Envoyer à un ami | Version à imprimer | Version en PDF

Drame de Melilla: Le Premier ministre espagnol charge le Maroc

par El-Houari Dilmi

La question de la violation des Droits de l'Homme dans la tragédie de Melilla, qui a coûté la vie à une trentaine de migrants le 24 juin, « doit être posée à Rabat », a estimé, hier dimanche, le Premier ministre espagnol dans un entretien au quotidien «El Pais».

Interrogé sur les images de la tragédie qu'il disait n'avoir pas vues lors de sa dernière intervention, mercredi, sur le sujet, et sur le «respect des Droits de l'Homme dans pareille situation», Pedro Sanchez a affirmé que « c'est le gouvernement du Maroc qui devrait répondre à cette question». « Nous devons, nous, parler de ce que l'on fait en Espagne », a poursuivi Pedro Sanchez.

Le 24 juin, une trentaine de migrants africains ont péri lors de la tentative d'environ 2.000 personnes d'entrer par la force dans l'enclave espagnole de Melilla au Maroc. Des images diffusées plusieurs heures après ont mis au jour des actes de brutalité, avec des corps jonchant le sol, des policiers marocains assénant des coups et les forces de l'ordre espagnoles tirant des gaz lacrymogènes sur des hommes accrochés à des grillages, selon l'ONG «Human Rights Watch» (HRW). Pour le Premier ministre, Melilla est « le dernier épisode d'une tragédie qui a commencé bien avant, à plusieurs kilomètres de là », parlant de nouveau d'une attaque violente, avec des hommes « armés », et d'un évènement orchestré par les « mafias », un argument que le gouvernement espagnol ne cesse de brandir depuis cette affaire.

Le bilan humain du drame n'est pas encore officiellement connu et pour le moment, les autorités évoquant une « trentaine » de décès, soit le plus lourd jamais enregistré aux frontières entre le Maroc et les deux enclaves. Il a provoqué l'indignation internationale, avec notamment des propos d'une sévérité rare de la part de l'ONU, ainsi que l'ouverture de deux enquêtes en Espagne et une mission d'information au Maroc.

De son côté, l'envoyé spécial chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb, Ammar Belani, a confirmé, dans une déclaration à «Echorouk Online», que la « majorité des migrants qui ont été tués de sang-froid en tentant de franchir la clôture de l'enclave de Melilla, sont arrivés au Maroc à bord des avions de la compagnie marocaine, Royal Air Maroc ». Le représentant du ministère algérien des Affaires étrangères, a également indiqué que face au « carnage commis de sang-froid de près d'une centaine de migrants par les forces de sécurité du Makhzen, selon les propres propos d'un ancien haut responsable marocain, les responsables marocains « font preuve d'un autisme effrayant en continuant à s'accrocher désespérément au disque rayé de la gestion humanitaire du dossier migratoire, et faire la part belle aux mensonges au sujet de l'Algérie, malgré la présence d'indices clairs que la grande majorité de ces migrants sont arrivés dans le royaume à bord de vols de Royal Air Maroc ». Amar Belani a également expliqué que « cette diversion et falsification éhontée des faits n'aura pas fait long feu face à des dizaines de vives réactions à travers le monde (et au Maroc) qui ont condamné la violation odieuse, planifiée et systématique des droits fondamentaux de ces migrants qui ont été soumis à un châtiment collectif qui restera gravé dans la mémoire de tous les Africains du continent et de la diaspora », a-t-il affirmé.

Toujours selon l'envoyé spécial chargé de la question du Sahara occidental et des pays du Maghreb, « ce lynchage sauvage de migrants, au mépris des clauses les plus élémentaires du droit international humanitaire, restera marqué au fer rouge dans la conscience de ceux qui souhaitent jouer le rôle des gendarmes et de ceux qui les soutiennent de l'autre côté de la Méditerranée, dans l'accomplissement de cette sale et indescriptible besogne».