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Les dos d'âne et la responsabilité de chacun

par Abdou BENABBOU

Malgré quelques gênes et de petits inconforts constatés ici et là, Oran, la capitale de l'Ouest se fait belle à la faveur des Jeux méditerranéens. La ville a eu tout à gagner grâce à l'argent du Trésor pour redorer le blason de plusieurs infrastructures jusqu'ici négligées.

Avec un certain bonheur, les automobilistes, sereins, armés de sagesse et de pondération, ont goûté pour un moment à la satisfaction de voir les routes rafraîchies par un nouvel asphalte que tout le monde attendait. Mais aussitôt le récent visage des routes en divers endroits prêterait à croire que la satisfaction ne sera que de courte durée. Les autorités locales ont cru bien faire en balafrant à chaque cent mètres les rues et les boulevards avec les sacro-saints dos d'âne pour qu'Oran reste la capitale du monde des ralentisseurs. De plus, ils ne répondent aucunement aux normes réglementaires et ceux bétonnés sur le sol ne feront que le seul bonheur et la satisfaction des mécaniciens.

Ce phénomène devenu imparable et incontournable n'est pas anodin. Il est d'une profondeur inouïe née des tares et de la désarticulation sociale d'une population étranglée de plus en plus par la mal-vie. Les autorités ne sont pas les seules en cause, car de guerre lasse elles tentent par les moyens qui sont à leur disposition pour lutter contre l'imbécilité grandissante d'une partie des automobilismes qui n'ont trouvé comme moyen d'affirmation du développement de soi que la conduite débile de leurs véhicules.

Les parades des représentants de l'Etat contre l'incivisme et la violence sont lourdes de sens et renvoient à un large diagnostic des causes des méfaits où la politique, la culture, le mauvais partage des espaces communs occupent une place de choix. Et de fait, l'on ne se rend pas compte que le non-respect de ses concitoyens par de véritables crétins qui envahissent les routes est une arme dévastatrice contre le bien-être de tous et le préconçu élémentaire de la démocratie.

Occuper sa place dans l'espace public avec maturité et respect de l'autre est, contrairement aux fausses croyances, la meilleure recette pour mettre les gouvernants face à leurs responsabilités. L'obéissance civile et le comportement civilisé ne sont pas un gage de soumission à l'adresse de ceux qui gouvernent, mais le meilleur signe d'élévation et de respect de soi.