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La machine de guerre américaine avait actionné le gros bâton pour éliminer le Président Houari Boumediene

par Benallal Mohamed

« On critique en vain les grands hommes, leur célébrité se charge du soin de les venger »

Durant le siècle écoulé, la guerre froide instaurée par les deux grandes superpuissances, ils ont semé, pour les Soiétiques les pêches et les crimes par les Américains envers les peuples du tiers monde. Les deux grands ont marqué fortement les relations internationales dans les domaines suivants : la politique, l'économique, le commerce, le système monétaire et financier dans l'unique but de se servir et se partager l'intérêt du partage dégagé de ces relations qui avaient enrichi plus les puissants et appauvri encore plus les faibles .C'était le jeu favori des grandes puissances.

Houari Boumediene dira à qui veut l'entendre: « quand, dans un pays sous-développé, quelqu'un ose bouger on le liquide ». Les puissants n'aiment pas que petits viennent perturber leur jeu favori et pour mieux s'amuser sur la scène, ça et là, ils inventent des petits scandales que la CIA ou le KGB fabrique pour mieux pétrir l'opinion publique à leur guise. Dès qu'un président tiers-mondiste se mêle en s'intéressant aux intérêts des grands, la CIA et parfois même le KGB s'occupent de lui, comme il se doit. Nous avons vu le sort réservé à Mossadek (Iran), au roi d'Arabie Faycal, à Salvador Allendi, à Saddam Hussein, etc.

Houari Boumediene, bien conscient de ces faits, savait qu'il était sur la ligne de mire de la CIA et du Mossad.

Déjà en 1974, suite à la conférence des non -alignés présidée par l'Algérie sous l'auspice de Houari Boumediene, Henry. Kissinger (S/G d'Etat us) trouve que la petite Algérie commence à s'agiter dans le mauvais sens sous Boumediene. Depuis cette date, une course s'est engagée entre les USA et le président en cour des pays des non- alignés, sous l'égide de Houari Boumediene.

Le problème en cour, il est vu d'un mauvais œil par les Amériques, ce qui avait auparavant entrainé le premier choc en décembre 1973 quand le Chah d'Iran annonce le relèvement du prix du pétrole. Les USA, sous Nixon avaient consolidé fortement les liens entre les différents pays riches face aux pays démunis, le bloc des consommateurs se dresse en une seule et unique force face à l'OPEP, dans l'unique but de lui enlever la force qu'elle pouvait détenir ; alors que pour Henry Kissinger, il s'agissait simplement d'isoler l'OPEP et neutraliser ses forces, du reste du monde.

Kissinger expliquait à ses partenaires que l'augmentation du prix du pétrole ne permet plus de faire face à l' assistance des pays en voie de développement du tiers monde et Houari Boumediene était le premier président capable de faire face à cette riposte en tant que chef d'Etat et président de l'OPEP . C'est à partir de Lahore (Pakistan), en février 1974, au cours deuxième sommet des pays islamiques, qu'il dira fort :

« Nous entendons s'élever des voix pour dire aux pays du tiers monde que la hausse des prix du pétrole est dirigée contre eux. Depuis quand l'exploiteur est-il devenu l'avocat de l'exploité »

Les pays industriels nous vendent des produits industriels sans leur technologie à des prix très excessifs, tout en s'accaparant de force, de nos ressources naturelles. Qu'ils retirent leurs mains de nos ressources et respectent le jeu honnête du marché international.

La bataille du pétrole n'est que la face visible de l'iceberg tandis que la face cachée c'est un autre combat féroce concernant toutes les matières premières .De nouvelles actions vont être posées pour mettre à nu les problèmes concernant des rapports entre les pays riches (industriels) et les pays pauvres (tiers monde et pays en voie de développement).

Houari Boumediene en sa qualité de président des pays non-alignés, au cours de la réunion, en septembre 1973 de la conférence des pays non-alignés, n'a pas tardé un instant, à envoyer un message fort au secrétaire de l'ONU (Kurt waldeim), il avait réclamé à cet effet, une session spéciale des Nations unies, avec comme ordre du jour le problème sur la question de l'ensemble des matières premières).

Par ailleurs, il faut quand même signaler que la France de Pompidou sous Michel Jobert, alors ministre des Affaires étrangères, avait apporté son soutien à l'Algérie. La France avait souhaité, également, cette réunion mais limitée seulement au seul problème de l'énergie afin « de couper l'herbe sous les pieds des Etats-Unis ». Houari Boumediene n'avait pas accepté que l'OPEP porte seule le chapeau de tous les malheurs de l'économie mondiale, il voulait que chacun prenne ses propres responsabilités et que le poids soit reparti entre tout le monde, dans le domaine économique, car une solution d'ensemble est moins pénible que celle envisagée et qui concernait un seul côté.

Le duel s'est quand même engagé entre Houari Boumediene (Algérie) et Henry Kissinger (USA), ce dernier voulant colmater ce déficit alors que H. Boumediene veut l'élargir à d'autres ressources. La diplomatie algérienne voyait que si l'OPEP n'est pas imitée, dans le temps et dans l'espace, de la dimension tiers mondiste, par sa dimension à d'autres productions comme le café, le cacao, le cuivre, le caoutchouc, etc. la victoire pourrait être vaine et l'OPEP serait alors isolée du reste du monde et les seules pays membres de l'OPEP seront alors écrasés par le rouleau compresseur américain.

H. Boumediene étale alors tous ses talents notamment l'envoi d'émissaires algériens qui sillonneront les capitales de tous les continents de la planète afin de les convaincre de l'urgence d'organiser une réunion de l'ONU pour éviter que les pays riches consommateurs et les pays en voie de développement ( tiers monde) ne s'affrontent en dehors du cadre de l'ONU car tous les risques sont envisageables, même ceux qui se rapportent à la liquidation physique des personnes comme au temps de Mossedek (Iran). Il est clair que les USA veulent, à tout prix et par tous lesmoyens, faire échouer cette noble entreprise ; surtout que cette action venant d'un petit pays qui veut se faire valoir en droit sur la justesse des choses. Déjà aux Etats-Unis, pendant cette époque de pression, les tambours de guerre se font entendre, sous les bottes des marines qui se profilent dans les régions des pays du Golfe. H Boumediene en fin stratège et visionnaire tente de contourner les Amériques et charme l'Europe pour la dissocier des USA.

C'est à la veille de la conférence des gros consommateurs de pétrole, à Washington ; une réunion anti-OPEP, que H. Boumediene dira sous la plume de Paul Balta, dans le journal Le Monde : « les Européens ont actuellement la possibilité de jeter les bases d'une coopération à long terme qui garantirait leur approvisionnement en pétrole pendant 25 ans, en échange de leur participation au développement d'une région qui les intéresse au premier chef. La conférence de Washington, dira Boumediene, vise à freiner la nouvelle politique de lieu direct entre producteurs et consommateurs du pétrole. La véritable préoccupation des USA n'est pas de faire baisser les prix mais de contrôler les sources d'énergies et donc d'assurer son pouvoir politique et d'ajouter si les Européens s'inclinent devant le gros bâton américain, ils passeront une nouvelle fois à côté du chemin de l'histoire. »

M. Jobert apporte le plein soutien à Houari Boumediene et c'est à New-York que la réussite de l'initiative algérienne prit forme; la session de l ONU s'ouvre, le 10 avril 1974. Il faut signaler dans se sens, que nombreux observateurs ne cachaient pas leur scepticisme car ils voyaient dans cette réunion que de la parlotte et des discours creux, sans fin et sans lendemain.

Du haut de la tribune de l'ONU quand les applaudissements ont fusé à l'endroit d'un grand homme, sûr de lui, Houari Boumediene frappe fortement les esprits en prononçant, pour la première fois dans cet hémicycle, son discours en arabe, il défend une toute nouvelle conception entièrement indite portant sur les relations internationales entre pays riches et pays pauvres, à commencer par :

* la nationalisation des ressources naturelles

* la valorisation sur place des matières premières

Par conséquent, les pays en voie de développement doivent s'inscrire dans la dialectique de lutte :

*compter sur soi-même au niveau international

*Et sur ses propres moyens sur le plan interne.

C'est déjà le nouvel ordre économique international qui se dessine et implique que les pays riches renoncent à des privilèges exorbitants dans les domaines monétaire, financier, technologique, commercial et alimentaire.

*Le gaspillage des pays riches est une insulte à la misère des pays pauvres dira Houari Boumediene,

* la course aux armements

* la destruction des surplus agricoles dans un monde en proie à la famine est indéfendable.

*Les manipulations monétaire et financière à sens unique appauvrissent les pays pauvres.

Il ne faut pas croire que Houari Boumediene était naïf au point de penser que cette conférence des Nations unies sera suivie d'effets immédiats. En recevant Willy Brandt Chancelier allemand, il dira que « le nouvel ordre c'est vrai que ce système est dur à changer mais l'essentiel est de le reconnaitre d'abord qu'il est injuste ; nous voulons découvrir, avec vous, ce système bâti en notre absence ». Les voies, les moyens, les méthodes, sont à discuter et à négocier.

A New York, il n'était pas question d'imposer des résolutions triomphales mais de semer les bonnes graines de justice, d'équité et d'idées justes. Les pays riches ont besoin de nous ; bien plus leur avenir tient dans le tiers monde, car s'ils constituent un marché de techniciens ceux du tiers monde représentent, en contrepartie, un marché de main-d'œuvre et de matière première. Le monde industriel a, en outre, besoin d'exporter ses produits autant qu'il a besoin d'acheter nos matières premières, le maintien de la prospérité dans les pays riches dépend, dans une large mesure, de notre contribution, aussi, nous, nous ne pourrons accepter d'être considérés comme une quantité négligeable dans ce monde, nous sommes une force et nous avons beaucoup à dire, dans les assises internationales ; notre combat vise à mettre en évidence la complémentarité entre les pays du tiers monde et les pays industrialisés afin d'établir un ordre économique international équilibré. Par contre, les USA:

*veulent le leadership dans le domaine de l'énergie et instaurer une forme de protectorat sur les pays consommateurs et exportateurs

*empêchent tout développement de coopération d'Etat à Etat

La politique pétrolière est posée en termes de dépendance et d indépendance

* ceci dit, engager l'épreuve de force pour tout ce qui se trouve sur ce chemin et Boumediene en faisait face, car il voulait absolument se battre contre ce rouleau compresseur. Le bâton US s'est actionné par la voie de la CIA où le poison électronique a fait l'effet menant à la disparition de Houari Boumediene.

Boumediene avait une position plus engagé dans l'affrontement Nord-Sud que celle très différente de la rivalité Est-Ouest et l'Algérie est devenue, aux yeux du monde, la capitale révolutionnaire et par conséquent la cible n°1 de l'impérialisme et du sionisme. H. Kissinger s'est permis de faire une halte à Alger, en décembre 1973, pour tâter le pouls de H. Boumediene, à propos du conflit du Moyen-Orient ; il voulait savoir si vraiment Alger était modérée ou se situait du côté des durs tels Baghdad, Damas et Tripoli.

H. Boumediene n'avait pas mâché ses mots : « Je ne peux dire pour vous répondre que ce que j'ai déjà dit aux leaders de la résistance palestinienne : l'Algérie ne pratique pas la surenchère, elle ne peut qu'appuyer les positions des Palestiniens, exiger plus d'eux c'est de la démagogie, moins de la trahison »

Boumediene savait très bien que les USA cherche par tous les moyens à faire taire l'Algérie qui crie très fort dans l' arène internationale. Il est l'unique président capable de s'adresser avec impertinence aux grands pour leur dire que le roi est nu. Henry Kissinger contre-attaque avec une stratégie nouvelle, en passant par Sadat (Egypte) et aller à contre-sens de Nasser, « l'infitah » (libéralisme) de son économie va avec la reconnaissance d'Israël, ce qui va freiner l'aventure de Boumediene, tout en remettant le compteur à zéro suite à la guerre d'octobre et placer la « Pax americana » au devant, le Front du refus ne regroupe que quelques pays arabes dont les présidents ont disparu.

H. Boumediene est parti sur l'ordre de la machine des services de sécurité américains, et le 6 mars 1991, George Bush père annonce la création d'un nouvel ordre mondial :

« Nous avons devant nous l'occasion de construire pour nous-mêmes et pour les générations futures un nouvel ordre mondial. Un monde où la primauté de la loi, pas la loi de la jungle, régit la conduite des nations. Lorsque nous serons victorieux, et nous le serons, nous aurons une réelle chance avec ce nouvel ordre mondial. Un ordre régi par un conseil crédible qui tiendra enfin son rôle, et maintiendra la paix, afin d'accomplir la promesse et la vision des fondateurs des Nations unies. »

Après le ?printemps arabe' et les révolutions de couleurs, la Syrie arrête la machine de guerre et mettra fin au système unipolaire US avec l aide de l'Iran, la Russie et le BRICS

Notes :

- Paul Balta et Claudine Rulleau : La Stratégie de Boumediène, Paris Sindbad 1978.

Anias Francos et J. P. Sérénie

- P. Balta : « Boumediene me disait que j'avais du sang arabe.»

G77. Organisé en 1967, à Alger, où il a publié la fameuse «Charte des droits économiques du Tiers-Monde : base de tout débat ultérieur « Nord-Sud »

« Que reste-t-il de Boumediene, Jeune Afrique du 18/2/008 ?

-*citations du Président Boumediene : L'héritage ; que reste-t-il ?

-Discours du Président Boumediene, 19 Juin-1965 -19 Juin 1970 Tome II, Edit 2 par le ministère de l'Information et de la Culture.