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La Libye et l'espoir suspendu

par Abdou BENABBOU

Routes barrées, édifices officiels incendiés jusqu'au Parlement embrasé par le feu. Toutes les villes libyennes sans exception vivent en ces dernières quarante huit heures un embrasement général provoqué par des soulèvements populaires pour réclamer de l'air et de la lumière. Paradoxalement pour une bonne partie de la population, secouée par la nostalgie, l'aisance sociale s'est éteinte avec la mort de Maamar Kadhafi. Phénoménal et curieux état des lieux actuel que celui constaté dans un pays très riche de son pétrole qui n'a pas réussi à trouver des repères d'une démocratie réclamée par un peuple pris en étau entre les manœuvres géostratégiques des grandes puissances et un dilettantisme économique et social rentier passé quand tout lui était gratuit.

Ce qui reste du Printemps arabe en Libye comme pour d'autres pays de la région n'est pas glorieux et des révolutions populaires encouragées par les puissances pour leurs propres intérêts, on ne garde plus que les qualificatifs évasifs et un espoir suspendu en l'air. Les Libyens n'ont ni électricité aujourd'hui ni eau et une large partie de sa jeunesse s'en va en mer se suicider. On en est à se suffire à réclamer avec une nouvelle violence un peu de lueur et de l'oxygène pour respirer dans une société désabusée et coincée par les luttes pour le pouvoir entre des illuminés en mal de commandement. C'est là tout un symbole d'une démocratie déprogrammée car on a eu tort de croire qu'il suffisait de quelques centaines de morts et que la colère populaire occupe les rues pour que le bonheur tombe du ciel. Des peuples mal éclairés ignorent que la démocratie est un marathon infini qui ne s'adapte jamais avec la réclamation du beurre et de son argent quoi qu'elle en coûte.

Est-ce à retenir que le besoin de liberté des peuples n'est guidé que par l'utopie ? Le croire serait un blasphème caractérisé car ce besoin est inscrit dans les gènes des humains toujours à courir derrière le mieux-être et le progrès. Mais une réelle démocratie ne se construit pas seulement du jour au lendemain par les turbulences qui éclatent dans les rues ni dans la mise à feu des parlements.