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Chimères

par Abdelkrim Zerzouri

Entre le gazoduc «Transsaharien» qui devrait relier le Nigéria à l'Algérie via le Niger, sur une longueur de 4.128 km, dont 1.037 km en territoire nigérian, 841 km au Niger et 2.310 km en Algérie, et le gazoduc Nigéria-Maroc, un seul verra le jour. Forcément, le Nigéria ne peut pas s'engager dans deux projets de gazoduc parallèles qui ont la même finalité commerciale, principalement l'approvisionnement de l'Europe en gaz, et le ministre nigérian des Affaires étrangères, Yusuf Tuggar, a affirmé, le lundi 18 décembre, à partir d'Oran, en marge du 10e séminaire de haut niveau sur la sécurité et la paix en Afrique, que le projet du gazoduc transsaharien (TSGP) reliant le Nigeria et l'Algérie, en passant par le Niger, réalise des «progrès significatifs et notables». Une déclaration qui mérite de focaliser toute l'attention, aussi bien celle de pays attirés par l'odeur du gaz et tentés par une participation dans le «projet» du gazoduc Nigéria-Maroc, que celle du premier concerné, en l'occurrence le roi du Maroc, qui se casse l'échine à chercher des soutiens financiers pour faire avancer les études de son projet, d'un coût faramineux (autour des 25 milliards de dollars, voire plus, d'après certaines estimations), et qui n'a réussi à récolter que quelques promesses de financements à hauteur de quelques millions de dollars, sans se lasser de répéter, par la voix de son personnel amplifiée par certains médias, que le projet est en bonne voie. Ce que certains présentent comme une bataille des gazoducs n'est que peine perdue pour le Maroc et ses sponsors, qui doivent bien savoir qu'à l'origine, c'est l'Algérie qui a lancé ce projet et que le Maroc ne s'y est intéressé que tardivement.

En tout cas, en sus des déclarations officielles du gouvernement nigérian, favorables au projet du gazoduc transsaharien, le poids des arguments algériens pèse très lourd devant les théories du makhzen, à commencer par les moyens financiers dont dispose l'Algérie, ainsi que les infrastructures de base fin prêtes, dont le réseau de transports, les complexes de gaz naturel liquéfié (GNL) et les infrastructures de pétrochimie, sans parler d'une expérience acquise depuis de longues années sur le plan de l'approvisionnement de l'Europe qui fait de l'Algérie un partenaire solide et fiable. A entendre le ministre nigérian des Affaires étrangères, aucun doute ne subsiste, c'est le gazoduc Transsaharien qui se met en place d'une manière effective, réalisant des «progrès significatifs et notables» dans les régions algérienne et nigériane, loin, très loin, des rêves du makhzen. Reste à se demander pourquoi le Maroc, qui sait pertinemment qu'il ne pourra jamais rivaliser sur ce plan avec l'Algérie, s'entête-t-il à s'accrocher à des chimères ?