Deux semaines seulement nous séparent de l'Aïd El-Adha, et les ménages se préparent tant bien que mal à
perpétuer cette fête appréciée mais si redoutée, en raison de son impact sur
les finances familiales, sachant que les charges de ce sacrifice viennent se
greffer aux contraintes financières habituelles des familles. Beaucoup de
citoyens affirment avoir été refroidis par les prix pratiqués cette année. M. Nedjari, transporteur public, qui cherche désespérément un
mouton pour cette fête souligne que l'Aïd constitue aujourd'hui un vrai fardeau
pour le petit commerçant et pour l'employé à revenu modeste. Rencontré, hier,
au niveau d'un marché hebdomadaire aux bestiaux, ce père de famille évoque sa
situation sociale difficile. « Je souffre toujours des retombées de la crise
sanitaire du coronavirus car je n'ai pratiquement pas travaillé depuis plus de
deux ans. J'ai fait le tour des vendeurs d'ovins de ce grand marché, pour se
procurer un bélier ou une brebis mais c'est impossible, car le mouton coûte
cher cette année ! Une grande différence par rapport à l'année écoulée, le prix
du bélier varie en moyenne, entre 35.000 et 120.000 DA. Un bélier de 25 à 30 kg
vaut 70.000 DA et même plus, tandis que celui de 35 kg à 45 kg, est cédé entre
85.000 à 120.000 DA. Même la brebis, qui est préférée par les familles
modestes, a vu son prix s'envoler entre 35.000 et 45.000 DA et ce contrairement
aux années précédentes, où le mouton était cédé entre 15.000 et 30.000 DA.
C'est trop pour moi ! Avec ces prix excessifs, je n'ai que la moitié du montant
demandé pour un mouton de gabarit moyen, je suis contraint de chercher un
maquignon qui m'accorde une facilité de paiement sinon je ne pourrai jamais
acquérir une bête pour la fête de l'Aïd El Adha. Je
vais temporiser encore, peut-être que les jours qui viennent les prix des moutons
vont chuter, on verra, ... Sinon je me contenterai de quelques kilos de viande
que je vais acheter auprès du boucher pour ne pas gêner mes enfants».
Pour sa part, Gazouli, un ouvrier retraité qui touche une allocation de
retraite (et non une pension de retraite) d'environ 7.000 DA, a perdu tout
espoir de fêter cet Aïd comme les autres. « Le montant dérisoire de
l'allocation de retraite comme le mien, peut-il suffire pour subvenir aux
besoins quotidiens et acheter un mouton pour les enfants, je suis obligé de
bouder ce sacrifice ! J'ai travaillé presque 10 ans comme ouvrier, je me
retrouve aujourd'hui avec une allocation de misère ! Tout ce que je souhaite,
c'est que les responsables concernés prennent des décisions pour s'aligner avec
le SNMG et relever le seuil des petites allocations de moins de 15.000 DA, afin
de nous assurer ne serait-ce que la dignité humaine ! Notre pouvoir d'achat est
très bas », se plaint ce père de famille, qui n'arrive pas à joindre les deux
bouts. Par ailleurs, certains fonctionnaires préfèrent se rendre à Naâma, Mecheria, Aïn Sefra, Bayadh
et dans la wilaya de Sidi Bel Abbès, pour rechercher
une clémence quelque part des éleveurs de ces localités réputées pour l'élevage
ovin. « Chaque année, je me déplace avec mes frères pour acheter des moutons à Mécheria, c'est moins cher qu'ici et on achète les animaux
directement chez les éleveurs », affirme un fonctionnaire de la CNR. De leur
côté, les éleveurs d'ovins et de bovins se plaignent de « cette hausse
vertigineuse » des aliments de bétail. « La flambée du coût des matières
premières s'est répercutée sur le consommateur final, et, du coup, la situation
est devenue particulièrement complexe pour le secteur de l'alimentation animale
et plus généralement pour les filières d'élevage d'ovins et de bovins ». Selon
M. Bendjemai, un grand éleveur d'ovins et de bovins
de la commune de Fehoul, de nombreux éleveurs se sont
abstenus de faire dans la revente d'animaux cette année comme ils ont
l'habitude de le faire à l'approche de l'Aïd El Adha,
en raison du spectre de la sécheresse et la hausse du coût des aliments de
bétail. « L'année dernière, j'ai acheté pour plus de 100 millions de bottes de
foins pour nourrir mes bêtes dans l'espoir de les revendre, mais hélas, je me
suis retrouvé dans une situation de mévente, ce qui m'a poussé à les brader
pour éviter d'autres charges et frais inutiles d'élevage », révèle cet éleveur.