus aux facilitations accordées aux professionnels du secteur. Et toutes les divisions sont remontées à la surface lors de la 13e conférence ministérielle, qui se tient à Abou Dhabi (Emirats arabes unis) du 26 au 29 février.

Les 12 précédentes conférences n'ont pas donné d'assez bons résultats, mais la 13e s'avère tumultueuse avec les tensions enregistrées entre les puissances, qui n'arrivent plus à se mettre d'accord sur le minimum concernant le commerce électronique et l'interdiction des subventions à la pêche. Alors que la réforme de l'organe de règlement des différends (ORD) qui, en réalité, ne règle plus aucun différend depuis la fin 2019, suite à son blocage par les Etats-Unis sous l'administration Trump. Notons que sans l'ORD, cet organe de règlement des différends qui naissent entre les Etats membres, l'OMC perd tout le sens de son existence, de sa vocation essentielle. L'OMC s'empêtre plus, ainsi, dans les oppositions plutôt que de trouver des accords sur les dossiers qui divisent, fort nombreux.

Il n'y a pratiquement aucun sujet qui fait l'unanimité au sein de l'OMC, si quelques pays veulent une réduction du soutien national aux agriculteurs, comme l'Afrique du Sud, l'Argentine, l'Australie, le Brésil et le Canada, d'autres s'y opposent, comme les pays de l'UE, la Suisse, le Japon, la Corée du Sud, la Norvège et l'Islande.

Les exemples du genre ne manquent pas, les États-Unis veulent une diminution significative des droits de douane dans l'agriculture mais l'Union européenne, la Suisse, le Japon, la Corée du Sud, la Norvège et Islande et l'Inde sont contre… ainsi que les pour et contre les restrictions à l'exportation sur des produits agricoles, les subventions et aides à l'exportation, et plus encore de sujets où l'on ne parle pas seulement de désaccords mais de positions inconciliables et d'intérêts nationaux à défendre crânement.